Le "Barbe bleue" de l'Essonne devant la justice

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Jamel Leulmi est accusé d'avoir assassiné sa première femme et tenté de tuer une autre de ses compagnes pour toucher leurs assurances décès.

Il est surnommé "le barbe bleue de l'Essonne". Jamel Leulmi, 36 ans, comparaît depuis de lundi devant la cour d'assises d'Evry, pour avoir assassiné sa femme et tenté de tuer une seconde compagne. L'homme, présenté comme un fin manipulateur, est suspecté d'avoir orchestré les "accidents" de ses compagnes afin de bénéficier de leurs (gracieux) contrats d'assurance décès. En prison depuis 2010, ce charmeur au double visage, oscillant entre séduction et manipulation, nie formellement les faits. Qui est Jamel Leulmi ? Un homme qui séduit les femmes dans le but de leur faire signer des contrats d’assurance décès avant de les assassiner ? Ou bien un séducteur maladif victime d’incroyables "coïncidences" ?

"J'espère que vous avez le temps". Les ennuis judiciaires de cet ex-professeur de technologie reconverti en chef d'entreprise commencent le 12 juin 2010. Ce jour-là, Julie Derouette, une ancienne de ses très nombreuses conquêtes, se présente à la gendarmerie pour porter plainte après un cambriolage à son domicile. Fait troublant : aucun objet de valeur n'a été dérobé mais quatre copies de contrats d'assurance décès ont disparu. "J’espère que vous avez du temps, parce que mon histoire est compliquée", prévient Julie aux gendarmes. Car après ce cambriolage sans effraction, la jeune femme a en effet immédiatement fait le lien avec son ancien compagnon, Jamel Leulmi.

"Il me disait qu’il m’aimait, qu’il voulait m’épouser". Sa rencontre avec le bellâtre remonte à 2009. Julie décide d'emmener ses filles dans un tout nouveau parc d'attraction proche de chez elle, Coco Island. Immédiatement, elle est abordée par le gérant du lieu, un homme musclé au sourire ravageur. Jamel Leulmi obtient le numéro de la jeune mère de famille et les deux tourtereaux débutent rapidement une histoire. "Il me couvrait de cadeaux, m’emmenait au restaurant, gâtait mes filles. Il me disait qu’il m’aimait, qu’il voulait m’épouser", raconte-t-elle à Libération.

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Un mariage et des contrats d'assurance. Les fiançailles sont justement prévues en décembre de la même année. Elles doivent se dérouler au Maroc et en Algérie, les pays d'origine des parents de Jamel Leulmi. "Il m’a dit que, pour obtenir le visa pour l’Algérie, il fallait des assurances invalidité décès. Il m’a emmené à trois rendez-vous chez des assureurs, et j’ai souscrit aussi deux contrats par Internet. Je lui faisais confiance, j’étais amoureuse, je signais", confie encore la jeune femme au quotidien. Des déclarations que les enquêteurs ont pu confirmer. Ces derniers ont en effet retrouvé les doubles des contrats invalidité décès. Des contrats s'élevant à la coquette somme de 7 millions d’euros au profit de Jamel Leulmi en cas de mort accidentelle de la jeune femme.

Laissée pour morte au bord d'une route. Et l'accident survient justement juste avant leur mariage, au Maroc, où Julie Derouette devait retrouver son compagnon. La mère de famille est victime d'un accident de la route. Au volant d'une voiture de location, elle est percutée par l'arrière puis violemment agressée et laissée pour morte sur le bord de la route. Elle s'en sortira avec la colonne vertébrale brisée et cinq mois d'ITT. Durant sa période de convalescence, Jamel Leulmi ne lui rend visite qu'une seule fois. C'est la désillusion pour Julie Derouette. Après son mystérieux cambriolage, elle décide de porter plainte.

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Un (autre) "accident" troublant. Les enquêteurs se penchent alors sur le passé de l'accusé et découvrent qu'il est veuf. Sa première épouse est morte trois ans plus tôt dans un accident de la route, fauchée par une voiture au cours d'une balade à vélo, trois mois à peine après leur mariage. Coïncidence ? Elle avait également souscrit quelques semaines avant sa mort plusieurs polices d'assurance au profit de Jamel Leulmi, lesquelles prévoyaient en outre un doublement de la somme en cas de décès accidentel. Faute d'avoir pu identifier le conducteur, l'enquête sur le décès est classée sans suite en 2007. Jamel Leulmi touche alors plus d'un million d'euros, qu'il flambe en s'offrant deux maisons, un appartement, un 4x4, un quad ou encore un jet-ski.

Une troisième femme sous l'influence du Don Juan. L'enquête se poursuit et fait apparaître une troisième conquête, une femme présentant un léger retard mental et rencontrée dans un club échangiste. Céline, qui défend toujours Jamel aujourd'hui, a elle a aussi contracté plusieurs polices d'assurance à son bénéfice, pour un montant potentiel de 3,2 millions d'euros. Autant de coïncidences qui poussent les enquêteurs à interpeller et placer en garde à vue Jamel Leulmi en août 2010.

"Un malheureux concours de circonstances". Depuis sa cellule de Fleury-Mérogis, il ne cesse de comparer son accusatrice à une "mythomane", ses déclarations relevant selon lui du "fantasme". Quant aux similitudes troublantes entre les différentes affaires, il invoque un "malheureux concours de circonstances". Les juges ont jusqu'au 20 mai pour trancher.

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