Préfet Érignac 1:39
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avec AFP , modifié à
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a proposé aux instances de l’île de Beauté de relancer les échanges sur l’avenir de la Corse à l'occasion des 25 ans de la mort du préfet Claude Érignac tué par balle à Ajaccio. De nombreux partis réclament l’autonomie de l’île, voire même son indépendance.

Un quart de siècle après l'assassinat du préfet Claude Érignac, "il est temps d'écrire une nouvelle page de l'histoire de la Corse", a estimé lundi le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, proposant aux instances de l'île de reprendre les discussions sur son avenir. Le soir du 6 février 1998, Claude Érignac décédait sous les balles d'un tueur qui lui avait tiré dans le dos, dans la rue, alors qu'il se rendait à pied au théâtre. Lundi, Gérald Darmanin, venu présider les commémorations à Ajaccio, a estimé qu'"il (était) temps d'écrire une nouvelle page de l'histoire de la Corse", de "construire durablement la paix".

Gérald Darmanin veut travailler avec les Corses

L'île méditerranéenne connaît des rapports compliqués avec les gouvernements français et compte depuis des décennies des mouvements nationalistes qui réclament davantage d'autonomie et pour certains l'indépendance, ainsi que des groupes clandestins. Les nationalistes sont depuis 2015 à la tête des instances de l'île. Le gouvernement "tend la main aux innombrables Corses de bonne volonté, épris de paix et de fraternité" pour "tracer ensemble" une "route institutionnelle, économique, culturelle", a-t-il ajouté.

"Travaillons ensemble", a également lancé le ministre, car "les morts nous regardent". Claude Érignac a été le seul préfet assassiné en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Après sa mort, des dizaines de milliers de Corses avaient exprimé leur effroi lors des plus grandes manifestations jamais organisées à Ajaccio et Bastia. Trois hommes ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité pour cet assassinat : Pierre Alessandri, Alain Ferrandi et Yvan Colonna. Détenu à la prison d'Arles (Bouches-du-Rhône), Yvan Colonna a été agressé par un codétenu le 2 mars 2022 et est décédé le 21 mars, ce qui a provoqué des semaines de manifestations violentes sur l'île.

Des discussions sur l'avenir de la Corse

Depuis, un cycle de discussions sur l'avenir de l'île "à vocation historique" s'est ouvert cet été mais était grippé autour des refus répétés d'octroi de semi-liberté à Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, libérables depuis 2017. L'annonce de la venue de Gérald Darmanin pour ces commémorations est intervenue fin janvier, quelques heures après l'octroi par la justice d'une mesure de semi-liberté à Pierre Alessandri.

Alain Ferrandi attend, lui, la décision de la justice le 23 février sur une demande similaire. Le ministre de l'Intérieur a proposé lundi à Gilles Simeoni et Marie-Antoinette Maupertuis, présidents autonomistes du conseil exécutif et de l'Assemblée de Corse, de reprendre les discussions sur l'avenir de la Corse le 24 février à Paris. Avant cela, Gérald Darmanin doit se rendre dans l'île "deux jours mi-février", a indiqué son entourage à l'AFP.

La volonté de Gérald Darmanin d'apaiser les choses

Interrogé par l'AFP dès la fin du discours du ministre de l'Intérieur, Gilles Simeoni, qui a été en outre l'avocat d'Yvan Colonna, n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat. Jean-Christophe Angelini, à la tête du parti autonomiste de la nation corse (PNC, opposition), a salué pour sa part "une tonalité globale qui nous paraît incontestablement nouvelle et même inédite", espérant que "ce qui a été prononcé sera désormais suivi d'actes". 

Le sénateur LR de Corse-du-Sud Jean-Jacques Panunzi s'est aussi félicité de la "ferme volonté" du ministre "d'apaiser les choses en disant clairement qu'une page se tournait". "Le gouvernement, l'Etat, tend la main à la Corse. Et c'est aux élus aussi d'accepter cette réconciliation et de faire en sorte que tous ensemble, nationalistes, élus de la société civile, tous les partis politiques, nous trouvions les voies et les moyens pour construire une Corse dans la paix et dans la tranquillité", a-t-il déclaré au micro d'Europe 1. Sur les lieux du crime, devenus la place Érignac, où se dressent désormais un olivier et l'inscription "1 homme, 1 place", le ministre de l'Intérieur a rendu hommage à un homme "lumineux, droit et intègre" devant un parterre d'élus et de personnalités.

Au même moment à Paris, le président Emmanuel Macron recevait la famille Érignac. Pour le 20e anniversaire de l'assassinat du préfet, le chef de l'Etat avait fait son premier déplacement sur l'île depuis son élection, accompagné de Dominique Érignac, la veuve du préfet, et de ses deux enfants dont c'était le premier retour en Corse depuis les faits. "Assassiner un préfet, c'est frapper toute la Nation", a assuré sur Twitter la Première ministre Elisabeth Borne, rendant "hommage à cette grande figure de la République".