SNCF : des Chibanis portent plainte contre leur avocate pour "abus de confiance"

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Clelie de Lesquen-Jonas dénonce une "fake news". © STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
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Europe1.fr avec AFP , modifié à
Ces Chibanis reprochent à leur ancienne avocate de retenir les indemnités qui leur reviennent. En janvier, la SNCF avait été condamnée à verser plus de 150 millions d'euros à 848 ex-cheminots.

Vingt-deux Chibanis, des retraités d'origine nord-africaine qui ont fait condamner la SNCF pour discrimination, ont porté plainte contre leur ancienne avocate pour "abus de confiance", lui reprochant de retenir les indemnités qui leur reviennent, selon la plainte consultée samedi, et révélée par Médiapart.

Contactée, Clélie de Lesquen-Jonas, l'avocate mise en cause, a dénoncé une "fake news" et prévenu qu'elle lancerait "probablement une action en diffamation".

Le 31 janvier 2018, la cour d'appel de Paris avait condamné la SNCF à verser plus de 150 millions d'euros de dommages et intérêts à 848 ex-cheminots, des Marocains pour la plupart.

L'avocate réclamerait un honoraire de résultat de 5%. Mais selon les plaignants, les indemnités ont été versées sur le compte professionnel de Me de Lesquen-Jonas, qui aurait refusé "d'adresser à ses clients les fonds leur revenant", conditionnant leur versement "à la signature d'une convention comportant un honoraire de résultat de 5%", peut-on lire dans la plainte, qui a été enregistrée par le parquet de Paris le 7 mai.

Or, toujours selon la plainte, l'avocate avait déjà "facturé forfaitairement son intervention", à hauteur de 6.000 euros devant le conseil de prud'hommes et de 30.000 euros devant la cour d'appel. Ces sommes auraient été acquittées, selon le document.

Les plaignants devaient toucher des sommes allant de 17.000 à 287.000 euros. "Je n'ai jamais conditionné la remise des fonds à la signature d'une convention", s'est défendue l'avocate, qui a fait valoir que le "processus de règlement des clients est forcément long quand vous avez 850 clients". Elle a ajouté que les sommes dues aux plaignants ont été réglées vendredi, en y retranchant toutefois "la note d'honoraires qui fait l'objet aujourd'hui du contentieux" dont est saisi le bâtonnier.

Une information confirmée par son confrère Me Maxime Cessieux, qui représente les 22 Chibanis ("cheveux blancs" en arabe). Mais, a-t-il, cela "ne change rien au fait qu'elle retient illégalement des sommes qui ne lui appartiennent pas".

Selon la plainte, les plaignants devaient toucher des sommes allant de 17.000 à 287.000 euros.

 

Droit de réponse de Maître Clélie de Lesquen-Jonas. 

L'article publié par Le Progrès le 2 juin 2018 fait état d'une plainte qui aurait été récemment déposée à mon encontre du chef d'abus de confiance par "vingt-deux Chibanis" retraités de la SNCF, dont j'avais fait condamner l'ancien employeur pour discrimination en janvier 2018 devant la Cour d'appel de Paris. En substance, l'article fait état d'accusations selon lesquelles les indemnités dues à mes clients auraient été "versées sur [mon] compte professionnel" et que j'aurais refusé de leur adresser "les fonds leur revenant", conditionnant leur versement "à la signature d'une convention comportant un honoraire de résultat de 5%". 
Cette présentation pour le moins inexacte des choses, développée tout au long de l'article me contraint à diverses mises au point.
Je tiens en premier lieu à préciser que les fonds ont été placés non pas sur mon "compte professionnel" dont j'aurais le libre usage, mais sur des comptes dédiés au sein de la CARPA (Caisse des règlements pécuniaires des Avocats), strictement encadrés et surveillés par l'Ordre des Avocats.
En second lieu, je conteste avec la plus grande fermeté l'existence d'une quelconque "condition" que j'aurais opposée au versement, à mes clients, des indemnités qui leur étaient dues. Sans entrer dans le détail des opérations puisque je suis tenue au secret professionnel, celles-ci ont été presque intégralement versées à ce jour et sont en passe de l'être pour le reliquat. Quant à l'honoraire de résultat me revenant, courant en la matière, il avait fait l'objet de conventions d'honoraires soumises à mes clients bien avant l'arrêt de la Cour d'appel. Je ne saurais donc en aucune manière avoir "conditionné" le versement d'indemnités à la régularisation de conventions d'honoraires qui existaient déjà.
Enfin, puisque l'article mentionne que les plaignants sont au nombre de "vingt-deux", je souhaiterais également souligner que j'ai d'ores et déjà reçu le soutien de l'immense majorité des 846 ex-salariés de la SNCF que j'avais eu la fierté de représenter devant la Cour d'appel de Paris, validant ainsi l'investissement et le combat qui ont été les miens, à leurs côtés, pendant plus de 4 années.