Comment la prison de Caen encourage ses détenus au sevrage tabagique

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Théo Maneval, édité par Grégoire Duhourcau , modifié à
Avec l'aide du CHU de la ville, la maison d'arrêt de Caen a lancé il y a six mois un dispositif pour accompagner ses détenus vers le sevrage tabagique. Au total, 183 détenus ont déjà reçu une cigarette électronique.

Quand les détenus des prisons françaises sont encouragés à... vapoter. L'expérience a été lancée il y a six mois à la maison d'arrêt de Caen. C'est là-bas que l'an passé, un détenu avait fait condamner l’Etat pour tabagisme passif. Il avait passé plus de 200 jours dans une cellule avec des codétenus fumeurs. Pour tenter de faire baisser ce tabagisme en prison, l’établissement a lancé un dispositif inédit, avec le CHU de la ville : un accompagnement vers le sevrage avec la cigarette électronique. Ce projet a bénéficié d'une subvention inter-régionale de 55.000 euros, qui a permis l'achat, entre autres, de 1.000 cigarettes électroniques.

"La volonté plus l'aide, ça marche quand même." Et les premiers résultats semblent prometteurs. Dans sa cellule de la maison d’arrêt, Paul a divisé sa consommation de cigarettes par dix depuis le mois d’avril. Il est l’un des premiers détenus dotés d’une cigarette électronique. "Je suis arrivé à quatre, cinq cigarettes par jour. Par rapport à 50, 60 par jour, c'est énorme. La volonté plus l'aide, ça marche quand même", confie-t-il sur Europe 1. En tout, 183 détenus ont déjà reçu une cigarette électronique dans le cadre de ce plan de sevrage, et 80 autres sont sur liste d'attente.

Ici, 80% des détenus sont fumeurs. Depuis six mois, les volontaires ont accès à des consultations avec des tabacologues, et donc à des vapoteuses. "Notre désir n'était pas juste d'être fournisseur de cigarettes électroniques. On fait un test pour évaluer le niveau de dépendance. On utilise aussi un outil pour savoir comment il tire sur ses cigarettes pour bien évaluer ses besoins", explique le docteur Van der Schueren, du CHU de Caen, qui supervise le dispositif. Comme solution, il y a "la cigarette électronique, mais aussi les patchs".

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Pas n'importe quelle cigarette électronique ne rentre en prison. Et on ne fait pas entrer n’importe quoi en prison ! Il a fallu un mois et demi pour trouver un modèle de cigarette électronique dont la batterie ne fasse courir aucun danger. Il ne fallait pas qu'elle soit trop puissante, au risque de faire courir un risque d'incendie ou d'explosion. Il fallait par ailleurs trouver un modèle dont le chargeur ne puisse pas être compatible avec des téléphones portables.

Mais ça vaut la peine, aussi pour le climat social, comme le souligne le directeur de la maison d’arrêt, Jean-Marie Landais : "Un certain nombre de détenus n'a pas les moyens de financer ces paquets de tabac. C'est source de tensions, éventuellement de pressions les uns sur les autres. Donc forcément, le fait d'avoir un accompagnement dans leurs difficultés, c'est très positif." Une autre prison normande s’est déjà portée candidate pour développer un tel projet. Et un appel à candidatures a aussi été lancé pour des maisons d’arrêt en région parisienne.