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Romain David , modifié à
La cour d'appel de Lyon a reconnu jeudi la responsabilité de l’entreprise américaine dans l'intoxication de cet agriculteur français en 2004.
INTERVIEW

Pour la troisième fois, la justice a donné raison à un agriculteur charentais contre Monsanto. La cour d'appel de Lyon reconnait un fois encore la responsabilité de la multinationale dans l'intoxication de Paul François, contaminé en 2004 par un puissant herbicide, le Lasso. "Trois condamnations, que faut-il de plus ?", a réagit l'agriculteur au micro de Matthieu Belliard, sur Europe 1, jeudi soir.

La possibilité d'un pourvoi en cassation. Paul François, 55 ans, avait déjà obtenu gain de cause en première instance en 2012 et en appel en 2015, avant que Monsanto n'obtienne un nouveau réexamen de cette affaire. "On peut objectivement imaginer que, ce soir, c'est la fin, mais je reste prudent parce que j'imagine que Bayer/Monsanto réfléchit déjà à ses possibilités de pourvoi. Est-ce qu'ils vont se pourvoir en cassation ? On va voir." Ce céréalier estime que l'industriel "sortirait grandi de laisser la procédure se finir", précisant qu'il s'agit désormais de déterminer le montant des indemnités qui doivent lui être versées.

 

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"Ça mangeait ma vie, ça mangeait ma famille". Cette nouvelle décision de justice laisse toutefois espérer à l'agriculteur la fin d'un marathon judiciaire entamé en 2007 avec une première plainte contre l'industriel. "Ce combat, on le vit seul dans sa tête, et le harcèlement m'a fait hésiter à plusieurs reprises à stopper la procédure", confie-t-il. "Ça mangeait ma vie, ça mangeait ma famille, ça m'empêchait de dormir", explique Paul François qui tient également à rendre hommage à son épouse, "Sylvie, qui est décédée il y a sept mois aujourd'hui". "Je n'étais pas tout à fait seul", ajoute-t-il.

La responsabilité du gouvernement. Alors que le Lasso a été interdit au Canada dès 1985, il a fallu attendre 2007 pour que la France cesse de le commercialiser. Paul François demande désormais à l'Etat de prendre ses responsabilités et d'aller plus loin dans l'interdiction des pesticides et herbicides suspectés d'être nocifs pour la santé. "Quand il a été élu, le président Macron a dit qu'il prendrait ses responsabilités concernant le glyphosate. On connait la suite. Il n'a pas voté de loi, et aujourd'hui il dit que l'on ne peut pas se passer du glyphosate", rappelle-t-il. "Devant le Sénat, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a dit qu'il n'y avait pas de lien scientifique entre certaines pathologies et les pesticides. Honte à eux ! Ils seront jugés par l'histoire pour leur inertie", lâche-t-il.

En 2017, Emmanuel Macron s'est engagé à ce que le glyphosate soit interdit en France "au plus tard dans trois ans". Cette interdiction n'a toutefois pas été inscrite dans la loi Agriculture votée à l'automne 2018. En février dernier, une proposition de La France insoumise pour inscrire dans la loi l'interdiction de cet herbicide controversé a également été rejetée avec les voix de la majorité.