ÉDITO - "Lundi soir, Emmanuel Macron doit prononcer l'allocution de sa vie"

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Jean-Michel Aphatie , modifié à

Pour l'éditorialiste d'Europe 1 Jean-Michel Aphatie, l'allocution télévisée d'Emmanuel Macron, lundi à 20 heures, est cruciale : soit il apaise, soit il déclenche une nouvelle fronde, plus forte encore que les précédentes.

"Ce soir, après l'intervention d'Emmanuel Macron, c'est la paix ou la guerre. Nous sommes devant ce que l'on pourrait appeler les vertiges de l'Histoire. On ne sait pas ce que va dire Emmanuel Macron, les informations sont très parcellaires. On ne sait pas quels mots il va mettre pour tenter de dissiper le sentiment de mépris que son action a installé depuis 18 mois. On ne sait pas ce qu'il va concéder ou pas aux 'gilets jaunes'. On va attendre 20 heures, et on en est réduits à imaginer.

Imaginons donc que le président de la République, durant son allocution, soit clair, argumenté, et précis, qu'il dégonfle le mouvement, que la contestation s'arrête. Après tout, ce n'est pas impossible, même si bien sûr les traces qui resteront seront très importantes et marqueront la fin du quinquennat. Mais c'est une éventualité, que la vie reprenne un cours un peu plus normal. Puisqu'elle était menacée, on dira que la République a été sauvée. Si ça se trouve, ce soir, on criera au génie.

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Ou alors, on peut imaginer le contraire, avec un Emmanuel Macron pas très bon dans la forme, un peu flou sur le fond. Il ne satisfera pas les revendications des 'gilets jaunes'. Là, on peut s'attendre au pire. Parce qu'il ne faut pas se faire d'illusions sur la journée de samedi que nous avons vécue. On a parlé de retour au calme, c'est très relatif. Parlez-en aux Bordelais. À Paris, il y a eu plus de commerces dévastés samedi que la semaine précédente.

Comment en est-on arrivé à ce calme relatif ? Par une mobilisation exceptionnelle, sans précédent, des forces de l'ordre : 90.000 policiers et gendarmes mobilisés. C'est un effort terrible pour la nation. On a été aux franges de l'Etat de droit, avec des interpellations dont certaines ont été très légères. C'est l'Etat de droit qui a vacillé samedi. C'est très grave ce qui se passe.

" À force de dire que la colère est légitime, la violence l'est aussi, parce qu'il n'y a pas de colère pacifique "

Si Emmanuel Macron ne satisfait les revendications des 'gilets jaunes', qui sont exorbitantes et contradictoires, on peut craindre le pire. D'autant que les souffleurs de braises sont toujours là. À force de dire que la colère est légitime, la violence l'est aussi, parce qu'il n'y a pas de colère pacifique.

Ce soir, Emmanuel Macron doit donc prononcer l'allocution de sa vie. Il tient entre ses mains le destin de la nation. Il est le Deus ex machina. Pourquoi ? À cause de son arrogance, de ses maladresses, et de son manque de clairvoyance. Il y a des situations qui sont plus encourageantes que celle que nous allons vivre ce soir."