Les prostituées défendent leurs clients

Ils étaient près de 200 à manifester jeudi à Pigalle pour défendre la prostitution.
Ils étaient près de 200 à manifester jeudi à Pigalle pour défendre la prostitution. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
Des prostituées ont manifesté jeudi, place Pigalle à Paris, contre la pénalisation de leurs clients.

Pénaliser les clients de prostituées risque de renforcer les réseaux de proxénétisme. C’est le mot d’ordre du Collectif Droits et Prostitution et de prostituées indépendantes, qui ont manifesté jeudi-après-midi sur la place Pigalle, à Paris.Environ 200 prostituées, clients et membres d'associations ont rejoint la place de la République pour s'opposer au projet de pénalisation des clients.

Un rassemblement dont l’objectif est clair : s’opposer au rapport parlementaire Bousquet (PS), rendu public en avril, qui propose notamment d'incriminer les clients des prostituées. "On paie des impôts, c'est donc bien un vrai boulot" ou "je suis majeur, j'ai toutes mes dents, touche pas à mon client", ont ainsi scandé les manifestants, marchant derrière une banderole proclamant "Clients pénalisés, prostituées en danger".

"Favoriser les réseaux au détriment des indépendants"

Pour Sarah-Marie Maffesoli, juriste du Collectif, pénaliser les clients va "pousser les travailleurs du sexe à s'éloigner des endroits visibles" et donc mieux protégés et "les obliger soit à avoir des protecteurs" ce qui renvoie à une nouvelle forme de proxénétisme, "soit à s'installer dans des appartements, des chambres d'hôtels".

Enfin, la pénalisation des clients va, selon la juriste, "favoriser les réseaux au détriment des indépendants". Elle insiste sur la différence entre les "travailleuses du sexe qui ‘utilisent leurs corps comme elles le souhaitent pour fournir librement une prestation sexuelle’, et les "victimes de la traite des être humains par des réseaux mafieux".

"Les agresseurs, ce ne sont pas les clients"

Une baisse d’activité des prostituées indépendantes qui pourrait les pousser à devoir "accepter des rapports non protégés", menace Cécile Lhuillier, d'Act-Up, association de lutte contre le Sida. Déjà, depuis la loi de 2003 pénalisant le racolage public, "on constate une augmentation des infections sexuellement transmissibles chez les travailleuses du sexe les plus précaires", souligne Miguel-Ange Garzo, de l'Arcat, autre association contre le Sida.

Enfin, pour les prostituées, la pénalisation de leurs clients ne contribuerait pas à les sécuriser : "les agresseurs, ce ne sont pas les clients", précise Samantha, qui "travaille" au bois de Boulogne. Même constat pour Chloé, prostituée à Paris. "Les bénéficiaires de nos prestations ne sont pas des pervers", insiste la jeune femme, qui estime que la proposition des députés n'est "qu'un épouvantail avant les élections".

Mais la proposition de loi socialiste a peu de chances d’être un jour appliquée. Le ministre de l’Intérieur Claude Guéant avait objecté début avril qu'il était "difficile de faire un délit de la pratique du client alors que la prostitution elle-même n'est pas un délit".