Pédophilie dans l'Eglise : "Nous travaillons main dans la main avec la justice", assure l'archevêque de Paris

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Romain David , modifié à
Invité dimanche du Grand Rendez-Vous sur Europe 1, Monseigneur Michel Aupetit estime que le droit canon est impuissant à gérer les situations d'accusations de pédophilie, d'où la nécessité pour l'Eglise de s'en remettre directement à la justice civile.
INTERVIEW

L’Eglise, un peu partout dans le monde, est secouée par des affaires d’abus sexuels. En fin de semaine, lors de ses vœux à la Curie romaine, le pape François a affirmé que "l'Eglise ne détournera plus jamais le regard" face aux "abominations" de membres du clergé "ayant commis des abus sexuels". Le souverain pontife a demandé à tous ceux qui "abusent des mineurs", y compris les ecclésiastiques, de se livrer eux-mêmes à la justice civile.

"Sur le diocèse de Paris, nous travaillons main dans la main avec la justice", assure de son côté Michel Aupetit, archevêque de Paris, invité dimanche du Grand Rendez-Vous d'Europe 1/CNews/Les Echos.

Au moins huit cas de pédophilie. "Pour être clair, à Paris, aujourd'hui, il y a 18 cas, 18 dossiers sur presque 600 prêtres. Sur ces 18 dossiers, huit concernent des mineurs et deux concernent des mineurs pré-pubères, soit de la pédophilie au sens strict", détaille ce membre du clergé. "Tous ont fait l'objet d'une enquête", assure-t-il, précisant que les faits les plus anciens remontent aux années 1950.

"Nous avons commis des erreurs". Pour monseigneur Aupetit, l'Eglise n'est pas suffisamment armée pour gérer ces dossiers. "Nous ne sommes pas des professionnels […]. On est capable d'accompagner dans l'écoute mais le problème, c'est que cette écoute s'accompagne de miséricorde : nous croyons que tout homme peut se racheter", pointe-t-il.

"C'est là-dessus, peut-être, que nous avons commis une erreur. Nous croyons toujours que tout homme peut se racheter devant Dieu, mais il faut quand même protéger les personnes. Et c'est avec cette inadaptation entre la protection des personnes et le rachat que nous avons commis des erreurs, parce que le droit canon ne s'adapte pas du tout à ces questions-là. Ce sont des questions de liturgie, de fonctionnement de l'Eglise", explique-t-il.

Le travail de la justice. "C'est pour cela que nous devons absolument faire confiance à la justice française", poursuit l'archevêque. "Nous avons mise en place, sur l'ensemble de la Conférence des évêques de France, un certain nombre de structures et un protocole dès qu'il y a un signalement", rappelle-t-il. Il assure en outre que chaque cas est remonté aux autorités. "On fait un saignement, et c'est à la justice de considérer quelle est l'atteinte pénale", conclut Monseigneur Aupetit. "J'ai pu voir combien ils étaient sérieux dans l'enquête, délicats aussi bien avec la victime que l'accusé, parce qu'il peut y avoir des accusations injustes", souligne encore cet ecclésiastique.

Par ailleurs, Michel Aupetit a demandé avec les autres évêques de France la mise en place d'une commission indépendante, pilotée par Jean-Marc Sauvé, ancien vice-président du Conseil d’Etat, précisément pour faire la lumière sur les abus sexuels sur mineurs. "Nous devons être exemplaire sur ce sujet-là, parce que le message que nous avons à porter est un message d'amour et de fraternité, or notre message est pollué par ce qui arrive", conclut-il.