Secret de la confession : les prêtres doivent dénoncer les faits de pédocriminalité "à la justice"

Gérald Darmanin 1:35
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avec AFP , modifié à
Après avoir reçu, en qualité de ministre des Cultes, le président de la Conférence des évêques de France, Gérald Darmanin a affirmé que les prêtres ne devaient pas opposer le secret de la confession aux faits relevant de pédocriminalité. Mgr Eric de Moulins-Beaufort a lui insisté sur la "priorité absolue" de la protection des enfants.

La République et l'Eglise catholique affichent leur réconciliation. Gérald Darmanin a exhorté mardi les prêtres ayant connaissance de faits de pédocriminalité à "porter" ces faits "à la justice" après un entretien avec le président de la Conférence des évêques de France (CEF) qui a assuré la "détermination de tous les évêques" à "faire de la protection des enfants une priorité absolue". 

"La République française respecte tous les cultes (…) respecte toutes les confessions, à partir du moment où elles respectent la République et les lois de la République", a assuré le ministre de l'Intérieur, chargé des relations avec les cultes, devant l'Assemblée nationale, après avoir reçu Mgr de Moulins-Beaufort, à la demande d'Emmanuel Macron.

Au centre de l'entrevue, la formule du président de la CEF assurant que le secret de la confession est "plus fort que les lois de la République", au lendemain de la publication, le 5 octobre, du rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase), estimant à 216.000 le nombre de victimes de pédocriminalité dans l'Église de 1950 à 2020.

Une "formulation maladroite" d'Éric de Moulins-Beaufort 

Revenant sur les propos du prélat, le ministre a affirmé lui avoir "redit comme (il) le dit à chacun des cultes qu'il n'y a ()en effet aucune loi qui est supérieure aux lois de l'Assemblée nationale et du Sénat et qu'il n'y a aucune loi au-dessus de celle de la République".

Gérald Darmanin a rappelé que le secret de la confession était "depuis quasiment 200 ans" dans le droit connu comme un secret professionnel. "Il souffre cependant d'exceptions en ce qui concerne notamment les crimes commis pour des enfants de moins de 15 ans et qu'il est évident qu'il ne peut y avoir aucune sanction contre tout religieux ou toute personne qui a connaissance de faits d'abus sexuels contre des enfants et que ceux-ci doivent le porter pour la protection des enfants à la justice de notre pays", a-t-il ajouté.

Éric de Moulins-Beaufort a, de son côté concédé une "formulation maladroite". Et a demandé "pardon aux personnes victimes et à tous ceux qui ont pu être peinés ou choqués par le fait que le débat suscité (…) ait pris le pas sur l'accueil du contenu du rapport et la prise en considération des personnes victimes", dans une déclaration.

"Relire les pratiques de l'Église à la lumière" d'une réalité crue

Plusieurs associations de victimes ont exprimé leur lassitude voire leur indignation face aux propos de l'épiscopat, estimant qu'il s'agissait d'une polémique qui détournait du sujet principal. L'archevêque de Reims "a tenu à redire la détermination de tous les évêques et, avec eux, de tous les catholiques, à faire de la protection des enfants une priorité absolue, en étroite collaboration avec les autorités françaises", précise un communiqué de la CEF.

"L'ampleur des violences et agressions sexuelles sur mineurs révélées par le rapport de la Ciase impose à l'Église de relire ses pratiques à la lumière de cette réalité. Un travail est donc nécessaire pour concilier la nature de la confession et la nécessité de protéger les enfants", ajoute le prélat.

Le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a rappelé vendredi le cadre juridique dans une note envoyée aux procureurs. Il les y invite à "procéder systématiquement à l'ouverture d'une enquête préliminaire, y compris pour les faits susceptibles d'être prescrits", comme le prévoit la loi contre les violences sexuelles sur les mineurs d'avril 2021.