La nouvelle PAC va supprimer les aides au maintien destinées aux exploitants déjà convertis à l'agriculture bio. 3:08
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, édité par Yanis Darras , modifié à
Face à l'appétit des Français pour les produits bio, le gouvernement souhaite doubler la surface agricole dédiée à ces derniers. Une ambition partagée avec l'Union européenne qui augmente de 30% l'enveloppe pour aider les exploitants à se convertir. Mais dans le même temps, l'UE compte supprimer les aides au maintien pour les agriculteurs déjà convertis.

Les Français veulent manger mieux. Preuve en est, la consommation de fruits et légumes bio a augmenté de 5% en 2020. Une tendance qui s'observe depuis plusieurs années et qui s'accélère depuis la crise du Covid-19. Face à l'engouement, le ministère de l'Agriculture souhaite agir rapidement et rendre la France autosuffisante, pour éviter de laisser ce marché en plein boum aux voisins européens. Pour y arriver, l'Etat envisage de doubler la surface de produits bio d'ici 2027.

Les aides au maintien supprimées

A l'image des Français, les Européens sont de plus en plus intéressés par l'agriculture bio. Alors pour satisfaire la demande, la nouvelle Politique Agricole Commune de l'Union européenne, la PAC, fixée pour la période de 2023 à 2027, augmente de 30% l'enveloppe consacrée aux conversations des exploitations vers le bio. 

Si cette dynamique semble intéressante pour les agriculteurs souhaitant franchir le pas du bio, pour ceux qui ont déjà converti leur exploitation au label biologique, cette nouvelle PAC déçoit. L'UE prévoit en effet de supprimer les aides au maintien destinées à ces derniers. Jusqu'à présent, ces aides étaient versées pendant cinq ans à chaque agriculteur ayant réalisé sa conversion. 

Déjà des déconversions 

"C'est fini l'innovation. Je ne ferai plus de recherche comme je fais aujourd'hui sur l'agriculture et la conservation biologique", regrette Thomas Lafouasse, céréalier et maraîcher déjà converti dans l'Essonne. Pour l'agriculteur, cette suppression des aides au maintien représente une perte de 50.000 euros. "Je vais surement embaucher un peu moins, renouveler mon matériel beaucoup moins. Je vais faire le dos rond en fait. Je vais juste faire le minimum pour survivre", explique-t-il. 

Pour ce céréalier, "il y aura beaucoup de déconversions". Une théorie qui se confirme déjà au sein de la Fédération Nationale d'Agriculture Biologique, qui observe une baisse d'intérêt des agriculteurs pour la conversion au bio, notamment en Normandie. "Nous sommes dans une période de creux. On a peu de demande de conversation sur la filière laitière, pas ou quasi pas sur la filière céréalière. Sur la filière viande bovine, c'est également très faible", se désole le secrétaire national de la Fédération, Loïc Madeline. 

La concurrence du label HVE

Pour le secrétaire général, si aucun signal fort n'est envoyé au secteur d'ici 2023, il sera difficile de réactiver la filière. Conséquence directe pour les consommateurs, le prix des fruits et légumes bio pourrait augmenter à la caisse. Autre risque enfin, la tentation de certains agriculteurs de se tourner vers le label haute valeur environnementale, HVE. 

Une certification agricole beaucoup moins exigeante que le bio et qui permet notamment d'utiliser des pesticides. Pourtant, les agriculteurs choisissant ce label pourront prétendre aux mêmes aides que pour les exploitants bio. De quoi défavoriser un peu plus la production biologique.