5G : ce que dit le rapport remis au gouvernement

La 5G doit être déployée en France à partir de la fin de l'année 2020.
La 5G doit être déployée en France à partir de la fin de l'année 2020. © Josep LAGO / AFP
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Le gouvernement a reçu et publié mardi un rapport très attendu sur la 5G, réalisé par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des finances (IGF). Ce premier texte, qu'Europe 1 s'est procuré, doit servir de référence pour le développement de cette technologie en France. Il souligne le retard de la France et les risques quasi-nuls pour la santé.
DÉCRYPTAGE

Le timing est presque parfait : alors que le débat sur le 5G fait rage en France, que des élus réclament un moratoire sur son développement, le gouvernement a reçu mardi matin un rapport de référence sur cette technologie qui doit booster les flux de données dans les prochaines années. Réalisé par plusieurs services de l'État, il s'agit d'une synthèse des expériences menées à l'étranger, où des pays sont bien plus avancés que la France. Intérêt de la 5G pour les particuliers et les professionnels, retard de la France et surtout éventuels risques pour la santé : le rapport apporte des réponses aux nombreuses questions qui se posent.

La 5G, une nécessité technologique

Le rapport rappelle d'abord l'intérêt de la 5G, technologie qui permettra de bénéficier d'un débit 10 fois supérieur à celui de la 4G. Elle servira aux particuliers, pour naviguer sur Internet toujours plus vite ou pour regarder des films en streaming en HD sur son téléphone par exemple, et pour utiliser des objets connectés de plus en plus nombreux autour de nous. La 5G "pourrait permettre de faire fonctionner un million d’objets connectés au kilomètre carré", souligne le rapport. Elle servira au développement des industries du futur : usines 4.0, voitures autonomes, etc.

Et le besoin de franchir un cap se fait sentir : le trafic de données a été multiplié par dix entre 2015 et 2019 et augmente désormais de 50% par an. Résultat, selon les opérateurs, il y a un risque de saturation des réseaux 4G actuels en 2022 en France. Pour autant, la 5G n'est pas une révolution, il n'y aura pas de rupture technologique. Le rapport parle ainsi d'une "4G++". Elle viendra d'ailleurs dans un premier temps se greffer sur les réseaux existants, sur des fréquences courantes (700GHz, celles de la 4G et 3,5 GHz, proches de celles utilisées par le Wifi) avant de bénéficier d'antennes spécifiques et de passer, en 2024, sur des fréquences plus hautes (26 GHz, utilisées par les réseaux fixes et les liaisons satellites).

La France est en retard sur ses voisins

Deuxième constat du rapport : la France doit accélérer si elle ne veut pas être lâchée technologiquement. Sur les 26 pays étudiés, seuls cinq n'ont pas encore lancé d'offres commerciales : Belgique, Estonie, Brésil, Singapour et donc, France. En face, la Corée du Sud dispose déjà de 118.000 antennes 5G et compte sept millions d'abonnés. Les États-Unis et la Chine ont également entamé leur virage l'an dernier et douze pays européens ont déjà lancé des offres grand public. "Il faut qu'on avance. Nous avons un an et demi de retard sur nos voisins", déplore-t-on à Bercy.

En l'état, il n'est "pas question de lancer un moratoire, ni sur les enchères pour les fréquences (qui débutent le 29 septembre, ndlr), ni sur le développement de la 5G", martèle-t-on au cabinet du secrétaire d'État au Numérique Cédric O. "Aucun pays de l’échantillon n’a organisé de concertation nationale spécifiquement dédiée à la 5G", précise d'ailleurs le rapport.

En revanche, des consultations locales ont fait leurs preuves au Canada, en Italie, en Suisse… Une piste que va suivre le gouvernement en installant un "comité de suivi" avec les associations d'élus. "Il faut y aller mais en offrant davantage de transparence et de pédagogie", reconnaît-on à Bercy.

Un risque limité pour la santé…

C'est l'une des inquiétudes principales des opposants à la 5G : ces ondes, supposées plus puissantes, ne risquent-elles pas d'avoir un impact sur la santé des Français ? Pour répondre à cette interrogation, les inspecteurs ont analysé plusieurs études menées dans les pays où la 5G est déjà une réalité. L’exposition des utilisateurs aux ondes électromagnétiques "devrait rester modérée dans la première phase du développement" de la 5G, conclut le rapport. Les seuils de tolérance d'exposition aux ondes sont inscrits dans la loi en France et ne sont jamais dépassés : les relevés actuels placent le niveau médian d’exposition à un niveau 150 fois inférieur à la limite fixée.

En revanche, le rapport souligne que l'on "peut raisonnablement estimer que l’introduction de la 5G pourrait contribuer mécaniquement à une augmentation des 'points atypiques'", des endroits où le niveau d'exposition ne dépasse pas les seuils mais n'est plus "que" 10 fois inférieur à la norme. Il en existe seulement 29 en France aujourd'hui. Les inspecteurs demandent à ce que "ce point fasse l’objet d’une vigilance particulière" à l'avenir. "La 5G ne générera pas de rupture en matière d’exposition dans les zones urbaines", estime le rapport, qui parle plutôt d’une "évolution modérée". 

Par ailleurs, actuellement, seuls les effets thermiques des rayonnements électromagnétiques sur les tissus sont avérés et donc pris en compte. Le rapport explique, à ce sujet, que la propagation des ondes haute fréquence de 26 GHz, qui serviront à la 5G, est moindre dans les bâtiments et les tissus. Autrement dit, les ondes 5G pénétreraient moins la peau que les ondes TV ou Wifi. Les effets de long terme, comme la possibilité que les ondes soient cancérogènes, sont, eux, encore sujets à débat au sein de la communauté scientifique. 

… mais la vigilance reste de mise

Sur le sujet des antennes, là aussi le rapport se veut rassurant. Là où les antennes 4G émettent en continu dans l'ensemble de leur rayon d'action, les futures antennes 5G, dites "actives", constituées de plusieurs petites antennes, s'activeront en fonction de la demande et cibleront directement les utilisateurs. Les premiers relevés effectués sur des sites d’essai français ne font pas état de mesures hors normes, même en cas de simulation avec trafic de données maximal. Une vaste étude menée en Corée du Sud indique, elle, que dans les quartiers fréquentés de Séoul, l'exposition aux ondes est équivalente à 2% de la norme acceptable et 6% à proximité des antennes.

Le seul point d'interrogation du rapport en matière de santé concerne les fréquences de 26GHz, destinées à porter la 5G à moyen terme. Faute de données suffisantes aujourd'hui, "le recours ultérieur à la bande autour de 26 GHz amènera des effets nouveaux restant à documenter", notent les auteurs. C'est pourquoi le rapport recommande de conforter les moyens alloués à la recherche sur l’exposition aux ondes électromagnétiques et d'adapter les modalités de surveillance du niveau d’exposition aux ondes en effectuant des mesures avant et après installation d’antennes 5G. Le tout en "améliorant la transparence et l'information à la population".

Le rapport, qui doit être suivi de nouveaux travaux à l'avenir, ne contient en revanche pas de volet "Environnement", l'impact écologique de la 5G suscitant pourtant de nombreuses inquiétudes.