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M.B.
Le politologue Olivier Duhamel est revenu sur Europe 1 sur les particularités de l'ancien Premier ministre, et notamment son courage politique. 
INTERVIEW

A droite comme à gauche, les hommages pleuvent depuis la mort de Michel Rocard, samedi. L'ancien Premier ministre semble unanimement salué par la classe politique. Un consensus que le politologue Olivier Duhamel explique par le fait que Michel Rocard faisait "partie de ces hommes de conviction plus que de pouvoir", qui n'ont pas réussi à accéder à la présidence. "À gauche, c'est une catégorie qu'on connaît bien, avec Pierre Mendès-France ou Jacques Delors", a expliqué l'éditorialiste sur Europe 1, lundi. "Ils sont aimés par une large partie de la droite parce qu'elle n'aime pas la gauche au pouvoir et à gauche parce qu'une large partie de la gauche n'aime pas le pouvoir". 

Un Premier ministre dont on se souviendra. Même les personnalités politiques qui ont combattu Michel Rocard, ou ne se sont jamais positionnées sur la même ligne, lui tressent désormais des lauriers. "À une époque où la politique est si décriée, il y a une forme de respect pour des politiques d'un autre genre, qui n'étaient pas d'abord assoiffés de pouvoir mais désireux de changer les choses", analyse Olivier Duhamel. En outre, ce n'est pas parce que Michel Rocard n'a jamais été président qu'il ne marquera pas l'histoire politique française. "Quand on avance dans l'histoire de la Ve République, on regarde d'abord les présidents, et il reste celui qui n'a pas été président", concède le politologue. "Mais quand on regarde les Premiers ministres, il y a ceux qui ont marqué et ceux qui seront quasi-oubliés. Rocard a infiniment plus marqué qu'Édith Cresson [Première ministre entre 1991 et 1992], comme Raymond Barre [à Matignon de 1976 à 1981] a infiniment plus marqué que Maurice Couve de Murville [1968-1969]."

Un héritage à nuancer. Désormais, de nombreux hommes politiques, à gauche, se clament héritiers de Michel Rocard. Pour Olivier Duhamel, Manuel Valls comme Emmanuel Macron marchent dans les traces de l'ancien Premier ministre, même s'il faut nuancer leurs ressemblances. "Rocard lui-même a posé des limites à cela, en disant que Valls et Macron n'avaient pas assez le sens de l'histoire", rappelle-t-il en faisant allusion à la dernière interview de l'ancien Premier ministre, au Point. Sans compter que, à plusieurs reprises pendant le quinquennat mais tout particulièrement sur le dossier de la loi Travail, l'intransigeance de Manuel Valls l'éloigne de son mentor. "Michel Rocard était l'homme de la négociation, de la construction d'un consensus", souligne Olivier Duhamel. "Manuel Valls est à l'antipode. C'est plus Clemenceau que Rocard."