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Grégoire Duhourcau , modifié à
Victime de harcèlement scolaire, Louise s'est "complètement éteinte" et a vécu sa timidité comme un véritable handicap. Comme elle le raconte à Olivier Delacroix sur Europe 1, elle a surmonté cela grâce à une association d'éloquence, dont elle est aujourd'hui la présidente.
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Louise, 24 ans, souffrait de timidité maladive dès l'école. Elle raconte notamment avoir été victime de harcèlement scolaire, ce qui a empiré sa situation. Elle explique que sa timidité était particulièrement handicapante au quotidien mais elle a réussi à la surmonter pour devenir aujourd'hui présidente d'une association d'éloquence. Dans l'émission d'Olivier Delacroix sur Europe 1, elle a détaillé le cheminement qui l'avait menée à devenir celle qu'elle est désormais.

"Quand j'étais petite, mes parents m'ont dit que je n'étais pas forcément très timide mais à partir de l'entrée à l'école, la prise de parole était très compliquée, que ce soit en cours où à l'extérieur, dans les commerces, partout. Cela a été vraiment handicapant pour moi.

Avec beaucoup de recul et de thérapie, j'ai compris que j'avais peur du regard des autres et du jugement. Il se trouve que j'ai subi un petit peu de harcèlement scolaire et des moqueries de mes camarades. Je pense que c'est vraiment imprimé en moi donc j'avais toujours peur de dire une bêtise et que l'on se moque de moi, que l'on me juge. Je me suis complètement éteinte. Au collège, cela a été vraiment difficile et j'ai totalement perdu confiance en moi. Les actions les plus banales du quotidien étaient vraiment des montagnes pour moi.

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"Je trouvais une solution pour éviter la conversation et pour m'enfuir"

Je trouvais toujours des excuses pour ne pas aller aux soirées ou pour partir plus tôt. Dès qu'il fallait que je parle avec les gens, même s'ils étaient bienveillants et venaient à moi, c'était des montées d'angoisses, montées de chaleur. Je trouvais une solution pour éviter la conversation et pour m'enfuir.

C'était un handicap au quotidien, même en famille. Par exemple, quand on allait au restaurant, je ne pouvais pas demander où étaient les toilettes toute seule donc je devais demander à mes parents. Pour aller m'acheter des vêtements, des chaussures, je n'osais pas demander les tailles. Ça crée une frustration parce que l'on n'est plus capable de rien faire seul.

C'est instinctif, on ne sait même plus pourquoi on a peur. Aujourd'hui encore, même si ça va mieux, j'ai toujours peur d'aller parler au vendeur, d'aller demander ma taille. J'ai toujours une petite appréhension même s'ils ne vont pas nous juger. C'est devenu un instinct.

"Quand je devais parler devant une assemblée, je paniquais des jours avant"

Parler devant une assemblée, jusqu'à très récemment, c'était vraiment l'angoisse. J'avais surtout des exposés ou des conférences à faire et je ne paniquais des jours avant, j'avais des bouffées de chaleur, le thorax qui se contractait, je trouvais parfois des excuses pour ne pas y aller. Au moment de le faire, c'était vraiment une épreuve, je devenais toute rouge, je bégayais, c'était une catastrophe.

Au collège, j'étais très seule. J'avais quelques amis d'enfance mais je me suis retrouvée très seule. A partir du lycée et à la fac, c'était plus une timidité publique, donc avec des gens que je ne connaissais pas forcément, ou quand il y avait un groupe, à savoir ma classe. J'ai quand même réussi à me faire des amis et je n'étais pas seule. Justement, je pense que c'est aussi ça qui m'a donné de la force et qui m'a aidé à sortir de cette timidité. Ma famille ne comprenait pas pourquoi j'étais aussi timide, c'est dur d'aider quelqu'un de timide.

En arrivant en Master à l'université Paris 8, j'ai vu le film A voix haute : la force de la parole. Il suit le travail d'une association qui s'appelle 'Eloquentia', qui organise une formation et un concours d'éloquence en Seine-Saint-Denis et au sein de l'université. Il y a 30 étudiants qui ont la chance de pouvoir suivre une formation à l'éloquence pendant six semaines. Ils reçoivent des conseils, ils s'entraînent pour le concours, mais aussi pour la prise de parole en public tout simplement. Ce n'est pas un concours d'éloquence ou une formation d'éloquence, c'est vraiment la prise de parole et la prise de confiance en soi.

Un film qui a tout changé

Ça a déclenché de l'espoir en moi. J'avais 22 ans, j'étais en Master, j'étais toujours timide, je n'avais pas d'ambition dans la vie, j'étais en dépression. Je me suis dit : 'Il faut quand même sortir du gouffre à un moment. C'est maintenant ou jamais.' Mes parents me parlent de ce film et je le regarde. C'est tellement positif, tellement d'espoir. Ce sont des jeunes qui prennent la parole, qui disent ce qu'ils ont envie de dire. Ça m'a touchée et je me suis dit : 'C'est tellement à l'opposé de toi qu'il faut que tu t'inscrives pour essayer de faire la formation.'

La première séance était très intense. On se retrouve en groupe de 15 personnes, avec qui on doit vraiment se mettre à nu. Le premier exercice, il fallait se regarder dans les yeux avec une personne qu'on ne connaissait pas. Un exercice impossible pour moi de base, sauf que je me suis retrouvée avec des gens bienveillants, des gens comme moi, timides ou non, mais qui étaient là pour apprendre. C'était dur au début mais après on lâche vite prise et on grandit avec les autres.

Par rapport au collège où je subissais ce harcèlement quotidien des gens, là, les gens m'encourageaient, ils ne jugeaient pas. On est content de la réussite de l'autre et on veut que l'autre avance. C'est vraiment la clé : la bienveillance et avancer en groupe.

"J'ai envie de donner ce que l'on m'a donné"

Aujourd'hui, je suis devenue présidente de cette association, c'était impensable. J'ai retrouvé des amis d'enfance du collège et ils me disent : 'C'est incroyable ! Jamais on aurait pensé que tu sois devenue présidente d'une association d'éloquence.' J'ai envie de donner ce que l'on m'a donné. Mon premier conseil, ce serait de se laisser vivre, de prendre confiance en soi. J'ai l'impression que la timidité c'est que l'on n'ose pas exister, on a peur que les gens nous jugent alors qu'en fait, on est déjà super. On s'en fiche des gens. Pour la prise de parole en public, la clé c'est vraiment de s'entraîner. S'entraîner seul, s'entraîner devant des gens que l'on connaît et à qui on fait confiance, s'entraîner devant des inconnus. Il faut répéter, répéter, répéter et ça donne confiance en soi de l'avoir déjà fait."

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