La recomposition politique est encore en marche

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Alain Juppé a de nouveau ouvert la porte à une alliance avec Emmanuel Macron cette semaine. © PATRICK KOVARIK / AFP
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La République en marche! compte bien poursuivre l'élargissement de sa majorité en direction de la droite. Avec, possiblement, des rapprochements de l'UDI et d'Alain Juppé.

Beaucoup pourraient penser que l'affaire est pliée. En investissant des candidats socialistes aux législatives, en nommant au gouvernement, et notamment à sa tête, des personnalités de droite, Emmanuel Macron a entraîné une recomposition politique d'ampleur. Le départ de plusieurs responsables LR qui ont fondé un nouveau parti, Agir, l'a confirmé. Pourtant, la majorité ne compte pas s'arrêter en si bon chemin.

Revirement de l'UDI. Il faut dire que les signes encourageants se succèdent. Mardi, l'UDI a opéré un revirement notable lors de sa commission nationale d'investiture. Le parti de Jean-Christophe Lagarde a en effet décidé de soutenir deux candidats LREM pour les élections législatives partielles qui se dérouleront au mois de mars. Dans la huitième circonscription de Haute-Garonne et la deuxième de Guyane, Michel Montsarrat et Lénaick Adam, candidats de la majorité, auront donc l'appui des centristes. En juin dernier, pourtant, le parti avait présenté un candidat contre le premier et soutenu l'adversaire LR du second. Si Jean-Christophe Lagarde a prévenu, comme le rapportait L'Opinion, que ce soutien à LREM ne valait pas règle générale, et qu'il privilégierait "une approche territoriale", ce changement de pied n'en est pas moins une main tendue à LREM.

Et la majorité semble d'ailleurs prompte à la saisir. "J'apprécie ce geste, qui est une traduction du discours de dépassement politique nous portons", s'est félicité le délégué général de LREM, Christophe Castaner, dans les colonnes du Figaro.

 

Alain Juppé ouvre (de nouveau) la porte. Un autre signe, et non des moindres, est venu d'Alain Juppé. Dans une interview à la radio-télévision suisse mercredi soir, le maire de Bordeaux, qui s'est par ailleurs mis en retrait de LR en annonçant qu'il ne paierait pas sa cotisation 2018, a de nouveau posé des jalons vers une future alliance avec Emmanuel Macron pour les élections européennes de 2019. "On verra en fonction des programmes, des configurations politiques, de l'attitude que prendront différents partis", a-t-il déclaré, tout en précisant qu'il "ne soutiendrait en aucune manière un discours anti-européen" et quitterait LR "sans hésitation" si celui-ci s'aventurait de ce côté. "Je considère que la position [de LR] sur l'Europe n'est pas claire", a souligné l'ancien candidat à la primaire de droite. "On a quelques mois devant nous pour voir comment les choses vont se décanter."

Des signes, mais encore beaucoup d'incertitudes. Dans les deux cas, rien n'est encore fait pour LREM. Ce n'est pas la première fois qu'Alain Juppé sous-entend qu'une alliance est possible et le maire de Bordeaux reste prudent. Quant à l'UDI, si des discussions sont bien en cours, il n'est pas encore question de "deal", affirme un proche d'Edouard Philippe au Figaro. D'autant qu'un tel élargissement de la majorité poserait deux problèmes. D'abord, celui de la place exacte de l'UDI. S'agirait-il d'un véritable allié, à l'image du MoDem, et ce, alors que les relations entre François Bayrou et Jean-Christophe Lagarde sont tendues ? D'accords ponctuels ? Mais dans ce cas, l'UDI pourrait avoir un pied dans la majorité et un autre dans l'opposition ? Rien de tout cela n'est encore tranché.

Risques de déséquilibre. La deuxième difficulté est celle de l'équilibre que LREM souhaite conserver entre droite et gauche. Le gouvernement est déjà régulièrement accusé par l'opposition de prendre plus soin de sa droite, et même une partie des parlementaires LREM appellent de leurs vœux un rééquilibrage en faveur de mesures sociales. Un élargissement de la majorité vers l'UDI et Alain Juppé ferait donc sérieusement pencher la balance d'un côté. Une solution, pour le parti présidentiel serait d'opérer un autre rapprochement, du côté des Radicaux de gauche cette fois-ci. Ces derniers sont pour l'instant dans une attitude attentiste vis-à-vis d'Emmanuel Macron : Laurent Hénard, co-président du PRG avec Sylvia Pinel, a évoqué à la mi-janvier un "pacte" possible.

Si l'élargissement de la majorité est toujours un objectif pour le mouvement présidentiel, celui-ci ne peut se faire au détriment de ce qui reste son leitmotiv : "Et de droite, et de gauche."