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Caroline Baudry envoyée spéciale d'Europe 1 en Nouvelle-Calédonie, édité par Clément Perruche , modifié à
Les Néo-Calédoniens sont appelés aux urnes dimanche 12 décembre pour statuer sur l'autodétermination de l'archipel. Les indépendantistes kanaks veulent repousser le référendum en raison de la crise sanitaire. Certaines familles, endeuillées par le Covid-19, souhaitent elles aussi un report du scrutin. Reportage de Caroline Baudry, envoyée spéciale d'Europe 1 en Nouvelle-Calédonie.

Le Conseil d’Etat tranchera ce mardi. Il a été saisi en urgence par 146 électeurs et trois associations qui appellent au report du troisième et dernier référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, prévu dimanche 12 décembre. Dans l’archipel, la date du 12 décembre fait débat. Les indépendantistes, à majorité kanak, estiment que la crise sanitaire fausse la donne et empêche une campagne équitable. Le Covid-19, entré brusquement sur l’archipel français début septembre, a fait 279 victimes, la plupart membres de ce peuple kanak, habitants historiques du territoire, bien avant la colonisation française.

Un deuil impossible

Entre les plantes médicinales kanaks et les fleurs tropicales, il faut se frayer un chemin pour traverser le jardin luxuriant d’Yvette et Damien Yeiwene. A cause des restrictions sanitaires, ils n’ont pas pu quitter la maison familiale pour assister, sur une autre île, aux funérailles traditionnelles de leur belle-sœur emportée par le Covid-19 il y a deux mois.

"Quand il y a un deuil, chez les kanaks, on reste ensemble toute une semaine. Le deuil dure un an. Puis on se revoit un an après. Chez les Européens, je n’ai jamais vu ça", explique Yvette, très émue de la brusque disparition de sa belle-sœur.

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© Caroline Baudry

Impossible de faire campagne dans le cadre du référendum

Son mari ajoute qu’il y a en général entre 150 et 200 personnes lors des cérémonies de deuil. Les différents clans se retrouvent, après avoir parcouru parfois des centaines de kilomètres. "Mais là, Tout était bloqué, il n’y avait pas d’avion, pas de bateau en plus du couvre-feu", explique-t-il.

Tous deux se disent traumatisés de ne pas avoir pu respecter les rites millénaires. Dans ces conditions, impossible de faire campagne selon eux. Ils espéraient que l’Etat repousse la date du troisième référendum. "Faire campagne, faire de la propagande alors que je n’ai pas été présent pour le deuil de ma belle-sœur me paraît difficile", confie Damien.

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© Caroline Baudry

Ce n’est que depuis le 16 novembre qu’il a pu se rendre sur la tombe de la défunte. Avant cette date, tous les cimetières de Nouméa étaient fermés au public. "On est un peu déçus de l’attitude de l’Etat. Pour eux, ce n’est rien, mais pour nous… Il vaut mieux qu’on attende un peu. On verra après, en 2022, quand faire ce référendum, mais pas tout de suite", souffle-t-il.

Les Yeiwene sont en accord avec l’appel à la non-participation des dirigeants indépendantistes. Dimanche, ils n’iront pas voter. Ils resteront en famille, dans leur maison en bois foncé.