Critique du pouvoir saoudien, le journaliste Jamal Khashoggi avait été assassiné le 2 octobre 2018. 1:23
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Laetitia Drevet avec AFP
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, a "validé" l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, ont affirmé les Etats-Unis vendredi. Pourtant, aucune sanction n'a  été prise contre le prince héritier. "Joe Biden a besoin de l’Arabie Saoudite"', explique la politologue Nicole Bacharan.
ANALYSE

Tout sauf une crise ouverte. Les Etats-Unis ont publiquement accusé vendredi le prince héritier d'Arabie saoudite d'avoir "validé" l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en 2018, sanctionnant certains de ses proches, sans aller jusqu'à punir le puissant dirigeant dans l'espoir d'éviter la "rupture" avec cet allié-clé. "Joe Biden prend prudemment ses distances avec cette affaire", analyse Nicole Bacharan, politologue spécialiste des Etats-Unis, invité d'Europe 1 samedi. 

"Joe Biden a besoin de l’Arabie Saoudite"

Le rapport, déclassifié à la demande du président Joe Biden alors que son prédécesseur Donald Trump l'avait gardé secret, souligne que le jeune dirigeant saoudien disposait d'un "contrôle absolu" des services de renseignement et de sécurité, "rendant très improbable" une telle opération sans son "feu vert". Ryad a "rejeté totalement les conclusions fausses et préjudiciables". Bien que directement mis en cause, Mohammed ben Salmane ne fait pas partie des personnes sanctionnées. 

"Cela fait longtemps qu’on sait que toute l'affaire vient directement d’en haut. Mais il n'y aura pas de sanctions directes contre le prince lui-même parce que Joe Biden a besoin de l’Arabie Saoudite pour contenir l’Iran, pour lutter contre les groupes terroristes, pour poursuivre les négociations dans tout le Moyen-Orient dans le cadre d'accords de paix avec Israël. Par peur, aussi, que les Saoudiens se rapprochent de la Chine", explique Nicole Bacharan. 

Changement de cap

Avant son élection en novembre, Joe Biden avait jugé que le royaume du Golfe devait être traité comme un Etat "paria" pour cette affaire et que les responsables du meurtre devaient en "payer les conséquences". Mais devenu président, il a tenté de déminer le terrain en appelant jeudi le roi Salmane. "L’exercice du pouvoir est plus difficile dans le monde réel", remarque la politologue.   

Après avoir nié l'assassinat du journaliste pendant plusieurs semaine, Ryad avait fini par dire qu'il avait été commis par des agents saoudiens ayant agi seuls. A l'issue d'un procès opaque en Arabie saoudite, cinq Saoudiens ont été condamnés à mort et trois autres à des peines de prison. Les peines capitales ont depuis été commuées.