Que sait-on du MS-13, le gang salvadorien ultra-violent honni par Donald Trump ?

Les membres du gang sont reconnaissables à leur tatouages, comportant souvent le nom de leur groupe (image d'archives).
Les membres du gang sont reconnaissables à leur tatouages, comportant souvent le nom de leur groupe (image d'archives). © AFP
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M.L
Le groupe multiplie les crimes à la machette ou à la batte de baseball malgré la promesse du président américain de le faire "disparaître des rues" américaines.

On les reconnaît à leurs tatouages, souvent sur le visage. Deux lettres et deux chiffres : MS-13. Signe de l'appartenance au gang ultra-violent du même nom, d'origine hispanique et en cela directement lié au "laxisme" migratoire selon  Donald Trump. Au printemps, le président américain a promis de faire "disparaître des rues", en vain : malgré de vastes opérations de police, ses membres continuent de perpétrer des crimes sanglants, comme celui d'un homme lardé de plus de 100 coups de couteau et dont le cœur a été arraché, début septembre. Zoom sur ce gang fort d'environ 10.000 membres, éparpillés dans  une quarantaine d'États de la première puissance mondiale.

"Le gang salvadorien". Los Angeles, début des années 1980. Les immigrés salvadoriens, qui ont fui leur pays en proie à une guerre civile, cherchent à se protéger des bandes armées américaines, déjà implantées dans la ville. Ils créent le MS-13, abréviation de Mara Salvatrucha ("le gang salvadorien"), dont beaucoup de membres ont combattu dans leur pays d'origine. Rapidement, ces hispanophones sont rejoints par des ressortissants d'autres pays d'Amérique centrale.

Une partie d'entre eux sont expulsés dans les années 1990 et 2000 vers le Salvador, le Guatemala et le Honduras. Paradoxalement, la démarche les renforce et contribue à faire du nord du continent une des régions les plus mortifères du monde. L'organisation devient maîtresse dans l'art de faire revenir aux Etats-Unis  ses expulsés, appuyés par ces nouveaux soutiens dans leurs pays d'origine. Elle se fait aussi une réputation liée à son extrême violence, signant régulièrement ses meurtres à la machette.

En vingt ans, l'emprise du gang s'étend à toute l'Amérique Centrale, avec des ramifications allant même jusqu'au Canada ou en Espagne. "Les membres sont très unis et souvent dirigés par des chefs emprisonnés au Salvador, qui les incitent à recruter toujours plus. On voit se mettre en place un mécanisme très agressif en interne, avec une discipline passant par la violence physique, voire le meurtre en cas de non-respect des règles ou de trahison", explique Ron Hosko,  un ancien responsable du FBI, interrogé par Fox Business.

"Ils recrutent très jeune". Le MS-13 profite aussi de la vulnérabilité de milliers de mineurs qui traversent seuls la frontière, pour les enrôler à leur arrivée aux Etats-Unis. "Ils recrutent très jeune. Dans un cas, on a même vu un membre de 10 ans", a récemment détaillé devant le Sénat américain Timothy Sini, chef de la police du comté de Suffolk, une région de l'État de New-York où le gang est actif. Dans ce comté, l'âge moyen des membres du gang arrêtés par les autorités est de 18 ans.

En mai 2017, la police américaine des frontières a annoncé avoir interpellé près de 1.100 personnes faisant partie du MS-13 - ou y étant "rattachés - en un mois. Les deux tiers se sont avérées être de nationalité américaine. Qu'importe pour Donald Trump, voyant dans les exactions du groupe une justification au durcissement de sa politique migratoire. Le MS-13 "a littéralement pris le pouvoir dans des villes et villages américains", affirmait le président au printemps, accusant son prédécesseur de négligence. Et d'évoquer à nouveau son projet de "mur" à la frontière mexicaine, afin d'empêcher la venue de "membres très nuisibles" du gang.

"Tuer, voler, violer, contrôler". Des propos qui n'ont pas empêché une multiplication des meurtres sordides commis par le groupe ces derniers mois. À Houston, au Texas, deux adolescentes ont été kidnappées, retenues captives et violées par des membres du MS-13, dont le mot d'ordre est "mata, roba, viola, controla" (tuer, voler, violer, contrôler) en avril, rappelle Paris Match. L'une d'entre elles a été tuée par balles et son corps abandonné le long d'une route. Quelques mois plus tôt, deux jeunes femmes étaient assassinées en pleine rue à coups de batte de baseball à Brentwood, une ville de la grande banlieue de New York. Leurs corps étaient retrouvés découpés à la machette.

"Le MS-13 est une marque criminelle reconnue, qui sème la terreur et utilise la peur comme arme", ce qui explique que la Maison-Blanche l'ait prise pour cible, estime Samuel Logan, auteur d'un livre sur le sujet. Le gang n'est pas un à proprement parler cartel de drogue, même s'il se finance en partie avec du petit trafic de stupéfiants. Il pratique aussi l'extorsion, le trafic d'êtres humains et la prostitution.

"Un problème de long terme". "Les gens ont tendance à ne parler d'eux que comme un groupe d'immigrés illégaux, et c'est en partie le cas", souligne Wes McBride, directeur exécutif de la California Gang Investigators Association, interrogé par le Daily Signal. "Mais beaucoup d'entre eux sont nés ici : c'est la deuxième génération. Nous sommes face à un problème de long terme, sans solution simple."

Comme d'autres policiers des États où se déploie le MS-13, Timothy Sini souligne, de son côté, les risques d'un durcissement de la politique migratoire, qui risque de réduire au silence les hispaniques sans papiers, principales victimes du gang. "Lorsque des gens pensent qu'ils ne peuvent pas coopérer avec les autorités en raison de leur statut migratoire, la mission de la police et la sécurité de tous se retrouvent menacées", a-t-il prévenu devant le Sénat. En mai, lors de l'arrestation d'une vingtaine de membres du groupe, un responsable de la police locale, interrogé par Le Los Angeles Times, renchérissait : "Ils les volent, ils les violent, ils les tuent. Sans la coopération des immigrés comme témoins, on n'arriverait à rien."