Emmanuel Macron 3:09
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Michaël Darmon
Emmanuel Macron a présenté mercredi les traditionnels vœux présidentiels à la presse. Le chef de l'Etat a insisté sur sa volonté de placer l'acte 2 de son quinquennat sous le signe du dialogue, conscient de la défiance d'une large partie des Français à son égard.

Au début de son quinquennat Emmanuel Macron avait décrété la présidence silencieuse face aux journalistes. Depuis 2018, le président de la République a renoué avec la tradition des vœux à la presse. Il s'y est de nouveau plié mercredi. L’occasion de remarquer l’arrivée de mots nouveaux dans les propos du chef de l’État, qui traduisent son état d’esprit.

"Je ne vais pas vous demander de traverser la rue pour travailler. Cette petite phrase ne m’a pas porté chance. Elle fait très acte 1", a déclaré Emmanuel Macron en forme d’autocritique. Mercredi, dans la salle des fêtes de l’Elysée, point de diatribe sur les propos croquignolesques des journalistes ou autre corps intermédiaires. Le président a, comme il se doit, rappelé son attachement à la liberté d’expression. Il s’est ensuite attaché à s’exprimer librement sur tous les sujets. Une manière de confirmer le principe moteur de l’acte 2 issu du "grand débat" : parler. D’ailleurs, le chef de l’Etat s’adressera aux Français très prochainement, a-t-il confié, après la présentation de la loi sur les retraites dans les prochaines semaines.

Lors de cet échange à bâtons rompus avec la presse française et étrangère, Emmanuel Macron a laissé affleurer ses préoccupations face à une société française tendue. Sur les violences policières, il a confirmé que les bavures seraient sanctionnées, tout en insistant sur un point : "Les policiers de la République n’appartiennent pas à un camp, ils ne sont pas opposés aux manifestants. Si on oublie ce principe, on tombe dans la république des clans”. Pour autant, Emmanuel Macron qui aime se plonger dans les grimoires du général de Gaulle pour le citer n’a pas l’intention de reculer face aux manifestants. "J’entends les inquiétudes mais il faut avancer". C’est la formule présidentielle fétiche ces jours-ci. Entendue à Pau, répétée mercredi à l’Elysée. Traduction par l’un de ses amis qui le voit en privé : "Peu importe les manifestations, il trace sa route."

Un président mis sous surveillance par les Français

On sait qu’Emmanuel Macron, président vintage, aime chiner dans les vide-greniers sémantiques pour trouver des mots rares. "Arrêtez de patachonner dans la tête", a-t-il notamment lancé à un enseignant gréviste de Pau pour lui dire qu’il mélangeait les problèmes. Depuis le début de l’année, c’est l’expression "en commun" qui revient souvent dans les propos présidentiels. "Je crois que nous pouvons compter sur notre capacité à construire la France en commun", a déclaré Emmanuel Macron le soir du 31 décembre. Le monde "en commun" était au cœur de son discours sur le climat devant la convention citoyenne. C’est l’expression à la mode, utilisée dans plusieurs slogans de la campagne municipale, notamment à Paris.

À la mi-mandat, Emmanuel Macron change de posture mais pas de méthode. Avant, le silence et les petites phrases cinglantes montraient une gouvernance perçue pour de l’arrogance. Aujourd’hui, la parole affable fait évoluer le récit présidentiel pour masquer la leçon de la fable. Avec des partis vitrifiés, des syndicats affaiblis et une pratique souvent baroque de l’art politique du côté de LREM, Emmanuel Macron sait que les Français le mette sous surveillance. D’ailleurs, il s’en est plaint avec une petite phrase qui en dit long sur le poids du pouvoir : "Je ne peux même plus aller skier dans les Pyrénées, tout le monde croit que je suis à Courchevel."