Violences sexuelles : Mukwege et Murad reçoivent leur Nobel

 Le gynécologue de 63 ans et la jeune Irakienne de 25 ans se verront remettre le prix lors d'une cérémonie débutant à 13h à l'Hôtel de ville d'Oslo.
Le gynécologue de 63 ans et la jeune Irakienne de 25 ans se verront remettre le prix lors d'une cérémonie débutant à 13h à l'Hôtel de ville d'Oslo. © Frederick FLORIN / AFP
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avec AFP , modifié à
Les prix Nobel des autres disciplines seront également remis ce lundi à Stockholm, à l'exception notable de celui de Littérature.

Le médecin congolais Denis Mukwege et la Yazidie Nadia Murad, ex-esclave des djihadistes devenue militante, reçoivent ce lundi le Nobel de la paix, l'occasion pour eux de dénoncer l'impunité entourant le viol employé comme arme de guerre. Le gynécologue de 63 ans et la jeune Irakienne de 25 ans se verront remettre le prix récompensant leur engagement contre les violences sexuelles en temps de conflit, lors d'une cérémonie débutant à 13h à l'Hôtel de ville d'Oslo.

"Il est temps d'agir". "La dénonciation ne suffit plus, il est temps d'agir", a lancé Denis Mukwege dimanche lors d'une conférence de presse. "La transformation de corps de femmes en champ de bataille est tout simplement un acte inadmissible à notre siècle". Surnommé "l'homme qui répare les femmes", le médecin soigne depuis deux décennies les victimes de violences sexuelles dans son hôpital de Panzi dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), région déchirée par des violences chroniques. Depuis sa création en 1999, l'établissement a traité plus de 50.000 femmes, enfants et même nourrissons, aux corps meurtris.

"Le sommet de l'iceberg", a affirmé Denis Mukwege, "ce sont des femmes qui ont pu se déplacer jusqu'à l'hôpital mais, souvent, il y en a qui ne peuvent pas ou qu'on n'a pas réussi à trouver". "Quand vous voyez un petit bébé innocent mais en sang avec les organes génitaux en lambeaux, vous vous posez des questions sur l'humanité", a-t-il confié.

"Les viols se poursuivent en tant qu'arme de guerre". Comme des milliers d'autres femmes yazidies, sa colauréate Nadia Murad a été enlevée, violée, torturée et échangée par les djihadistes du groupe État islamique (EI) après leur offensive contre cette communauté kurdophone du nord de l'Irak en 2014.  Ayant réussi à s'évader, la jeune femme, dont la mère et six frères ont été tués, est devenue ambassadrice de l'ONU pour la dignité des victimes du trafic d'êtres humains et se bat aujourd'hui pour que les persécutions de son peuple soient reconnues comme génocide.

"Ce prix Nobel ne fera pas disparaître les violences, ni les attaques sur les femmes, les femmes enceintes, les enfants, les bébés, mais notre objectif, c'est que ce prix ouvre des portes", a-t-elle dit dimanche. "Aucun membre de l'État islamique n'a été traduit en justice. Ils ne sont plus en Irak mais nous voyons que les viols se poursuivent en tant qu'arme de guerre", a-t-elle souligné. "Il faut vraiment que justice soit faite à un moment ou un autre". Si 4.300 Yazidies se seraient échappées ou auraient été rachetées à l'EI, 2.500 seraient encore "disparues", selon la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH). Mandatée pour enquêter sur les exactions commises par les jihadistes en Irak, une équipe de l'ONU doit entamer ses investigations sur le terrain début 2019. 

Une médaille d'or. Les Nobel des autres disciplines seront également remis ce lundi à Stockholm, à l'exception notable de celui de Littérature, reporté à 2019 à cause d'un scandale de viol ayant secoué l'Académie suédoise. Le prix consiste en une médaille d'or, un diplôme et un chèque de 9 millions de couronnes suédoises (872.000 euros).