LA QUESTION SEXO - Peut-on parler de tout avec ses amis concernant la sexualité ?

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Catherine Blanc
Dans l'émission "Sans rendez-vous" vendredi sur Europe 1, Catherine Blanc répond à un auditeur, Justin, qui se demande pourquoi un de ses amis lui a parlé de ses "coups d'un soir", malgré leur habitude d'évoquer leur vie sexuelle dans leur groupe d'ami. Pour la sexologue et psychanalyste, le dégoût ressenti par Justin cette fois-ci s'explique peut-être par sa propre histoire.

Y a-t-il des limites à parler de sexualité entre amis ? Dans l’émission Sans rendez-vous vendredi sur Europe 1, la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc répond à la question d'un auditeur, Justin, qui se demande pourquoi l'un de ses amis a parlé de ses plans d'un soir lors d'un repas. Cela dégoûte Julien même s'il dit avoir l'habitude d'évoquer la sexualité avec son groupe d'amis.

La question de Justin

"Lors des repas avec mes amis, on expose un petit peu tous notre vie sexuelle de manière assez libre. Mais lors du dernier repas, j'ai un ami qui nous a fait part de ses plans d'un soir. Personnellement, ça me dégoûte. Je ne comprends pas comment on peut aimer ça. Qu'est-ce qu'il peut y avoir d'attirant dans ces pratiques ?" 

La réponse de Catherine Blanc

"Justin a l'air d'avoir besoin qu'il y ait une histoire entre deux individus pour se sentir à l'aise avec la sexualité. Ça ne signifie pas forcément qu'il s'attend à ce qu'il y ait une histoire amoureuse, mais au moins une histoire. Sûrement pour ne pas être un objet, l'objet de l'excitation de l'autre, mais bien un sujet, en relation avec un autre sujet. C'est assez dégoûtant pour lui de se retrouver coincé dans le fait d'être l'objet de quelqu'un d'autre ou coincé dans cette position dominante d'utiliser le corps de l'autre."

Parler de dégoût, c'est quand même fort...

La situation la plus dramatique serait que ce dégoût renvoie à une histoire personnelle : que Justin ait été objet ou se sente hanté par la culpabilité d'avoir utilisé autrui d'une manière ou d'une autre. Par conséquent, il combattrait cette position par une autre position très affirmée, celle de la nécessité d'avoir une relation. Quand on est agressé par des choses extérieures, cela donne l'occasion de s'interroger sur ce que cela raconte de nous-mêmes. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas matière à reproches sur l'extérieur, mais peut-être que cela raconte aussi quelque chose de nous. Nous avons tous des limites en fonction de nos histoires.

C'est cela qui est intéressant dans la sexualité et dans son analyse de la sexualité. Arrêtons de simplement de la subir avec ses interdits. N'ayons pas peur de réfléchir, d'avoir un cerveau pour penser notre sexualité.

Ne pouvait-il pas avouer que cette conversation le rendait mal à l'aise ?

Bien sûr qu'il en a le droit . C'est assez incroyable de constater que nos positions d'adultes, que l'on devrait vivre comme étant des positions d'êtres libres par rapport à un enfant qui est plus dans la difficulté, nous obligent à avoir un comportement social dit 'cool' et 'politiquement correct'. Par le passé, quelqu'un qui aurait parlé de plans d'un soir aurait été considéré comme un horrible pervers. Or, aujourd'hui, c'est difficile de s'en indigner puisque on est censés pouvoir tout entendre.

Je crois qu'il faut pouvoir dire : 'Écoute, moi, ça ce n'est pas ma tasse de thé, si on pouvait parler d'autre chose...' On n'est pas obligé de s'infliger la sexualité de nos voisins. Même si on peut trouver bizarre que cela nous fasse quelque chose, alors que pour le voisin ça à l'air normal. En plus, si ça se trouve, l'homme en question qui raconte ses coups d'un soir ne les vit pas non plus... 

Il peut mentir ?

Mais bien sûr, parce qu'il serait seul par exemple. L'histoire ne le dit pas. Au contraire, peut-être que cette personne est justement en couple et que c'est ce qui dégoûte Justin. Ou au contraire, c'est un célibataire qui, pour ne pas être laissé pour compte, a besoin de dire combien c'est formidable de l'être pendant que les autres ont des sexualités routinières.

Ces propos ne parlent donc peut-être même pas nécessairement de la réalité de cette personne. De même, le dégoût que ressent Justin n'est pas nécessairement le reflet de ce qui se joue pour cet autre homme, mais bien pour lui-même avec sa propre culpabilité sur le sujet ou son propre désir qui le culpabiliserait."