Alice Desbiolles, médecin épidémiologiste et spécialisée en santé publique, est l'invité d'Europe 1 ce mercredi. 8:03
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La très contestée réforme des retraites pose plusieurs questions autour de l'âge idéal du départ à la retraite et de la pénibilité au travail. Invité au micro d'Europe 1, Alice Desbiolles, médecin épidémiologiste et spécialisée en santé publique, revient sur les nombreuses inégalités de santé que peut provoquer le travail. 

À la veille d'une mobilisation massive contre la réforme des retraites, Alice Desbiolles, médecin épidémiologiste et spécialisée en santé publique, analyse les écarts majeurs dans les conditions de travail et les impacts qu'ils peuvent avoir pour la santé des travailleurs. Elle estime ainsi qu'uniformisé et reculé l'âge de départ à la retraite à 64 ans, comme le souhaite la réforme, est "profondément injuste". 

Sans oublier la question des modes de vie - consommation de tabac, d'alcool etc - la médecin insiste sur l'importance du travail exercé durant toute sa vie afin de jauger l'espérance de vie en bonne santé. "Il faut insister sur l'écart entre les plus modestes et les plus aisés. Il est de treize ans pour les hommes, donc entre les plus modestes et les plus aisés, et de huit ans chez les femmes. On voit bien qu'il existe une inégalité de statut social en ce qui concerne la vie elle-même", détaille-t-elle.

 

"Cela doit nous interroger en matière de contrat social et de justice sociale entre les différentes catégories", poursuit-elle.

"C'est vraiment une forme d'injustice"

La spécialiste en santé publique estime qu'il est difficile d'estimer un âge parfait pour partir à la retraite. Elle évoque ainsi la question de la pénibilité : "elle n'est pas la même pour tout le monde et cela conditionne forcément un âge différent pour partir à la retraite".

Outre la pénibilité, l'épidémiologiste mentionne les aspirations d'individus : "On a besoin de personnes en bonne santé qui ont du temps libre à offrir d'une certaine manière à la collectivité. Les personnes à la retraite participent énormément aux activités de bénévolat dans les associations. C'est un tiers des bénévoles. Elles participent beaucoup aussi à la garde des enfants. Elles font visiblement autant d'heures de garde d'enfants que les assistantes maternelles. Elles participent aussi du bon équilibre de notre société. On a besoin aussi de personnes en bonne santé et avec du temps libre", analyse-t-elle.

 

Cette multiplicité de critères n'est pas prise en compte dans la réforme selon la spécialiste : "Ces politiques publiques sont présentées au nom de notre bien, au nom de la santé et de l'intérêt général. Mais à aucun moment cet intérêt général n'est clairement défini, débattu, décidé de manière collective et démocratique. En ce sens, c'est vraiment une forme d'injustice".