JO de Tokyo : pourquoi le bilan de la France est mitigé

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Niokla Karabatic (à gauche) et l'équipe de France de judo (au centre) ont décroché l'or, tandis que Renaud Lavillenie (à droite) a manqué son concours du saut à la perche. © Photos AFP
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Gauthier Delomez
La France termine ses Jeux olympiques de Tokyo à la 8e place au tableau des médailles avec 33 breloques dont 10 en or. Si les sports collectifs ont fait briller la formation française, les rendez-vous manqués en natation et en athlétisme viennent ternir le bilan final de la délégation française, à trois ans des JO de Paris 2024.
ANALYSE

C'est l'heure du bilan pour la délégation française aux Jeux olympiques de Tokyo, alors que les regards sont déjà tournés vers Paris 2024. L'équipe de France a terminé ses Jeux à la 8e place au tableau des médailles, soit une position en dessous de son classement à Rio 2016 et Londres 2012 (7e). Surtout, les 378 athlètes tricolores engagés au Japon n'ont récolté "que" 33 médailles, contre les 42 glanées il y a cinq ans ou les 41 remportées à Pékin, en 2008. Derrière les chiffres tokyoïtes en-deçà des ambitions de la délégation, qui visait à nouveau une quarantaine de podiums, il y a tout de même des satisfactions avec le succès historique des sports collectifs. Des promesses qui se mêlent à des inquiétudes, à trois ans des Olympiades parisiennes.

L'incroyable réussite pour les sports collectifs

 Le doublé historique du handball

Le handball français s'est posé sur le toit de l'Olympe à Tokyo. Les Bleus ont décroché leur troisième titre olympique en quatre finales consécutives, tandis que l'équipe de France féminine s'est elle imposée pour la première fois en finale des Jeux, après sa première médaille d'argent en 2016. Depuis la Yougoslavie en 1984, aucun pays n'avait remporté les deux tournois de handball au cours d'une même Olympiade. C'est sans conteste la plus grande réussite du sport français à Tokyo.

 Le premier titre olympique des Bleus du volley

À l'image des handballeuses, les volleyeurs français ont également décroché leur premier titre olympique à Tokyo, après une finale de légende face à la Russie. La consécration tant espérée pour la génération dorée d'Earvin Ngapeth, Jean Patry ou encore Trévor Clévenot, essentiels tout au long de la compétition. Le sélectionneur Laurent Tillie a su redresser son équipe, proche de l'élimination en phase de groupes. La consécration aussi pour le coach emblématique des Bleus, qui quitte ses fonctions à l'issue des JO.

 Les promesses du basket

À l'instar du hand, la France a également performé dans les deux tableaux du tournoi de basket, avec l'argent des hommes et le bronze des femmes dans une discipline toujours dominée par les États-Unis. Après leur victoire inaugurale contre une "Team USA" amoindrie, et l'exploit en demi-finales contre la Slovénie, les joueurs de Vincent Collet ont calé de justesse face aux Américains en finale. Du côté des Bleues, les partenaires de Sandrine Gruda se sont parfaitement relevées de la lourde défaite en demi-finale pour s'adjuger la troisième place. Deux podiums pour la France en basket, une première dans l'histoire des Jeux.

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Rudy Gobert consolé par Evan Fournier après la finale perdue face aux basketteurs américains.
Crédits : Mohd RASFAN / AFP

En plus de ces résultats historiques, les Bleues du rugby à VII ont remporté l'argent en fin de première semaine. Au total, la France se classe 2e nation mondiale dans les sports collectifs à Tokyo (3 médailles d'or, 2 d'argent, 1 de bronze), derrière les États-Unis et devant le Japon. La délégation se hisse également en bonne position dans les sports de combat, notamment grâce au judo et à l'escrime.

Les sports de combat au rendez-vous à Tokyo

 Belle moisson en judo et un titre historique

L'un des sports favoris de la délégation française, le judo, a fait honneur à son statut dans le temple de la discipline, à Tokyo. Les Français ont récolté huit médailles (2 ors, 3 argents, 3 bronzes), un nombre record dans une édition. Mention spéciale à la porte-drapeau de la délégation, Clarisse Agbégnénou, qui a performé avec un titre en individuel et par équipes. En effet, pour la première fois aux Jeux, une épreuve de judo par équipes mixtes clôturait la semaine de la discipline. Les judokas tricolores, emmenés par un Teddy Riner revanchard après sa médaille de bronze en individuel, ont remporté le tout premier titre de cette épreuve face aux Japonais. Un fin en apothéose pour le judo français, qui prend déjà date pour Paris 2024.

