"Bordel", "président des riches", chômage... Les cinq choses à retenir de la première interview du président Macron

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G.S. , modifié à
Vocabulaire cru, "président des riches", lutte contre le chômage... Lors de sa première interview télévisée, le chef de l'Etat a voulu faire taire les critiques, et renouveler quelques promesses.

Emmanuel Macron s'est finalement sacrifié à la tradition de la longue interview télévisée, dimanche soir sur TF1 et LCI. "J'ai pris la décision de ne pas avoir une présidence bavarde. Il faut que la parole présidentielle garde une solennité, il était nécessaire de revenir à certains usages", a justifié le chef de l'Etat, interrogé sur son faible nombre d'interventions publiques depuis son élection. En renouant avec cette tradition, l'objectif était double : répondre à ceux qui l’accusent d’être le "président des riches", et ainsi enrayer la baisse quasi-continue dans les enquêtes d'opinion qui frappe l'exécutif depuis la rentrée. Quelles ont été ses réponses ? Europe 1 vous résume les cinq principaux points à retenir de l'interview. 

1) "Bordel, fainéants" : Macron assume.

Les mots "fainéants" et "cyniques" ? Le commentaire sur "ceux qui foutent le bordel" ? "J'assume totalement ce qui a été dit. Quand on dit cela, on n'agresse pas, on n'invective pas", répond Emmanuel Macron. Ces mots, qui pouvaient donner l'impression d'un mépris de classe de la part du chef de l'Etat, ont été mal compris, assure-t-il dimanche. "Les mots de cynique et de fainéant sont d'un registre normal ou soutenu. Ils ne sont pas clivants. Ceux que je visais [en parlant des fainéants] sont ceux qui ont considéré pendant des années qu'on pouvait ne plus réformer la France et l'Europe." Le terme "bordel" ? "En l'espèce, le mot bordel est du registre populaire. Je n'ai pas cherché à humilier. Je n'ai pas insulté qui que ce soit. Je considère l'ensemble de mes concitoyens", martèle Emmanuel Macron, qui n'entend pas davantage se brider à l'avenir.

" Je n'ai jamais cherché à humilier. Nos élites politiques se sont habituées à ne plus dire les choses. Je continuerai à dire les choses "

"J'ai toujours essayé de dire les choses et de m'approcher d'une forme de vérité que je pensais juste. Donc, je nomme. Je l'ai fait à plusieurs reprises, y compris quand j'ai parlé "d'illettrées" [il était alors ministre de l'Économie et visait des ouvrières de l'entreprise Gad]. Je n'ai jamais cherché à humilier. Nos élites politiques se sont habituées à ne plus dire les choses. Je continuerai à dire les choses, à parfois m'emporter quand je discute avec les citoyens", argumente-t-il. Et d'asséner : "Je ne suis pas dans un système de complaisance avec le réel. J'essaie de le nommer, parfois crûment".

2) Chômage : les résultats seront-là d'ici deux ans (maximum)

La "plénitude" des réformes menées par le gouvernement pourra se constater "dans un an et demi, deux ans", a promis le chef de l'Etat, trois jours après avoir lancé le deuxième chantier social de son quinquennat. "Le taux de chômage n'est pas une variable qu'on ajuste", insiste-t-il. "Le taux de chômage est en train progressivement de baisser, il baissera". Comment ? Le président de la République a un nouvelle fois longuement insisté sur la nécessité de mieux former les demandeurs d'emploi. "On a trois fois plus de chances d'être au chômage lorsqu'on n'est pas qualifié. Donc la vraie transformation sur ce sujet, la vraie protection, ça n'est pas seulement d'indemniser celui ou celle qui tombe au chômage, ce que nous continuerons évidemment de faire avec la même exigence. Mais surtout c'est de former", a-t-il estimé.

