Mariage gay : toujours pas d'union à droite

L'UMP risque d'avoir des difficultés à trouver une stratégie commune, face à la proposition de légaliser le mariage gay, réaffirmée vendredi par la ministre de la Famille Dominique Bertinotti.
L'UMP risque d'avoir des difficultés à trouver une stratégie commune, face à la proposition de légaliser le mariage gay, réaffirmée vendredi par la ministre de la Famille Dominique Bertinotti. © MAXPPP
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Le gouvernement veut légaliser le mariage et l'adoption des gays d'ici un an. L'opposition est divisée.

Le mariage gay ne fait pas l'unanimité derrière lui à droite. Et l'UMP risque d'avoir des difficultés à trouver une stratégie commune face à la proposition de la ministre de la Famille Dominique Bertinotti. Cette dernière assure, dans une interview au journal Le Parisien-Aujourd’hui en France, que le gouvernement tiendra l’engagement de l’actuel président de la République, qui prévoit l’ouverture du mariage aux couples homosexuels.

"Dans un an, les personnes de même sexe qui le souhaitent pourront se marier et adopter ensemble", affirme la ministre. Selon elle, les homosexuels doivent avoir les mêmes droits et les mêmes devoirs que tout couple marié. Si les socialistes semblent d'accord là-dessus, l'argument rend la droite mal à l'aise.

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© EUROPE 1

Ils sont pour

"L'UMP n'a jamais dit non au mariage gay, assure vendredi Rachida Dati sur Europe1. C'est une évidence que les couples homosexuels aient les mêmes droits, aujourd'hui", défend-elle. Mais la députée européenne joue sur les mots.

Plusieurs personnalités se sont effectivement prononcées "pour" au sein de l'UMP et ses alliés.  C'est le cas par exemple de Roselyne Bachelot, Laurent Wauquiez, Benoist Apparu, Nadine Morano, Franck Riester, Luc Chatel ou encore Chantal Jouanno, Henriette Martinez, Benjamin Lancar, Laurent Hénart, Jean-Louis Borloo et Yves Jégo.

"Je respecte l’opinion de celles et ceux qui sont contre mais, pour moi, l’autorisation du mariage civil entre deux personnes qui s’aiment, quelle que soit leur orientation sexuelle, serait une avancée majeure sur le terrain des droits dans notre pays. C’est même dans la tradition de notre République laïque puisqu’il s’agit avant tout d’égalité", avait argumenté le 11 juin 2011 le député UMP de Seine et Marne, Franck Riester, interrogé par le JDD.

En novembre dernier, six secrétaires nationaux de l'UMP avaient même signé une tribune dans l'Express en faveur d'une légalisation.

Mais ces partisans du mariage homo ne font pas l'unanimité. Et si l'UMP n'a effectivement jamais "dit non" comme le soutient Rachida Dati, c'est qu'aucune ligne officielle n'a jamais été adoptée.

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Ils se cherchent…  

Et pour cause, de nombreux cadres restent encore flous sur la question. Au premier rang desquels le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé. "Cette proposition (de légaliser le mariage gay) est parfaitement respectable, elle est dans le débat. C'est un débat politique qu'on aura le moment venu", déclarait-il en novembre.

Mais ce dernier ne semble pas pressé d'aborder ce débat. Après la publication de la tribune des députés UMP dans l'Express, Jean-François Copé et la direction du parti avaient fait circuler une consigne claire : éviter les sujets de société pendant la présidentielle.

La direction de l'UMP avait même "invité" le président des jeunes pop' Benjamin Lancar à retirer sa signature de cette fameuse tribune. "Le sujet ne fait pas du tout l'unanimité", reconnaissait Jean-François Copé en novembre.

Le deuxième ténor du parti à avoir une position ambigüe sur le sujet est Nicolas Sarkozy lui-même. En 2006, l'ancien président de la République avait en effet défendu un "contrat d’union civique", mais avait dû y renoncer devant la levée de boucliers dans son propre camp. En 2007, dans le magazine pour homosexuel Têtu, il déclarait que l'impossibilité pour les homosexuels de s'unir civilement constituait une discrimination et une "injustice majeure". Et en janvier dernier, plusieurs députés cités par Libération affirmaient même qu'il inscrirait le mariage gay dans son programme présidentiel de 2012.

Mais la rumeur avait fait long feu. "Je n'y suis pas favorable", avait répondu l'ancien chef de l'Etat, interrogé par le Figaro Magazine sur le mariage homosexuel, en février. "En ces temps troublés où notre société a besoin de repères, je ne crois pas qu'il faille brouiller l'image de cette institution sociale essentielle qu'est le mariage. De plus le mariage gay ouvrirait la porte à l'adoption", s'était-il justifié.

Boutin TF1

© Capture écran

Ils sont clairement contre

La dernière fois que l'UMP a eu à se prononcer clairement sur le sujet, c'est en juin 2011. Les députés du parti avaient alors largement rejeté à l'Assemblée une proposition de loi du groupe socialiste, visant à autoriser le mariage aux couples de même sexe.

Parmi eux se trouvait Xavier Bertrand. L'ancien secrétaire général de l'UMP est un opposant de longue date au mariage homosexuel et au droit à l’homoparentalité. En 2009, il avait été interrogé alors qu’un projet de loi UMP sur le statut des beaux-parents était discuté. "Ce texte ne vise pas à entrer dans une logique qui serait une logique de mariage homosexuel ou d'adoption par les couples homosexuels, ce ne sont pas mes convictions, ce ne sont pas les convictions de ma famille politique", avait-il alors affirmé, avant d’enfoncer le clou dans un entretien à La Croix. "Je ne suis pas favorable au mariage gay, la famille a besoin de repère", y déclarait-il.

Bien plus radical, mais plus à l'UMP non plus, on trouve bien entendu l'ancien député du Nord, Christian Vanneste. Les propos anti-mariage gay, mais également anti-homosexuels tout court jalonnent sa carrière politique. Son premier coup d'éclat remonte à décembre 2004, quand il déclare sur TF1 : "L'homosexualité est un comportement culturel, acquis, de l'ordre du réflexe […], mais comme tous les comportements réflexes plutôt négatifs, on peut parfaitement l'inhiber ou le rééduquer."

En juin 2011, lors du débat sur le projet de loi socialiste à l'Assemblée, il allait encore plus loin. "Je ne vois pas en quoi l'Assemblée nationale doit s'intéresser à une aberration anthropologique. La société doit assurer sa pérennité par le mariage des hommes et des femmes, affirmait-il alors dans les couloires de l'Assemblée. Ce n'est pas parce que quelques personnes ont des comportements, disons 'curieux', que forcément la société doit s'en préoccuper. C'est du plaisir sexuel, c'est du divertissement, de l'affection. En quoi cela intéresse la société?"

Et en février dernier, il avait quitté le parti qui était sur le point de l'exclure, après qu'il avait déclaré que la déportation des homosexuels durant la seconde guerre mondiale était une "légende".

Du côté des alliés de l'UMP enfin, la présidente du Parti chrétien-démocrate (PCD) Christine Boutin est l'une des plus farouches opposantes au mariage homo, qu'elle qualifie de "provocation". "Malmener cette institution par la célébration d'un mariage entre deux personnes du même sexe, même si cette union n'a aucune valeur juridique, met en danger un pilier essentiel de notre modèle sociétal, dans un monde déjà déboussolé qui a besoin plus que jamais de repères stables."