«Ils détiennent notre droit à produire et nous, on subit» : témoignage d'une agricultrice, pieds et poings liés à Lactalis

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Sandrine Prioul / Crédits photo : CHARLY TRIBALLEAU / AFP , modifié à
Le stand de Lactalis au Salon de l'Agriculture a été envahi mardi par des manifestants de la Confédération paysanne venus dénoncer les pratiques commerciales de la multinationale. Ils demandent une hausse minimum de 20% du prix d'achat pour rentrer dans leurs frais. Près de Rennes, Laurence qui produit pour Lactalis avec un cheptel de 70 vaches, raconte une production sous contrainte.

Ils sont au cœur de la mobilisation des agriculteurs parce qu'ils exercent l'une des activités les moins rémunératrices. Les éleveurs laitiers pâtissent du prix du lait trop faible. Il ne se passe pas un jour sans qu'une manifestation contre Lactalis soit organisée, et cela même au Salon de l'Agriculture où le stand de la multinationale a récolté son lot de fumier. Les producteurs de lait demandent une hausse minimum de 20% du prix d'achat pour rentrer dans leurs frais.

Une production sous les contraintes de Lactalis

Eux qui se disent pieds et poings liés à leur laiterie, sans aucun levier pour garantir de meilleurs revenus. En raison du contrat qui les lie à leur laiterie, il leur est en effet impossible de vendre leur production plus cher ailleurs. Une dépendance dont profiterait Lactalis pour tirer ses prix d'achat du lait vers le bas afin de préserver ses marges dans ce contexte d'inflation. Près de Rennes, Laurence produit pour le géant Lactalis avec un cheptel de 70 vaches laitières. Elle raconte une production sous contrainte.

"C'est Lactalis qui décide de tout"

3.400 litres de lait sont collectés chez Laurence un soir sur deux. Les produits sont transformés par l'industriel, en beurre ou en poudre, à 20 minutes d'ici. Ce contrat commercial devait garantir des débouchés aux agriculteurs quand la loi est sortie en 2010. Aujourd'hui, l'éleveuse dénonce un boulet aux pieds. "C'est Lactalis qui décide de tout [notamment] du prix. On nous a imposé des contrats. Ces contrats nous lient avec notre laiterie, on n'a plus le choix de changer de laiterie aujourd'hui et ils ont nos moyens de production, ça veut dire que ce sont eux qui détiennent notre droit à produire et nous, on subit", avance-t-elle.

"Aujourd'hui, on est payé 420 euros les 1.000 litres pour janvier et février, mais c'est en dessous de nos coûts de production, donc on perd de l'argent. L'idéal serait d'être payé au minimum 500 euros", poursuit-elle. Pour être moins dépendante des fluctuations laitières, Laurence s'est diversifiée dans la volaille Label Rouge. Mais l'éleveuse ne s'étonne plus de voir ses voisins producteurs de lait jeter l'éponge.