Bernard Cazeneuve Premier ministre : pourquoi c'est lui

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Par son style, tout en sobriété et en retenue, et sa fidélité, Bernard Cazeneuve a convaincu François Hollande de le nommer à Matignon. © STEPHANE DE SAKUTIN / POOL / AFP
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François Hollande a décidé de nommer le ministre de l’Intérieur à Matignon, mardi, en remplacement de Manuel Valls. Un choix dicté par la raison plus que par les symboles. 

Sauf improbable rebondissement, ce sera finalement lui le dernier Premier ministre du quinquennat de François Hollande. Le président de la République a nommé mardi matin Bernard Cazeneuve à Matignon en remplacement de Manuel Valls, officiellement candidat à la présidentielle depuis la veille. D’autres personnalités étaient pressenties, dont deux femmes, Marisol Touraine et Najat Vallaud-Belkacem, mais à ces choix symboliques, François Hollande a préféré miser sur la sécurité. Bernard Cazeneuve représente en effet, à bien des égards, le choix de la raison pour le chef de l’Etat.

  • En première ligne sur la lutte contre le terrorisme

 Nommer Bernard Cazeneuve Premier ministre, c’est réaffirmer en creux que la lutte contre le terrorisme sera la priorité de la fin de ce quinquennat. Car c’est bien lui qui, depuis son arrivée place Bauveau, est en première ligne sur ces questions. Il a notamment eu à gérer les attaques de Charlie Hebdo et de l’Hypercasher en janvier 2015, les attentats de novembre à Paris et Saint-Denis, et le drame de Nice, le 14 juillet dernier. Sous son autorité, les services de renseignement et de police ont aussi déjoué d’autres attentats potentiels.

Délester le ministère de l’Intérieur du titulaire du portefeuille pourrait d’ailleurs sembler étrange, voire risqué, mais il est fort à parier que Bernard Cazneuve gardera dans l’ensemble la main sur les dossiers de lutte contre le terrorisme. Un temps d’ailleurs, il était envisagé qu’il cumule les fonctions de Premier ministre et de ministre de l’Intérieur. Mais la nomination de Bruno Le Roux, fidèle de François Hollande, place Bauveau, ne bouleverse pas la donne. Le vrai chef de la sécurité intérieure, ce sera bel et bien Bernard Cazeneuve.

  • Un ministre respecté, même à droite

 Loyal, avare, contrairement à certains de ses petits camarades, de petites phrases assassines, Bernard Cazeneuve est présent dans le gouvernement depuis l’élection de François Hollande, en mai 2012. Ils ne sont que six dans ce cas. C’est dire que le nouveau Premier ministre s’est révélé être un collaborateur solide, lors de ses passages successivement aux Affaires européennes, au Budget, puis, évidemment à l’intérieur.

C’est surtout place Bauveau qu’il a gagné ses galons de ministre très respecté, parfois même jusque dans l’opposition. Sa sobriété et son sens de l’action face aux événements dramatiques qui ont frappé le pays ont impressionné. Au point que, au-delà des réactions assassines attendues à droite, certains ont salué sa nomination. C’est le cas par exemple de François Bayrou, président du MoDem, de Dominique Bussereau, député Les Républicains de Charente-Maritime, ou encore d’Yves Jégo, vice-président de l’UDI.

  • Un Hollandais récent mais indispensable

Deux fois députés de la Manche, entre 1997 et 2002 puis entre 2007 et 2012, maire de Cherbourg-Octeville entre 2001 et 2012, Bernard Cazeneuve appartient à l’origine à l’écurie de Laurent Fabius. Son (ancien) mentor n’étant pas candidat à la primaire du PS en 2011, il observe une sage neutralité. Après sa victoire, le candidat Hollande, soucieux de rassembler, le nomme porte-parole de sa campagne. Et c’est logiquement qu’il entre au gouvernement en mai 2012, aux Affaires européennes, sous la houlette de… Laurent Fabius.

Puis, au gré des circonstances, il grimpe dans la hiérarchie gouvernementale. Après le scandale Cahuzac, il devient titulaire du portefeuille ô combien sensible du Budget. Son sens de la négociation y fait merveille. Puis quand Manuel Valls est nommé à l’Elysée, il récupère l’Intérieur. C’est là, face aux épreuves, face aux attentats qui frappent la France, qu’il noue une relation très forte avec François Hollande. C’est là aussi que son style, tout en retenue, en contrôle, fait mouche. C’est là aussi qu’il devient, aux yeux de l’opinion, un visage identifié.

Dès lors, sa fidélité à François Hollande est indéfectible. Et il fallait une bosse dose de loyauté pour accepter de devenir Premier ministre en étant assuré, à cinq mois de l’élection présidentielle, de devenir le titulaire le plus éphémère du poste de l’Histoire de la 5ème République. Un sacré sens du sacrifice.