Chien 1:26
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Delphine Schiltz , modifié à
Des poils de chien ou de chat sur le canapé, rien de pire pour nous agacer. Nos amis les bêtes en perdent parfois des touffes entières. Une entreprise française appelée "Brosseur" a eu l’idée de les récupérer pour les recycler. Dans le BTP, l’automobile ou le textile, l’entreprise est à la phase d’industrialisation de ce concept. 

Faire du poil de nos chers animaux domestiques une matière première multi-usage. L’idée est insolite et elle vient de la gérante de boutiques vétérinaires Olivia Cayre, fondatrice de l’entreprise Brosseur: "Mon compagnon, Harry, un chihuahua à poil long de 12 ans, est un peu à l’origine de cette idée. Parce qu'il perd énormément de poils et que je ne savais plus quoi en faire". Au début du projet, Olivia Cayre collecte elle-même les poils et les travaille "de manière artisanale".  "Dans ma salle de bain, j'ai sommairement appris à carder, filer, feutrer cette matière", raconte-t-elle depuis les locaux de l’entreprise basée à Saint-Maur-Des-Fossés (Val-de-Marne).

"J'ai obtenu des résultats très intéressants. Peu à peu, des gens m’ont rejoint et ont apporté leur expertise au projet", ajoute-t-elle au micro d’Europe 1. Parmi les personnes séduites par ce concept de recyclage, Thomas Alexandre, directeur "technique" de l’entreprise avec laquelle Olivia Cayre a cherché et auto-financé des débouchés prometteurs.

Des applications dans le BTP, l’automobile, la cosmétique

L’entreprise Brosseur fabrique ainsi une sorte de feutrine, un textile non-tissé, isolant, elle peut aussi sortir un fil semblable à de la laine et extraire la kératine du poil. "On souhaite produire la première kératine, issus d'animaux non destinés à l'élevage intensif ou issus d'abattoirs" insistent les deux associés, engagés dans l’écologie et le bien-être animal. Avec cette matière première, des applications sont envisagées dans l’automobile, le BTP, l’aéronautique, la cosmétique, la santé et dans une série d’objets du quotidien : semelles de chaussures, rembourrage de doudoune. 

"Le feutre est utilisé partout, par toutes les industries", souligne la fondatrice de Brosseur. "On nous a même contactés pour faire des tests sur d'autres fibres animales, dont les poils de chevaux par exemple", explique Thomas Alexandre. "C'est vraiment l'imagination qui va nous nous limiter là aujourd'hui. Et puis les moyens", ajoute-t-il.

Une idée qui séduit les propriétaires d’animaux de compagnie

Les poils sont notamment collectés chez des toiletteurs, comme dans le salon Laetitia Renoud Grappin, à Charenton-Le-Pont. Sur place, Tipsy, un lakeland terrier, vient de se refaire une beauté et en même temps, il fait un don de ses poils. Ses maîtresses, Nina et Marie, croisées à la sortie du salon, trouvent l’idée amusante et cohérente : "Je suis ravie que ses poils dont on n'a absolument plus l’utilité servent", souligne Marie. 

"Une fois que c’est lavé, il n'y a pas de raison" ajoute Nina. "C’est vrai que je pourrais mettre de côté les poils qui sortent de la brosse pour isoler la maison de campagne ou faire des chaussettes", plaisante-t-elle. Les poils récoltés sont traités à l’ozone, une solution économe en eau, qui permet de supprimer les matières fongiques ou bactériennes. "À partir du moment où l’on traite, il n'y a plus de problème puisque l'odeur se développe en général à partir d'un trop-plein de bactéries", explique Olivia Cayre.

Une collecte de fonds pour développer le concept

Reste à récolter les fonds pour faire certifier cette solution qui a du chien. "On a fait beaucoup de découvertes sur les propriétés des poils des animaux de compagnie. Mais maintenant, il faut le prouver. Et pour ça, il faut des moyens. C'est pour ça qu'on a lancé une campagne de financement sur Ulule qui a eu un démarrage assez fou. On est très ému et ravi de ce soutien. Chaque euro sera utilisé pour financer des contrats de recherche et le développement du concept" précise Olivia Cayre. L’aboutissement final de Brosseur dans les années à venir ? "Pouvoir travailler en Ile-de-France et avoir une ligne de production, une filature avec une relance des métiers autour du travail de la laine", ajoute Olivia Cayre.