Bruno Patino 1:51
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Céline Brégand , modifié à
Face à la concurrence des plateformes de streaming comme Netflix et aux nouvelles habitudes des téléspectateurs, Arte a choisi de développer une nouvelle stratégie de diffusion de ses séries. Bruno Patino, directeur éditorial d'Arte France, s'en explique au micro d'Europe 1. 
INTERVIEW

Invité de Culture Médias jeudi matin, Bruno Patino, directeur éditorial d'Arte France et directeur de l'école de journalisme de Sciences Po, a expliqué au micro de Philippe Vandel la stratégie d'Arte quant à la diffusion de ses séries. Une vision qui donne la part belle au site d'Arte afin de s'adapter aux nouvelles habitudes des téléspectateurs. 

Une nouvelle série française réalisée par Fabrice Gobert, avec Marina Hands et Mathieu Demy, sera prochainement diffusée sur la chaîne Arte. Mais alors que la première diffusion cathodique de cette série est prévue pour le 10 octobre prochain, tous les épisodes sont déjà disponibles sur la plateforme arte.tv. Une stratégie assumée par la chaîne qui s'adapte aux nouveaux usages du public, habitué aux plateformes de streaming comme Netflix. "Notre stratégie est extrêmement simple : de plus en plus, notre site arte.tv est une chaîne non linéaire. Elle se déconnecte de ce qui se passe à la télé," résume Bruno Patino, le directeur éditorial d'Arte France.

Il constate : "La télévision linéaire reste une télévision d'habitude qui s'adresse à une population qui n'est pas forcément parmi la plus jeune dans ses usages. En revanche, la destination numérique arte.tv est un site de destination où l'âge moyen est beaucoup plus jeune car porté par les nouveaux usages." 

"Notre idée quand on pousse quelque chose éditorialement, est de le pousser de la meilleure façon possible sur les deux usages. Quand vous commencez à entrer dans le paysage mental des gens, il n'y a aucune raison que la diffusion antenne soit le signal de départ", affirme ce spécialiste du numérique.  

Habitude vs. addiction 

Bruno Patino s'est penché sur le phénomène de l'addiction aux séries, qui repose sur un effet découvert en 1929 par Bluma Zeigarnik, une psychologue russe. "C'est l'effet de complétude découvert par les neurosciences qui dit que l'être humain aime bien finir une tâche même quand la tâche ne l'intéresse pas vraiment", explique Bruno Patino, qui ajoute : "On a découvert qu'avec certaines sollicitations, certains signaux, ça nous pousse à compléter. Le binge-watching nous pousse à aller à la fin de la saison même si on n'a pas franchement envie. Il y a de plus en plus de séries qui jouent sur cet effet là."  

Bruno Patino distingue l'habitude de l'addiction : "La série a toujours parié sur l'habitude. Vous avez plusieurs arches narratives qui se déploient. Des arches bouclées, d'autres qui ne sont pas bouclées et qui vous poussent à prendre rendez-vous avec vos personnages ou avec votre histoire. Pendant très longtemps, la télévision, comme elle se programmait avec un épisode chaque semaine, développait cette idée d'habitude", note-t-il. Mettant ainsi en opposition les plateformes qui "poussent plutôt à aller vers l'addiction, c'est-à-dire faire en sorte que vous enchaîniez, que vous ne puissiez pas attendre une semaine".