Patrick Henry, en 2002.
  • Copié
Guillaume Perrodeau , modifié à
Chez Christophe Hondelatte, la journaliste revient sur l'histoire d'amitié singulière entre Martine Veys et le meurtrier Patrick Henry.

Pendant 25 ans, Martine Veys a entretenu une amitié profonde avec l'un des détenus les plus célèbres de France : Patrick Henry. La journaliste Plana Radenovic a écrit un livre sur cette histoire, Martine Veys et Patrick Henry, l’amitié malgré tout, qu'elle évoque chez Christophe Hondelatte jeudi.

"Certains ont dû mal à la comprendre". L’envie de visiter des prisonniers travaille Martine Veys depuis très longtemps. Le déclic a lieu à 42 ans, alors que ses fils ont quitté le domicile familial. Elle écrit à la prison de Caen pour obtenir les autorisations adéquates. Elle se lance alors dans un parcours du combattant qui va durer plus d'un an, entre l'enquête des renseignements généraux, un entretien avec deux policiers du commissariat de Caen et un autre avec un juge d'application des peines, avant de recevoir finalement l'accord.

Pierre, 39 ans, un braqueur, est le premier prisonnier qu'elle voit. Suivront Abderrahmane, Joël, Jean-Emmanuel ou encore Thierry. Parmi eux, des violeurs et des pédophiles. "Tout son entourage, ses enfants et ses petits-enfants notamment, ont dû mal à la comprendre", fait savoir Plana Radenovic. "Selon moi, c’est la volonté de montrer que les gens en prison font partie de notre monde", précise la journaliste.

Une conseillère. Finalement, un jour, c'est Patrick Henry, le meurtrier du petit Philippe Bertrand, sept ans, que Martine Veys rencontre. Leur première entrevue se passe très mal. L'assassin lui dit qu'Hitler n'a pas écrit que des choses mauvaises. Elle explose et est sur le point de tout abandonner. Cette agente commerciale ne le sait pas encore, elle vient de rencontrer une personne avec qui elle va nouer une amitié de 25 ans.

Le temps passe, les années aussi, les entrevues entre Patrick Henry et Martine Veys se multiplient et les liens entre les deux s'intensifient. Un jour, elle apprend que le prisonnier a posé sa sixième demande de liberté conditionnelle. Refusée. À partir de ce moment-là, elle va tout faire pour que Patrick Henry sorte de prison. C'est elle, qui va lui trouver un nouvel avocat. Un travail qui paie. Après 24 années de prison, Patrick Henry finit par obtenir sa conditionnelle.

Mais dehors, la personnalité de Patrick Henry va le rattraper. Un an et demi après sa libération conditionnelle, il est arrêté à la frontière espagnole avec dix kilos de cannabis. Martine Veys est effondrée, elle ne comprend pas. Sa liberté conditionnelle est révoquée.

"En chaque personne il y a une part d’humanité". En prison, elle vient le voir tous les dimanches après-midi, au moins quatre heures, désormais au parloir. Elle n'est plus une simple visiteuse d'association, elle est son amie, sa confidente. "J’aimerais que les gens qui jugent cette histoire scandaleuse se rendent compte qu’en chaque personne il y a une part d’humanité, même en Patrick Henry. Et Martine Veys a su déceler cette part-là", indique Plana Radenovic.

Patrick Henry fera d'autres demandes de liberté conditionnelle, elles seront toutes rejetées. En 2017, on lui diagnostique un cancer du poumon à un stade très avancé. Compte tenu de son état de santé, il est libéré. Patrick Henry meurt quelques semaines plus tard, à l'hôpital de Lille. Martine Veys était présente dans les derniers jours, elle est la première personne à être prévenue. "C'est à la fin de l'histoire que leur amitié n'a plus aucune barrière", confie Plana Radenovic. Une amitié de 25 ans.