
La société Castel Viandes et trois de ses dirigeants comparaissent ce jeudi devant le tribunal correctionnel de Nantes pour tromperie. Ils sont soupçonnés d'avoir délibérément vendu de la viande avariée entre 2010 et 2013. Un scandale révélé en 2013 par Pierre Hinard, un ancien responsable qualité de l'entreprise, qui affirmait que l'abattoir recyclait des viandes issues d'invendus de supermarchés.
Un contexte déjà tendu en matière de sécurité alimentaire
Les motifs qui conduisent les trois dirigeants de la société Castel Viandes, en Loire-Atlantique, devant le tribunal sont nombreux : tromperie sur la nature, sur les qualités substantielles, sur la composition des marchandises vendues mises sur le marché, de produits d'origine animale préjudiciables à la santé, d'obstacles ou d'entraves à l'exercice des fonctions de contrôle, en ne signalant pas les résultats microbiologiques défavorables.
Autrement dit, les noms juridiques pour désigner une pratique illégale dans le métier, appelée de la "remballe de viande avariée" ou encore de la "transformation d'animaux souillés" en steaks hachés. Ces pratiques, qui datent de 2010 à 2013, sont jugées jeudi et vendredi dans un contexte particulièrement tendu en matière de sécurité alimentaire, avec les scandales Buitoni et Kinder en arrière-plan.
À Nantes, de grandes marques et enseignes, McDonald's, Flunch, Fleury-Michon, sont également présentes, mais cette fois-ci, du côté des parties civiles. Neuf ans après ces révélations, l'entreprise Castel Viandes qui emploie aujourd'hui 300 salariés en CDD, ne s'est jamais arrêtée de fonctionner.
"Il faudrait un statut protecteur pour le lanceur d'alerte"
L'ancien responsable qualité de Castel Viandes, Pierre Hinard, avait été licencié pour avoir dénoncé ces pratiques frauduleuses. Les lanceurs d'alerte, comme lui, sont toujours très peu soutenus par les autorités. Une situation qu'il souhaite différente : "Il faudrait un statut protecteur, comme celui de salarié protégé et avec la mise à disposition, pour le lanceur d'alerte, d'avocats et d'une avance sur les frais engagés pour se défendre", a-t-il expliqué avant de détailler son cas personnel : "Dans mon affaire, j'ai plus de 25.000 € de frais. Quand vous avez perdu votre travail et que vous êtes attaqué de partout, c'est juste impossible."
Fort de son expérience, Pierre Hinard a dévoilé les pressions qu'il a subies et l'inaction de l'État pour y faire face : "À peine l'État français a pris conscience du besoin pour la société de protéger les lanceurs d'alerte que, dans le même temps, tout le réseau d'influence lié à la finance s'est activé pour développer un droit des affaires visant à injustement restreindre les possibilités de l'alerte. La vraie pression, c'est l'omerta et la peur que font régner les puissants pour nuire. Je l'ai vraiment trop subi. C'est un niveau d'une violence extrême."