Calais : les associations saisissent la justice pour rétablir les distributions alimentaires

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Pris jeudi dernier, l'arrêté préfectoral a été motivé par l'insécurité et le contexte sanitaire. © PHILIPPE HUGUEN / AFP
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avec AFP
Un arrêté préfectoral pris le 10 septembre interdit à certaines associations les distributions alimentaires aux migrants dans le centre de Calais. Il porte des "atteintes graves et manifestement illégales (…) à plusieurs libertés fondamentales", pointent les associations.

Les défenseurs des migrants ont saisi mercredi le tribunal administratif de Lille pour demander la suspension d'un arrêté préfectoral qui interdit à certaines associations les distributions alimentaires dans le centre de Calais. Ils dénoncent une atteinte aux "libertés fondamentales".

Dans un arrêté du 10 septembre, la préfecture du Pas-de-Calais a interdit, jusqu'à la fin du mois, "toute distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires" effectuée par une association non-mandatée par l'Etat dans une vingtaine de rues, quais et places du centre de cette ville emblématique de la crise migratoire de 2015. Les autorités invoquaient, dans ce texte, les risques sanitaires dans le contexte du Covid-19 et de salubrité publique.

Une douzaine d'associations mobilisées

Cet arrêté porte des "atteintes graves et manifestement illégales (…) à plusieurs libertés fondamentales", estiment douze ONG et associations, dont le Secours Catholique ou encore la Fédération des acteurs de la solidarité, qui en demandent la "suspension immédiate" dans un recours consulté par l'AFP. Un juge des référés doit examiner leur requête vendredi.

"L'accélération des politiques d'expulsion de terrains, de transferts forcés loin du Calaisis et de harcèlement quotidien depuis le 10 juillet dernier est concomitante d'une restriction de l'accès aux services vitaux tels que l'eau, la nourriture, l'hygiène et les soins", dénoncent encore ces organisations, estimant entre 1.000 et 1.500 les exilés présents dans la région.

Calais, un "laboratoire" pour les migrants ?

Le texte préfectoral est "attentatoire au droit à la dignité, au principe de fraternité, à la possibilité d'aider autrui, et aboutit à interdire, en pratique, toutes les distributions et dons en centre-ville, y compris ceux de simples citoyens", commente Me Patrice Spinosi, qui représente les organisations requérantes. Pour lui, l'arrêté est d'autant plus grave qu'il pourrait faire tâche d'huile: "On sait que la ville de Calais fonctionne comme un laboratoire en ce qui concerne les migrants" et que cette "solution pourrait être reprise par d'autres villes", craint-il.

"On a été estomaqués par cette décision qui ouvre une brèche considérable. Une ligne rouge a été franchie. Cette volonté d'opposer opérateurs de l'État et associations caritatives est perverse et dévastatrice pour la cohésion sociale", s'indigne Laurent Giovannoni, responsable des questions migratoires au Secours catholique.