Qui est Jean-François Ricard, le patron du nouveau parquet antiterroriste ?

Jean-François Ricard sera officiellement installé dans ses nouvelles fonctions mercredi. © AFP
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avec AFP

Connu notamment pour avoir été chargé de l'enquête sur l'attentat de Saint-Michel, en 1995, le sexagénaire devient mercredi le nouveau visage de l'antiterrorisme en France. 

À partir de mercredi, il pilotera officiellement 26 magistrats, au sein d'une structure inédite dans l'histoire judiciaire française : Jean-François Ricard, surnommé "JFR", 62 ans, prend la tête du tout nouveau parquet national antiterroriste (PNAT). C'est désormais son visage qu'il faudra associer à la communication qui entoure les attaques et projets d'attaques sur le sol français, assurée par François Molins pour les attentats commis depuis 2015. Plus discret, le nouveau procureur antiterroriste a la réputation d'un magistrat très rigoureux. 

Chargé des "tout premiers dossiers islamistes"

"On m'a proposé en 1994 de rejoindre la section antiterroriste. Cela me paraissait être un challenge intéressant", raconte à l'AFP le magistrat, qui avait démarré sa carrière douze ans plus tôt comme juge d'instruction à Arras avant d'être nommé à Bobigny. "Je suis arrivé à une période déterminante: c'était les tout premiers dossiers islamistes et personne ne connaissait vraiment la question. (...) On n'avait pas alors idée de l'ampleur (du phénomène, ndlr)".

Il est resté douze ans à la galerie Saint-Eloi, cette aile du palais de justice où œuvraient les juges d'instruction du pôle antiterroriste. Jean-François Ricard fait alors équipe avec Jean-Louis Bruguière, le patron de la section. Il se plonge dans l'islam radical. "Si on ne comprend pas un peu l'arabe et si on n'a pas lu le Coran, on ne comprend rien", lance le magistrat.

"C'était un travailleur acharné, très perfectionniste", se souvient Jean-Louis Bruguière. "C'était la cheville ouvrière de Bruguière. Sur la partie terrorisme islamiste, il était "très pointu", raconte un journaliste habitué de la galerie Saint-Eloi dans les années 2000. "Il avait un côté bon élève."

Gang de Roubaix, assassins de Massoud et filières tchétchènes

Le tournant de sa carrière intervient à l'aube de ses 40 ans : en 1995, Jean-François Ricard, de permanence, est chargé de l'enquête sur l'attentat de Saint-Michel à Paris. L'attaque, revendiquée par le groupe islamique armé (GIA), a tué huit personnes. "C'était différent (des dossiers précédents, ndlr): un attentat avait été commis. Il fallait mettre fin à cette campagne" d'attaques, raconte-t-il. 

En décembre 1996, c'est la station Port-Royal qui est visée. Ce dossier est encore "une frustration" pour le magistrat: "C'est un attentat ni revendiqué, ni expliqué". Parmi les autres dossiers qu'il a ensuite traités: l'affaire du "gang de Roubaix", le projet d'attentat à la cathédrale de Strasbourg, le soutien aux assassins de Massoud, les filières tchétchènes ou irakiennes.

Faire face au djihadisme "nouvelle génération"

En 2006, Jean-François Ricard est détaché auprès du ministère de la Défense. Puis en 2009, il devient avocat général à la cour d'appel de Paris et requiert en 2013 au procès du terroriste Carlos. Depuis 2015, il était conseiller à la Cour de cassation. Dans la profession, "JFR" a la réputation d'être aussi perfectionniste que discret. Et de fait, sur sa vie privée, ce fils de préfet à l'allure athlétique ne dit quasiment rien, confie seulement être passionné d'art moderne. C'est aussi un amateur d'escalade... tout comme François Molins.

Le magistrat réfute aujourd'hui avoir été "le promoteur" du parquet national antiterroriste mais explique "avoir fait partie de ceux qui ont réfléchi" à de nouvelles options face à "l'explosion de la menace". Ce n'était pas, assure-t-il, contre François Molins, pour lequel il dit avoir "un énorme respect" et dont il salue l'action face à la vague djihadiste. "Comment a-t-il fait?", interroge-t-il, visiblement admiratif. Et conscient du défi qui l'attend : se plonger, treize ans après avoir quitté la galerie Saint-Eloi, dans un djihadisme "nouvelle génération". "Il y avait déjà la matrice de ce qu'on voit aujourd'hui il y a 25 ans", assure-t-il.