Les députés se sont prononcés mercredi en commission contre l'interdiction de la corrida (Illustration) 1:33
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avec AFP , modifié à
Les députés se sont prononcés mercredi en commission contre l'interdiction de la corrida, rejetant une première fois la proposition de loi du député LFI Aymeric Caron. Ce vote n'empêche pas son examen dans l'hémicycle le 24 novembre, si les délais le permettent, avec un ordre du jour chargé pour parcourir les propositions du groupe LFI.

Les députés ont rejeté une première fois mercredi en commission la proposition d'interdiction de la corrida du LFI Aymeric Caron, qui a peu de chances d'aboutir, mais suscite des débats enflammés et des manifestations le week-end prochain. Les élus de la commission des Lois ont soutenu des amendements RN et LR pour supprimer le seul article du texte. Ce vote n'empêche pas son examen dans l'hémicycle le 24 novembre, si les délais le permettent, avec un ordre du jour chargé pour parcourir les propositions du groupe LFI. Sous les protestations, Aymeric Caron a aussitôt dénoncé la "grosse pression des lobbies".

Aymeric Caron a fustigé la "barbarie"

En ouverture des débats, l'ancien journaliste a fustigé la "barbarie" de la corrida, une "cérémonie hypocrite, où l'animal prétendument honoré est massacré avec une précision et un raffinement qui confinent au sadisme". Dans une ambiance grave, le député de Paris a minutieusement décrit "l'exécution" du taureau. Il a reproché aux élus pro-corrida des "manœuvres électoralistes" pour "ne pas froisser certains électeurs de régions taurines".

Son texte vise à modifier le Code pénal qui punit déjà la maltraitance animale, mais dont les sanctions prévues à l'article 521-1 "ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée". Le député LFI espère ajouter par amendement l'interdiction des combats de coqs encore autorisés dans le Nord ou certains territoires d'Outre-mer.

Une proposition qui suscite l'embarras

Sa proposition suscite l'embarras dans les groupes politiques, où la liberté de vote est de mise. Au nom de la défense d'une "tradition culturelle" dans le Sud-Ouest et le pourtour méditerranéen, le gouvernement compte s'y opposer. La secrétaire d'Etat chargée de la Ruralité, Dominique Faure, est annoncée au banc des ministres le 24 novembre, plutôt que le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, passionné de corrida.

Devant le groupe Renaissance mardi matin, Mme Faure a appelé à ne pas "tomber dans le radicalisme du député" Caron, selon une source parlementaire. "Il ne faut pas opposer émotion et attachement au terroir". Car le sujet divise les macronistes. En juillet 2021, quand elle n'était pas encore présidente des députés Renaissance, Aurore Bergé avait signé une tribune pour interdire la corrida, jugée "barbare". Mais en commission, la députée Marie Lebec s'est opposée à la "radicalité" de la proposition d'Aymeric Caron. "Quelle sera la prochaine tradition régionale que nous interdirons ?", a-t-elle mis en garde.

A l'extrême droite, le RN Timothée Houssin a reconnu les divergences dans son groupe. Il a accusé M. Caron "d'extrémisme" par son "agenda antispéciste" qui pousserait à "interdire" demain "foie gras", "balade en poney", "chasse" puis "pêche tout court". Marine Le Pen, qui fait de la cause animale l'un de ses marqueurs, propose depuis plusieurs années d'interdire la corrida aux mineurs.

Parfois électrique, la discussion a souvent tourné au pour ou contre Aymeric Caron. A droite, la LR Anne-Laure Blin lui a reproché de chercher le "sensationnel". Elle a défendu une "culture populaire", un "art et une identité régionale", soulignant les "milliers de terres sanctuarisées" grâce à "l'élevage des taureaux sauvages". A gauche, le PS est "partagé", quand LFI et écolos soutiennent l'interdiction.

L'examen complet du texte et ses amendements demeure incertain le 24 novembre. Après des propositions comme le Smic à 1.600 euros ou l'inscription de l'IVG dans la Constitution, il figure en effet en quatrième position dans la "niche" LFI, une journée réservée à un groupe minoritaire, avec une clôture des débats à minuit. "Il faut quand même qu'il y ait du social d'abord dans notre niche !", assume un élu LFI, sceptique sur l'interdiction de la corrida. "Il ne faut pas prendre à rebrousse-poil les gens qui tiennent à ça", prévient cet insoumis, même s'il votera le texte.

Des mobilisations prévues ce week-end

Samedi, des élus de tous bords et aficionados vont défendre la corrida dans plusieurs villes taurines. Des associations de protection des animaux promettent à l'inverse des manifestations contre cette pratique samedi et dimanche, dont "une action à fort impact visuel" à Paris.

Coutumière des vidéos choc, l'association L214 a diffusé dans la nuit des images de "mises à mort laborieuses de taureaux" lors d'une corrida à Brocas (Landes) le 24 septembre, pour soutenir l'interdiction. "En dehors de toute considération politique", Brigitte Bardot a apporté son soutien à Aymeric Caron, avec sa fondation pour la cause animale.