Julia Minkowski 3:45
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Alexis Patri
L'avocate Julia Minkowski publie avec la journaliste Lisa Vignoli "L’avocat était une femme, le procès de leur vie". Un livre sur de grandes affaires judiciaires dont on a oublié qu'elles ont été menées par des avocates. Dans l'émission "Ça fait du bien", la professionnelle explique que son métier reste encore très sexiste.
INTERVIEW

Des avocats qui la prennent pour l'assistante de son collaborateur, et le félicitent devant elle sur l'apparence de sa supposée salariée. Cette scène de sexisme ordinaire compte parmi les nombreuses autres vécues par l'avocate Julia Minkowski. Pour elle, la profession reste un terrain propice au sexisme, comme elle l'explique mardi dans l'émission Ça fait du bien. L'avocate est invitée pour le livre qu'elle co-signe avec la journaliste Lisa Vignoli, L’avocat était une femme, le procès de leur vie. Un ouvrage qui rappelle le rôle des femmes avocates dans certaines grandes affaires judiciaires. 

Pour Julia Minkowski, sa profession a encore beaucoup de chemin à faire. "Je pense que c'est un métier qui est très en retard par rapport à tout ça, parce qu'il est très traditionnel", analyse-t-elle. "On va dans des vieux palais, on utilise des vieilles formules… Il est vrai que la profession n'a pas du tout pris le train de la modernité sur ces questions."

Elle estime pourtant que les choses sont en train de changer. "Dans toutes les professions, à la faveur du mouvement MeToo, les mentalités évoluent. On se permet de moins en moins certaines réflexions", observe-t-elle.

Des affaires encore réservées aux hommes

Selon elle, les avocates sont mieux considérées aux Etats-Unis, même si une autre forme de sexisme demeure. "Vous avez plusieurs avocates assez célèbres, médiatiques, beaucoup en droit de la famille", indique-t-elle. "Mais il y a des spécialités : le droit de la famille, le droit du travail. Pour les choses sérieuses comme les crimes, attention, il faut laisser ça aux hommes."

Une situation que l'on retrouve aussi en France. Selon Julia Minkowski, beaucoup de confrères se demandent qui va garder les enfants quand, dans le pénal, il faut attendre le verdict à deux heures du matin dans des cours d'assises de province. Certains hommes à la robe jugent aussi leurs consœurs trop sensibles pour travailler sur certaines affaires.

La voix trop faible des avocates

Un autre cliché qui s'attachent aux femmes avocates est leur voix. Elle ne porterait pas assez pour faire de bonnes plaidoiries. Un argument qui te tient pas deux secondes quand on pense aux nombreuses comédiennes de théâtre et chanteuses d'opéra. Et quand bien même, estime Julia Minkowski : "si on prend une avocate comme Françoise Cotta par exemple, elle prenait justement tout à fait le contre-pied de cela. Elle parlait avec une petite voix. Elle racontait des histoires. Elle était dans la confidence avec la cour et c'était aussi une façon très efficace de plaider. Donc, on n'a pas besoin de gronder pour se faire entendre."