Italie : en Calabre, un juge se bat pour éloigner les enfants de leurs familles mafieuses

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Virginie Riva, édité par A.H. , modifié à
Le juge italien Roberto di Bella s'est donné pour mission d'éloigner les enfants de leurs familles mafieuses afin de leur offrir un autre avenir.
REPORTAGE

Il a décidé de briser de l'intérieur la puissante mafia 'Ndrangheta, la plus puissante des mafias contemporaines, implantée en Calabre, dans le sud de l'Italie. Pour s'attaquer à ce système mafieux, qui a la particularité d'être composé de familles, le magistrat Roberto di Bella éloigne les enfants de l'endoctrinement qu'ils subissent dès leur naissance. Europe 1 l'a rencontré.

Des menaces au quotidien. En observant le dispositif de sécurité qui l'entoure dans le tribunal pour mineurs, on comprend tous les risques que cet homme prend. Roberto di Bella est sous escorte 24 heures sur 24. La porte de son bureau est impossible à ouvrir de l'extérieur. C'est lui qui la commande grâce à un bouton placé sous son bureau. Ce magistrat reçoit des menaces quotidiennement, depuis qu'il a compris que la seule solution était d'éloigner les enfants de leurs familles pour leur éviter un destin tout tracé, le mariage forcé, la mort ou la prison. "Je me suis retrouvé à juger les enfants de ceux que j'avais jugés il y a vingt ans. Ce jour-là, j'ai compris que la mafia, on en héritait", assure-t-il au micro d'Europe 1.

Une action qui porte ses fruits. Depuis, Roberto di Bella a éloigné 40 enfants de leurs familles, envoyés souvent dans le nord de l’Italie. C'est au moment où ils sont arrêtés pour des délits mafieux que le juge di Bella peut intervenir et les arracher à leur quotidien. Et son action commence à payer. Sa plus grande victoire, c'est lorsqu'il a reçu en décembre une lettre d'un mafieux en détention. "Cet homme, condamné à tellement d'années de réclusion, m'a écrit en me remerciant d'avoir éloigné son fils de la Calabre. Il a même écrit que si lui-même avait eu cette opportunité, il n'en serait certainement pas là", confie le magistrat. Plus significatif encore, les mères, elles-mêmes victimes de ce système, sont de plus en plus nombreuses à venir le voir en secret, avant même l'arrestation de leurs enfants.