 Le retour de l'escrime française au premier plan

Grande spécialité française, l'escrime a également apporté sa pierre à l'édifice (2 ors, 2 argents, 1 bronze). La compétition avait parfaitement débuté côté français avec le titre olympique inattendu et sensationnel de Romain Cannone à l'épée. Ses collègues fleurettistes ont par la suite assuré en remportant la médaille d'or face aux Russes, qui les avaient battus en 2016. Enfin, les escrimeuses du fleuret et du sabre ont apporté deux médailles d'argent, et Manon Brunet une breloque en bronze en individuel. Avec cinq médailles, l'escrime française est bien de retour après deux dernières Olympiades décevantes (trois médailles en 2016, aucune en 2012).

 L'éclair de Steven Da Costa au karaté

L'apparition et la disparition précoce du karaté aux Jeux de Tokyo est un crève-cœur pour Steven Da Costa, devenu le premier (et le seul) champion olympique de la discipline dans l'histoire des JO. Le numéro un mondial a répondu aux attentes en surclassant ses adversaires, et nul doute qu'il aurait aimé tenter de conserver sa médaille d'or à Paris. Malgré tout, le karatéka de 24 ans a remporté le plus beau titre de sa carrière au pays de la discipline.

Dans les sports de combat, Althéa Laurin a glané sa première médaille olympique, le bronze, à 21 ans en taekwondo. Mais d'autres disciplines repartent bredouille à l'image de la boxe, cinq ans après le "couple en or" Estelle Mossely et Tony Yoka. En lutte, la tête de série N.3 Koumba Larroque, grande chance de médaille, a été sortie d'entrée. Tout cela ne fait pas oublier les immenses déceptions et les inquiétudes qui ont émaillé le sport français à Tokyo.

Natation, athlétisme, cyclisme… ces disciplines où la France n'a pas brillé

 Derrière Florent Manaudou, la natation française pas encore au top niveau

La star de la natation française Florent Manaudou a remporté sa troisième médaille consécutive, l'argent, sur le 50 m nage libre aux Jeux olympiques. C'est la seule breloque que la France ramène du Japon en natation. Une chute vertigineuse entamée depuis Londres en 2012 (7) et Rio en 2016 (3). Les relais n'ont pris aucune breloque, une première depuis 2004. La relève illustrée par Maxime Grousset (22 ans), 4e du 100 m nage libre, ou Marie Wattel (24 ans), 6e du 100 m papillon, n'a pas suffisamment brillé pour s'inviter sur le podium. Peut-être une année de transition nécessaire pour la natation française avant les Jeux de Paris 2024.

 Un bilan inquiétant en athlétisme

Le bilan famélique de la natation est le même en athlétisme, avec la seule médaille d'argent de Kevin Mayer au décathlon. Un résultat global sans doute plus inquiétant puisque très peu d'athlètes avaient les armes pour négocier une breloque cet été. Alexandra Tavernier (4e) et Quentin Bigot (5e) ont échoué au pied du podium au lancer de marteau, tout comme Pascal Martinot-Lagarde au 110 m haies (5e). La blessure de Renaud Lavillenie, 8e du concours final du saut à la perche et les désillusions de Mélina Robert-Michon ou Pierre-Ambroise Bosse, éliminés rapidement, ont alourdi le bilan tricolore en athlétisme. Avec la natation, les deux disciplines stars des JO ont déçu côté français et inquiètent à trois ans des Jeux de Paris.

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Kevin Mayer est le seul tricolore médaillé aux JO de Tokyo en athlétisme, avec l'argent.
Crédits : Giuseppe CACACE / AFP

 Le cyclisme tricolore dans une pente descendante

Le cyclisme est l'autre discipline qui a douché les espoirs français. Sans ses stars (Julian Alaphilippe, Romain Bardet…), l'équipe de France a peiné à exister dans ces Jeux. La grande déception est venue du cross-country féminin, où Pauline Ferrand-Prévot, double championne du monde en titre, et Loana Lecomte ont terminé loin du podium. Le cyclisme français se sauve grâce à sa variante sur piste, où l'équipe de France de vitesse et les pistards Benjamin Thomas et Donavan Grondin sur l'américaine ont gagné la médaille de bronze.

