Les lionceaux de compagnie, une mode aussi stupide que dangereuse

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Salomé Legrand, édité par Romain David , modifié à
Les saisies de grands félins se sont multipliées ces derniers mois, notamment en Île-de-France, alors que de plus en plus de jeunes de banlieue adoptent ces animaux sauvages pour ensuite les exposer sur les réseaux sociaux. 

Un effet de mode qui peut avoir des conséquences désastreuses. En octobre, un lionceau de trois semaines était découvert par les douanes dans un garage automobile de Marseille. Depuis, un autre félidé de un mois à peine a été retrouvé sur un lit superposé dans un appartement de Valenton, dans le Val-de-Marne, et un autre encore dans une Lamborghini de location lors d'un contrôle de police fin novembre sur les Champs-Élysées. Leurs propriétaires font des selfies, des clips de rap, posent avec dans des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux. C’est d’ailleurs souvent par-là que les autorités repèrent ces jeunes détenteurs de bébés tigres ou de lionceaux, de plus en plus nombreux.

Un faire-valoir sur les réseaux sociaux. "On est clairement en face d'un phénomène de mode qui remonte à quatre ou cinq ans, qui vient des Emirats, et qui est assez perceptible en Île-de-France", relève auprès d'Europe 1 Jean-Noël Rieffel, délégué à l’Office national de chasse et de la faune sauvage pour les régions Île-de-France et Centre Val-de-Loire, et dont le service est cosaisi dans ce type d'enquêtes. Il a enregistré une dizaine de signalements depuis ces six derniers mois, contre huit saisies en deux ans. "Ce sont souvent des gens plutôt jeunes, qui savent utiliser les réseaux sociaux pour y pavaner. Ils ont peu d'intérêt pour la cause animale et sont plutôt soucieux du prestige qu'ils peuvent obtenir en détenant des animaux de ce type, potentiellement dangereux, et mythique : le roi de la savane. Ils n'ont pas conscience des risques, à la fois sanitaire et sécuritaire, mais aussi en termes de bien-être animal."

Les lionceaux de compagnie, une mode aussi stupide que dangereuse

Un risque sanitaire. Certains vont jusqu'à louer ces animaux pour des soirées privées, contre plusieurs milliers d'euros. "On ne voit que la partie émergée de l'iceberg. Le trafic des espèces sauvages est le troisième trafic au niveau mondial", pointe Jean-Noël Rieffel. "On est souvent en présence d'animaux dont on ne connait pas le statut sanitaire et l'origine. Il faut savoir qu'ils sont vecteurs de 60% des maladies infectieuses humaines."

Des conditions de vie inadaptées. "Les animaux que l'on a recueilli dans Paris, notamment sur les Champs-Elysées, sont souvent des animaux mal nourris et déshydratés. Un lionceau ne se nourrit pas comme un chat. Il y a un certain nombre de choses à respecter en terme de sevrage et d'alimentation carnée, sinon ça peut engendrer des carences alimentaires et donc des pathologies cutanées, locomotrices, voire neurologiques", alerte encore Jean-Noël Rieffel. Ces espèces sont généralement détenues dans des appartements exigus, voire dans des cages ou encore tenues en laisse. Autant de conditions de vie totalement inadaptées pour ces animaux qui ont besoin de grands espaces.

>> De 5h à 7h, c’est “Debout les copains” avec Matthieu Noël sur Europe 1. Retrouvez le replay de l'émission ici

Jusqu'à deux ans de prison. Les derniers lionceaux saisis étaient déshydratés, mal en point. Quant à leur provenance, une enquête est en cours, notamment pour savoir s’ils sont de la même portée. Cela pourrait signifier qu'ils sont issus d'un élevage clandestin, ou d'un cirque itinérant peu scrupuleux. La détention de tels animaux, sans autorisation, est punie de deux ans de prison et 150.000 euros d'amende. "Une fois que ces animaux sont saisis, on a beaucoup de mal à les replacer dans des parcs zoologiques, car ils sont imprégnés", avertit Jean-Noël Rieffel. "Une fois relâchés, ils ne sont pas forcément capables de s'adapter à leur nouvel environnement." Pour l'instant, le lionceau trouvé sur les Champs-Elysées et celui de Valenton ont été recueillis par le parc zoologique de Saint-Martin-la-Plaine.