EDITO - Agressions sexuelles dans le patinage : "Peut être va-t-on dire au revoir au vieux monde"

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Virginie Phulpin , modifié à
La ministre des Sports a demandé lundi à Didier Gailhaguet de démissionner. Le président de la Fédération française des sports de glace a été reçu hier par Roxana Maracineanu après les révélations sur les violences sexuelles dans le patinage français. Pour notre chroniqueuse Virginie Phulpin, la ministre a eu la réaction forte que l'on attendait, mais l'affaire n'est pas finie.

La parole s'est libérée dans le monde du patinage. Soupçonné d'avoir été informé dès 2000 des violences sexuelles commises par au moins un entraîneur, Didier Gaihaguet, président de la Fédération française des sports de glace, a été sommé de démissionner par la ministre des Sports. Selon notre éditorialiste Virginie Phulpin, Roxana Maracineanu a eu la réaction juste mais rien ne dit que Didier Gaihaguet va se plier à sa volonté.

Vingt ans à se taire, vingt ans à cautionner les agissements de Gilles Beyer. On peut clairement parler de vingt ans de complicité silencieuse. Le président de la fédération, Didier Gaihaguet concède qu’il a peut-être commis des erreurs, mais pas de faute. Mais qu'aurait-il fait si les patineuses n'avaient pas osé parler ? Il aurait courageusement continué à se taire et Gilles Beyer serait toujours en place dans le club des Français volants, comme il est longtemps resté au bureau exécutif de la fédération.

C’est grâce aux patineuses qui ont brisé le silence que les lignes ont bougé. Et enfin, une ministre prend ses responsabilités. Roxana Maracineanu n’a visiblement pas été convaincue par la défense du patron des sports de glace, mais comment aurait-elle pu l'être ?

La fédération et son président ne pouvaient pas ne pas être au courant des agissements de Gilles Beyer. Les patineurs l'ont fait savoir, des parents ont effectué des signalements dès le début des années 2000. C'est le ministère des Sports qui avait dû mettre fin aux fonctions de l'entraîneur en tant que cadre technique de la fédération. Didier Gailhaguet, en poste depuis 1998, savait tout ça et ne peut pas jouer les oies blanches choquées comme il le fait en ce moment. S'il n’était pas au courant, son incompétence doit le pousser à partir de toute façon.

Un animal politique

Concrètement, Roxana Maracineanu n'a pas le pouvoir de le limoger. Rien ne dit que Didier Gailhaguet va accepter de démissionner. Si sa position est difficilement tenable, l'homme reste un véritable animal politique. Il a vu passer treize ministres ou secrétaires d’Etat aux sports depuis qu’il est en poste. Il est revenu après un scandale de corruption. Il n’a visiblement pas envie de tomber tout seul.

Il devrait s'exprimer mercredi : si un château de cartes véreux devait s'écrouler, ce serait au final une bonne nouvelle. Mais Didier Gailhaguet doit en faire partie, plutôt que d'adresser des menaces à peine voilées à une ancienne ministre, Marie-George Buffet.

Roxana Maracineanu a déclenché "l’arme atomique". Elle a engagé une procédure de retrait de la délégation de l’Etat à cette fédération. C’est à dire que la fédération ne pourrait plus organiser de compétitions ni inscrire d’athlètes dans les compétitions internationales. Peut-être va-t-on enfin dire au revoir au vieux monde.