Si les sports traditionnels des Jeux olympiques ont été décevants côté français, les nouvelles disciplines n'ont pas réussi à rectifier le tir malgré les promesses de médailles.

La déception des nouvelles disciplines

 Le fiasco du BMX

Le BMX freestyle faisait sa première apparition aux Jeux olympiques, mais Anthony Jeanjean, en bonne place dès les demi-finales, n'a terminé qu'à la 6e position en finale. Un résultat qui a sonné le glas du BMX hexagonal à Tokyo, après les courses manquées par les riders tricolores en finale. Malgré quatre finalistes, dont Joris Daudet et Sylvain André, anciens champions du monde, aucun n'a réussi à prendre une breloque pour la délégation française.

 La malchance de l'escalade française

Pour son entrée dans le programme olympique, l'escalade représentait une bonne opportunité pour la France avec les frères Bassa et Mickaël Mawem. Le premier, leader de la compétition avant la finale, s'est blessé lors de son dernier passage et n'a pu défendre ses chances par la suite. Mickaël est lui passé tout proche d'une médaille mais a terminé à la 5e place du premier concours masculin de l'histoire des Jeux. 

 Les promesses envolées des sports de glisse

On attendait beaucoup du surf à l'occasion de son entrée dans le programme olympique. Jérémy Florès, ancien champion du monde, Johanne Defay, N.2 mondiale, et Pauline Ado n'ont pas dépassé les huitièmes de finale, alors que Michel Bourez s'est lui arrêté en quarts. Déception également en skateboard où la France ne rapporte aucune médaille malgré la présence de Vincent Matheron en finale de l'épreuve du park.

La variante du basket à 3x3 faisait également son apparition aux JO, et l'équipe de France féminine est passée tout proche de la médaille de bronze après leur courte défaite face à la Chine. Résultat, à part le karaté, les athlètes français engagés dans des nouvelles disciplines n'ont pas pris la moindre médaille à Tokyo. À l'inverse, d'autres sports moins médiatisés ont tiré leur épingle du jeu.

Des promesses et des remises en question

 Aviron, voile, tir… Comment capitaliser sur les succès tricolores ?

Parmi les 378 athlètes français engagés aux JO, certains ont bien représenté leur discipline cet été en y décrochant une médaille. C'est le cas notamment dans les sports aquatiques, avec la voile et l'aviron. Charline Picon et Thomas Goyard ont chacun obtenu l'argent sur l'épreuve de la planche. Camille Lecointre et Aloïse Retournaz ont pris le bronze dans l'épreuve de 470. Surtout, la paire française de l'aviron Matthieu Androdias-Hugo Boucheron s'est imposée dans la catégorie deux de couple pour apporter un titre supplémentaire à la délégation. Autre succès à signaler dans ces Jeux, le titre de Jean Quiquampoix au tir à pistolet à 25 m, qui confirme sa performance de Rio 2016 où il avait pris l'argent.

Le triathlon et l'équitation ont aussi apporté des médailles pour la France, mais aussi un lot de déceptions. Le champion du monde de triathlon Vincent Luis a échoué en individuel avant d'aider l'équipe mixte à glaner la médaille de bronze, offrant ainsi la première breloque de l'histoire de la délégation française dans cette discipline aux JO. Enfin, en équitation, si l'équipe de France de concours complet a aussi décroché une belle breloque en bronze, celle du saut d'obstacles a craqué dans le dernier passage et a abandonné tout espoir de podium.

 Des remises en question avant les JO de Paris 2024

Enfin, d'autres disciplines repartent du Japon avec un zéro pointé qui pose question avant les Jeux olympiques de Paris 2024. L'équipe de France de football a connu un fiasco en étant éliminée au premier tour. En tennis, à part les quarts de finale d'Ugo Humbert et Jérémy Chardy, aucun joueur français n'a dépassé les huitièmes de finale, en simple ou en double. Le canoë, discipline de prédilection de Tony Estanguet, le président du comité d’organisation des JO 2024, repart également bredouille des Jeux. Bref, il y aura du travail dans tous ces sports, à trois ans du rendez-vous parisien.