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avec Rémi Bostarron
Environ 40% des violences conjugales se font au moment de la grossesse, alors que l'enfant vient remettre en cause l'emprise de l'agresseur.

Un homme soupçonné d'avoir tué sa compagne, enceinte de trois mois, a été placé en garde à vue mercredi. Avant ce décès, 70 féminicides avaient été dénombrées en 2019 par le Collectif des proches et familles de victimes de féminicides. En 2017, 125 personnes sont mortes victimes de la violence de leur partenaire ou de leur ex-partenaire (contre 138 en 2016 et 136 en 2015), dont 109 femmes et 16 hommes, selon les derniers chiffres communiqués par le gouvernement. Et dans 40% des cas de violences conjugales, il s'agit de violences commises durant la grossesse.

"La violence sexuelle est un outil pour imposer le pouvoir"

Selon les associations, au moment de la grossesse, l'enfant est souvent perçu comme une menace, car il remet en cause l'emprise de l'agresseur. Les femmes refusent ce qu'elles acceptaient jusque-là. "Un conjoint ne devient pas violent juste parce que sa femme est enceinte. Il y avait déjà du contrôle, des dévalorisations, de l'isolement. Mais sous couvert d'humour, de jalousie, les femmes ne le repèrent pas forcément comme de la violence", explique au micro d'Europe 1 Mathilde Delepine, de la Maison des femmes de Saint-Denis.

Au moment de la grossesse, ces humiliations quotidiennes prennent souvent une autre tournure et se transforment en violences, parfois physiques, parfois sexuelles. "La violence sexuelle est un outil pour imposer le pouvoir, s'attaquer directement à la filière génitale, celle qui va donner la vie. C'est une période à risque. Malheureusement, ça devait arriver, et cela arrivera encore", déplore Mathilde Delepine.

Vers une généralisation du bracelet électronique

Les associations réclament aujourd'hui des moyens renforcés, notamment pour faire de la sensibilisation, faire prendre conscience aux femmes qu'elles sont victimes de violences, les écouter, les accueillir, les aider. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a indiqué au début de la semaine vouloir "généraliser" l'utilisation d'un bracelet électronique permettant de maintenir à distance les ex-conjoints violents pour lutter contre les violences conjugales.

Utilisé dans plusieurs pays européens dont l'Espagne, où les chiffres des meurtres de femmes ont baissé de manière significative depuis 10 ans, le port de ce bracelet est prévu par la loi en France depuis février 2017. Mais il n'a encore jamais été testé, malgré les demandes répétées de la juridiction de Pontoise, dans le Val-d'Oise pour une expérimentation.