Tous derrière Loeb ?

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Yannick SAGORIN , modifié à
Le rallye d'Alsace célèbre ce week-end sa deuxième édition mais tous ne seront pas à la fête pour l'occasion. Au-delà d'un événement sportif pimenté par le retour au pays de Sébastien Loeb, le septuple champion du monde qui fait la fierté de sa région, la réalité du terrain se veut comme toujours beaucoup plus contrastée. Chez lui, Loeb ne sera pas forcément le bienvenu. Pas plus que ses collègues.

Le rallye d'Alsace célèbre ce week-end sa deuxième édition mais tous ne seront pas à la fête pour l'occasion. Au-delà d'un événement sportif pimenté par le retour au pays de Sébastien Loeb, le septuple champion du monde qui fait la fierté de sa région, la réalité du terrain se veut comme toujours beaucoup plus contrastée. Chez lui, Loeb ne sera pas forcément le bienvenu. Pas plus que ses collègues. Trop cher, trop dangereux, trop polluant, le rallye d'Alsace n'a pas forcément bonne presse au pays de Sébastien Loeb. Philippe Richert, président du conseil régional d'Alsace et ministre chargé des collectivités territoriales, a beau dire - "Je ne vois aucune raison pour que cette épreuve qui enflamme l'Alsace toute entière ne s'inscrive pas dans la durée. L'an dernier, la fête a été belle. Et 2011 se présente sous de bons auspices" - les opposants au rallye de France à la mode alsacienne ne sont pas rares. Et savent se faire entendre. Sur le terrain juridique d'abord. En juillet dernier, le tribunal administratif a donné raison à l'association Alsace Nature, jugeant illégal l'arrêté préfectoral qui l'an passé avait autorisé le passage du rallye dans le cadre protégé du Grand Ballon. Et sur le terrain médiatique, les détracteurs de la manche française du WRC ont également progressé, touchant un large public via les réseaux sociaux notamment grâce à une approche ludique: un jeu vidéo accessible à tous sur la toile et sobrement baptisé "Saccage ton Alsace". Le but ? Ravager les vignes, écraser des lapins et des vaches et rejeter un maximum de CO2. Avec pour accroche un slogan qui détone: "Le patrimoine, on s'en fout, la nature on s'en fout et l'Alsace... on s'en fout aussi !" "L'impact sur les zones protégées du massif vosgien et du vignoble alsacien sera certes ponctuel, mais il sera bien réel. Le sentier GR 5, près du Grand Ballon, sera aussi ouvert aux spectateurs avec les risques que cela comporte", s'inquiète Luc Huber, vice-président départemental d'Alsace Nature et membre du collectif "Ras le rallye" dans les colonnes des Dernières Nouvelles d'Alsace. "A l'heure d'un tarissement des ressources naturelles, on fait rouler des voitures qui consomment 50 litres aux 100 km. Rien n'est fait pour encourager la sobriété énergétique", renchérit Lionel Lebaut, porte-parole de Greenpeace, avant de suggérer une solution: "Supprimer la course l'an prochain pour avoir un bilan à zéro émission." Un bilan carbone lourd Compenser les émissions de CO2, tel a été le cheval de bataille des organisateurs du rallye cette année. "La compensation carbone sera financée à 100% par la Fédération française de sport automobile. Il n'y a aucun événement sportif aujourd'hui qui ait adopté cette démarche", se félicitait lundi Dominique Serieys, le directeur de l'épreuve, lors de la conférence de presse de présentation. En 2010, le rejet global, spectateurs compris (entre 250 000 et 300 000 personnes), avait été estimé à 2700 tonnes, ce qui aurait engendré une compensation de 37 800 euros, selon une étude commandée par Jacques Bigot, le président socialiste de la communauté urbaine de Strasbourg. Pas de quoi contenter les défenseurs de l'environnement. "Ça veut dire quoi ? Qu'on peut tout faire parce que c'est compensé. Ça renvoie une image extrêmement négative de la façon d'appréhender la crise écologique", s'indigne Maurice Wintz, le président d'Alsace Nature. Pourtant l'effort de la FFSA est réel. Ce week-end, près de 15 km de barrières seront déployés pour protéger les zones sensibles et pas moins de 50 commissaires seront affectés à la protection des lieux. Enfin les collectivités locales et territoriales, qui ont investi 1,44 millions d'euros dans l'épreuve pour un budget total de 3,54 millions, promettent un renforcement des réseaux de transport collectif, covoiturage compris. Preuve que les mentalités évoluent. Et si l'on en juge la longévité du Tour de Corse, 36 fois pointé au calendrier WRC, "Ras le rallye" et ses partisans n'ont pas fini de monter au créneau.