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Charles Guyard // Crédit photo : CATHERINE GUGELMANN / AFP
En 1977, Robert Badinter lui a sauvé la tête. Quatre décennies plus tard, Hugo Lévy l'a sorti de prison. Lui ? C'est Patrick Henry, décédé en 2017. Son dernier avocat se souvient de cette histoire.

"La nation a perdu un immense avocat, un sage, une conscience", a dit le président de la République hier, en marge d'un déplacement à Bordeaux consacré à la justice et la police. Un hommage national sera rendu à Robert Badinter, a précisé aussi Emmanuel Macron qui devrait en dire plus à cette occasion sur une probable entrée de l'homme politique au Panthéon.

Robert Badinter, c'est la dépénalisation de l'homosexualité, c'est aussi bien sûr l'artisan de l'abolition de la peine de mort en France. En 1977, Robert Badinter, à travers une plaidoirie mémorable, sauve de la guillotine Patrick Henry, accusé d'avoir enlevé et tué une enfant de sept ans. Quatre décennies plus tard, Hugo Lévy, dernier avocat de Patrick Henry, se souvient.

"C'est un poids de l'histoire qui lui a joué des tours"

"C'est un dossier symbolique d'une partie de l'histoire de la justice française." Les symboles sont parfois lourds à porter et Hugo Lévy en a été le témoin direct, lorsqu'au milieu des années 2010, cet avocat a dû batailler ferme pour que son client, atteint d'une maladie incurable, obtienne le droit de finir dignement sa vie loin de la prison. Mais le client en question, c'était Patrick Henry, à qui Robert Badinter avait sauvé la tête quatre décennies plus tôt. Une chance pour le jeune homme qui s'est peu à peu transformé en fardeau, comme si la justice était rancunière.

"C'est un poids de l'histoire qui lui a joué des tours parce qu'on n'oubliait pas son profil, donc cela a pu peser. Je me souviens d'une décision en 2016 d'un juge d'application des peines qui prononcer la libération conditionnelle. Et cette décision avait été affirmée par une cour d'appel qu'il revenait à des faits très anciens", explique l'avocat.

Un poids associé donc à Robert Badinter qui, après avoir évité l'échafaud à Patrick Henry, a œuvré toute sa vie pour améliorer le sort des détenus. "C'est quand même quelqu'un qui s'est battu pour plus d'humanité. Même si quelqu'un est condamné, l'État doit lui assurer des conditions dignes", raconte Hugo Lévy. Libéré en septembre 2017, Patrick Henry est finalement décédé moins de trois mois plus tard des suites d'un cancer, après avoir passé plus de la moitié de sa vie derrière les barreaux.