3) Il n'est pas le "président des riches", mais celui des "investisseurs"

Interrogé sur sa refonte de l'ISF et l'appellation de "président des riches" qui lui colle à la peau, Emmanuel Macron fustige une nouvelle fois les "passions tristes" de "certains de ses opposants". "Je ne crois pas à la jalousie française qui consiste à dire que les gens qui réussissent doivent être taxés", lance-t-il.  "Je veux qu'on célèbre ces réussites. Si on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c'est toute la cordée qui s'effondre", martèle le chef de l'Etat. En contrepartie, Emmanuel Macron estime que les plus aisés doivent contribuer à redresser le pays. "Je ne crois pas au ruissellement", assure-t-il. En clair, il ne croit pas en la théorie selon laquelle plus les riches sont riches, plus le pays se porte mieux. Selon lui, ceux qui réussissent doivent investir pour contribuer à la réussite.

" Je n'aime pas non plus le cynisme de ceux qui réussissent leur vie et dont le but dans la vie n'est que d'accumuler de l'argent "

"Nous n'y arriverons pas si nous ne facilitons pas l'investissement dans l'économie française. Je me suis engagé à ce que ceux qui réinvestissent ne soient pas taxés. La condition pour ne plus être à l'ISF, c'est d'investir", assure Emmanuel Macron. Et d'enchaîner : "Aussi vrai que je n'aime pas la jalousie (envers les riches), je n'aime pas non plus le cynisme de ceux qui réussissent leur vie et dont le but dans la vie n'est que d'accumuler de l'argent. Moi je veux qu'ils investissent dans l'économie". 

4) Harcèlement : une nouvelle police et une procédure plus simple 

Interrogé également sur ses mesures pour lutter contre le harcèlement sexuel, le chef de l'Etat a donné quelques pistes, qui devraient être détaillées lundi par la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. Le président de la Répblique a en effet annoncé la réorganisation de la police, avec la création d'une "police de sécurité du quotidien", dont la priorité sera la lutte contre le harcèlement, "notamment dans les transports". Le chef de l'Etat veut également "une procédure de verbalisation plus simple, immédiate". Emmanuel Macron confirme également que l'État français veut prendre une mesure symbolique contre le producteur Harvey Weinstein, accusé de faits de harcèlement, d'agressions sexuelles et de viols. "J'ai engagé la démarche pour lui faire retirer sa Légion d'honneur. Je souhaite, comme ses actes manquent à l'honneur, que nous en tirions toutes les conséquences."

5) De la fermeté sur les migrants délinquants

Deux semaines après l'attaque à la gare de Marseille qui a fait deux morts, Emmanuel Macron a dû s'expliquer sur les accusations du manque de fermeté de l'Etat. Le terroriste, en effet, avait été relâché la veille après avoir été arrêté pour un vol, et ce alors qu'il était en situation irrégulière sur le sol français. Le chef de l'Etat a ainsi promis dimanche que tous les "étrangers en situation irrégulière" qui commettent un délit "quel qu'il soit seront expulsés", promettant d'être "intraitable sur ce sujet".

"S'est installée une sorte de pratique où celles et ceux qui sont en situation illégale sur notre territoire peuvent être contrôlés plusieurs fois, parce qu'on s'est habitués à l'incapacité de les reconduire à la frontière, on ne prend plus toutes les mesures qui doivent être prises. Eh bien cela va changer", a martelé le président. "Ça veut dire aussi qu'on doit être plus efficace dans nos politiques de reconduite" à la frontière, a développé le chef de l'Etat. "On a des relations avec les pays d'origine qui n'est pas satisfaisante" car ces derniers "n'acceptent pas qu'on leur renvoie celles qui sont dans cette situation. Donc depuis plusieurs semaines, j'ai demandé au ministre de conclure des accords bilatéraux, il est en train de le faire, et d'être beaucoup plus exigeant sur ce point". "Ça ne se fera pas du jour au lendemain mais dès demain, de premières dispositions seront prises. Au début d'année prochaine, une nouvelle loi en matière d'immigration et d'asile sera prise pour durcir les règles sur ce point et nous nous mettrons en situation d'être intraitables sur ce sujet", a-t-il conclu.