Olivier Bogillot est le directeur général de Sanofi. 3:34
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Antoine Terrel , modifié à
Au micro de Charles Villeneuve, sur Europe 1, le directeur général de Sanofi Olivier Bogillot a regretté le manque d'investissement de l'État dans la recherche sur l'industrie pharmaceutique ces dernières années. Une situation qui a selon lui amené à un déclassement de la France par rapport à ses concurrents. 
INTERVIEW

Royaume-Uni, Chine, Russie, États-Unis... Sur les cinq membres permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, quatre ont d'ores et déjà pu produire et développer un vaccin contre l'épidémie de coronavirus. Tous, sauf la France, donc, qui doit encore attendre que le produit développé par Sanofi soit disponible en décembre prochain. Invité dimanche des Grands entretiens d'Europe 1, le directeur général du laboratoire français, Olivier Bogillot, a expliqué les raisons de ce retard, et insisté sur les choix stratégiques des différents gouvernements français ces dernières années, coupables, selon lui, de n'avoir pas assez investi dans la recherche. 

L'obsession pour les économies

Pour Olivier Bogillot, il faut "regarder comment la France et l'Europe ont traité le secteur de l'industrie pharmaceutique et des sciences de la vie". Au cours des dernières années, assure-t-il, "un grand nombre de gouvernants ont considéré que ce n'était pas un secteur stratégique, et ont plutôt considéré que c'était une source de dépenses, parce que les dépenses de médicaments sont remboursées par l'Assurance maladie, par la Sécurité sociale et qu'il fallait faire des économies, résorber les déficits". Et "le meilleur moyen de les résorber était de baisser le prix des médicaments et de faire des économies sur ce secteur".

Or, note-t-il, "d'autres pays n'ont pas eu du tout cette approche, et ont considéré que c'était un secteur stratégique". Et Olivier Bogillot de citer notamment la Chine, les États-Unis, l'Allemagne et l'Angleterre. Dans ces pays, "il y a eu des investissements majeurs en recherche, en développement, dans l'outil industriel."

L'importance d'une "industrie pharmaceutique forte"

En France, la crise du coronavirus "a révélé cette vulnérabilité-là, et rappelé à tout le monde que ce secteur est stratégique et qu'il nécessite d'avoir des investissements importants en recherche, en développement, et dans l'outil de production", ajoute l'invité d'Europe 1, appelant à ce que ces investissements soient maintenus "de manière constante". Car, rappelle-t-il, "la recherche dans le secteur du médicament et des industries de santé, ce sont des recherches qui prennent plusieurs années".

Aujourd'hui, "dans la compétition internationale, l'Europe, et la France en particulier, se sont plutôt déclassées", insiste le directeur général de Sanofi, qui illustre : "Jusqu'en 2004, la France était le premier producteur de médicaments d'Europe. On est aujourd'hui le quatrième". La France a elle été "dans une autre forme d'investissement, avec un choix de faire des investissements sur l'offre de soins, sur l'hôpital ou sur d'autres secteurs, mais pas celui-ci". Or, conclut Olivier Bogillot, "on voit bien que dans une crise, avoir des technologies de santé, avoir une industrie pharmaceutique forte, c'est très utile".