Le vrai-faux des idées reçues sur la pollution au diesel

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Laure Dautriche, édité par Romain David , modifié à

À la veille de la mobilisation des "gilets jaunes" contre la fiscalité écologique sur les carburants, Europe 1 se penche sur la pollution liée aux voitures qui roulent au diesel.

Les taxes sur les carburants mobilisent les automobilistes français. Samedi, le mouvement des "gilets jaunes" organise une série de blocages dans toute la France pour protester contre la hausse des prix à la pompe. De son côté, l'exécutif justifie sa politique fiscale par le financement de la transition énergétique. "Dès le début du quinquennat, on a annoncé ce choix, qui est d'avoir une fiscalité écologique", avait voulu rappeler à la rentrée la ministre des Transports, Elisabeth Borne, au micro d'Audrey Crespo-Mara sur Europe 1. "On baisse les impôts sur le travail et on augmente les impôts sur ce qui pollue", avait-elle ajouté.

Et dans la ligne de mire de l'exécutif : le diesel, régulièrement pointé du doigt. Mais dans quelle proportion ce carburant est-il un fléau, quand on sait qu’il représente encore 63% du parc automobile français, soit 19 millions de véhicules ? Europe 1 décortique quatre idées reçues sur le diesel.

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"Les véhicules qui roulent au diesel sont plus polluants que les véhicules qui roulent à l'essence"

VRAI, mais... Le diesel contient trois grands types de polluants : les gaz à effet de serre, qui sont responsables du réchauffement climatique, les particules fines, très nocives pour la santé, mais aussi des oxydes d'azote (NOx), qui étaient notamment l'origine du scandale du "Dieselgate".

Le diesel émet moins de gaz à effet de serre que l'essence, et peu de particules fines depuis qu'en 2011 des filtres à particules ont été installés sur tous les diesel neufs. Aujourd'hui, un tiers des diesels roulent toutefois encore sans filtres.

Mais surtout, le diesel émet davantage de gaz NOx que l'essence, raison pour laquelle il est généralement considéré comme plus polluant. "C'est une question technologique. Le mode de combustion du diesel fait que l'on est en excès d'air ce qui, intrinsèquement, fait que cette motorisation émet plus d'oxyde d'azote que les motorisations à essence. C'est un point sur lequel le diesel est plus en retard que l'essence", explique à Europe 1 Laurent Gagnepain, ingénieur à l'Agence de l'environnement et de l'énergie. Malgré tout, les progrès réalisés sur le diesel incitent aussi les constructeurs de véhicules essence à faire de même. "Les constructeurs de véhicules essence sont en train d'équiper les pots d'échappement de leurs voitures de filtres à particules fines. Ça prouve que les filtres mis sur le diesel sont efficaces", relève Fabrice Godefroy, président de l'association Diéséliste de France.

"La pollution émise dépend de notre façon de conduire"

VRAI.Un conducteur qui roule moins vite et qui anticipe les freinages consomme moins de carburant et par conséquent émet moins de pollution. Raison pour laquelle circuler en ville ou sur une autoroute n'a rien à voir non plus en termes de pollution.

De plus, 40% des trajets que l'on fait en voiture font moins de deux kilomètres. Or, ce sont justement ces deux premiers kilomètres qui sont les plus polluants, lorsque le moteur est encore froid.

"Il faut compter plusieurs années d'exposition au diesel avant de constater un impact sur la santé."

FAUX. Les conséquences du diesel sur la santé peuvent se faire sentir au bout d'une heure seulement. Si vous êtes à pied ou à vélo, au milieu d'un embouteillage, derrière un pot d'échappement qui dégage beaucoup de ces fameux gaz NOx, le corps peut réagir quasi-immédiatement. "On voit des modifications inflammatoires et un impact sur les artères au bout d'une heure d'exposition", relève Thomas Bourdrel, radiologue et président de l'association "Strasbourg respire". Cela se traduit par une augmentation du risque d'infarctus ou d'AVC. "L'impact sur le système respiratoire va également très vite. Si vous êtes asthmatique, vous pouvez faire une crise dans les minutes qui suivent une exposition à des gaz d'échappement."

Bien sûr, il y a aussi des risques à plus long terme, notamment des infections coronariennes chez les seniors et des leucémies chez les enfants.

"L'interdiction du diesel n'a qu'un impact limité sur la pollution urbaine."

FAUX. Avec ses neuf millions d'habitants, la ville de Tokyo au Japon a tout pour être une mégalopole ultra-polluée. Sauf que le diesel est interdit en ville depuis quinze ans. Or, entre octobre 2009 et septembre 2012, le nombre de morts de maladie respiratoire a baissé de 22%, et de 11% pour les infarctus et les AVC, par rapport aux chiffres enregistrés entre 2000 et 2003, selon un relevé des chercheurs de l'université d'Okayama.

En l'Allemagne, le diesel va disparaître de plusieurs grandes villes à partir d'avril 2019 : Berlin, Cologne, Bonn et Stuttgart. Elles rejoindront Francfort et Hambourg, où cette interdiction a déjà été mise en place. En France, seule Paris a pris cet engagement, mais pas avant 2024.