Mais qui est (vraiment) Jean-Frédéric Poisson ?

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Le candidat de la primaire à droite, empêtré dans une polémique pour des propos jugés antisémites, s'était fait connaître lors du premier débat. En réalité, son positionnement politique n'y était apparu que très partiellement.

Sa déclaration polémique sur les "lobbies sionistes" américains pourrait-elle lui coûter sa place à la primaire de la droite ? Jean-Frédéric Poisson, président du parti chrétien-démocrate, fait tout pour calmer la tempête qu'il a provoquée, mercredi dernier, en accordant une interview à Nice-Matin. Dans cet entretien, il affirmait notamment que "la proximité d'Hillary Clinton avec les super-financiers de Wall Street et sa soumission aux lobbies sionistes sont dangereuses pour l'Europe et la France".

Le tollé a été immédiat. Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a jugé la phrase "insidieusement antisémite". Un reproche partagé par Thierry Solère, président de la Commission d'organisation de la primaire à droite. Nathalie Kosciusko-Morizet, quant à elle, a annoncé vendredi avoir saisi la Haute autorité de la primaire pour que celle-ci se "prononce" sur la compatibilité des propos de Jean-Frédéric Poisson avec la charte de l'élection.

Il est toutefois peu probable que le président du PCD soit sanctionné. Son cas doit être examiné mardi par le comité d'organisation et mercredi par la Haute autorité de la primaire. Mais ses excuses répétées, d'abord vendredi, puis lundi matin, devraient suffire à obtenir la mansuétude de la droite, qui demandait avant tout un mea culpa. Reste à en évaluer l'impact en termes d'image.

Une image d'homme mesuré... Si cette phrase choque, c'est aussi parce qu'elle tranche avec l'image que renvoyait Jean-Frédéric Poisson depuis sa révélation au grand public, le 13 octobre dernier. Lors du premier débat de la primaire à droite, le président du Parti chrétien-démocrate avait fait la (quasi) unanimité en sa faveur. Il était apparu mesuré, prudent, loin des polémiques grossières. Ainsi, alors que, de Bruno Le Maire à Nicolas Sarkozy en passant par Alain Juppé et François Fillon, tous tiraient à vue sur les 35 heures et les syndicats, Jean-Frédéric Poisson avait calmé le jeu. Fort de son expérience de directeur des ressources humaines, le président du PCD avait rappelé que les salariés travaillent déjà plus de 35 heures hebdomadaires, et qu'il ne goûtait que peu "les attaques frontales contre les organisations syndicales".

…entachée par la polémique. Sur la question de l'internement préventif de certains fichés S aussi, l'inconnu de la primaire s'était fait un nom en s'y opposant fermement. Recadrant le débat sur le burkini en rappelant le principe de la loi de 1905 sur la laïcité, il avait, là encore, marqué sa différence. À tel point qu'internautes et journalistes l'avaient trouvé très convaincant et hissé au rang de grand vainqueur de ce premier débat. Dans ce contexte, sa phrase à Nice-Matin détonne. Jean-Frédéric Poisson, lui, invoque même un lien entre sa bonne prestation lors du débat et la promptitude de ses rivaux à l'accabler. "Il y a dans la réaction de certains de mes concurrents beaucoup de théâtre en réalité", a-t-il ainsi déclaré lundi sur France Info. "Si j'avais moins bien réussi le débat de la semaine dernière, ces réactions auraient été moins énergiques."

Conservateur. En réalité, si le premier débat à la primaire a permis au président du PCD de se faire connaître, il n'a aussi révélé qu'une facette restreinte de ses convictions politiques. Le 13 octobre, sur les questions économiques, Jean-Frédéric Poisson faisait figure de progressiste par rapport à ses concurrents. Mais ce ne sont pas les terrains sur lesquels il affirme les convictions les plus fortes (et il a d'ailleurs lui-même regretté, à la fin du débat, que les discussions aient été plus gestionnaires que politiques). Sur l'islam, la famille ou encore l'immigration, Jean-Frédéric Poisson est clairement conservateur, voire réactionnaire. Dans la droite ligne de sa prédécesseur à la tête du PCD, Christine Boutin, il prône l'abrogation de la loi Taubira, estime que "la baisse du nombre d'avortements [est] un objectif de santé publique", et voudrait interdire la gestation pour autrui au niveau mondial.

À droite toute.Son projet contient également une mesure pour abroger les lois mémorielles et l'inscription des "racines chrétiennes" de la France dans la Constitution. Selon Jean-Frédéric Poisson, l'islam est un "danger" qui "pèse aujourd'hui sur notre pays". "Pas seulement l'islam radical et l'agression constante qu'il fait peser sur notre société et notre mode de vie. Mais, si l'on peut dire, l'islam 'tout court'", écrit-il dans son programme. En matière d'immigration aussi, le président du PCD donne dans le très à droite : instauration du droit du sang, suppression du "regroupement familial systématique" et organisation d'un référendum "pour demander aux Français de décider du type d'aides sociales versé aux ressortissants étrangers et des conditions de leur versement".