Guerre en Ukraine : ce qu'il faut retenir au 373e jour de l'invasion russe

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La visite du ministre russe de la Défense intervient alors que des combats acharnés continuent pour le contrôle de Bakhmout, dans la région de Donetsk. © ANATOLII STEPANOV / AFP
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avec AFP , modifié à
Au 373e jour de l'invasion russe, le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou a inspecté un "poste de commandement" sur le front dans l'est de l'Ukraine au moment où fait rage la bataille pour la ville-symbole de Bakhmout. De son côté, la présidente du Parlement européen espère l'ouverture de négociations d'adhésion à l'UE cette année.
L'ESSENTIEL

Le ministre russe de la Défense a mené une inspection sur le front dans l'est de l'Ukraine, a indiqué samedi son ministère, au moment où fait rage la bataille pour la ville-symbole de Bakhmout et que Washington a annoncé une nouvelle aide militaire à Kiev. Le ministère russe de la Défense a indiqué que Sergueï Choïgou avait "inspecté un poste de commandement sur le front", dans "la direction Donetsk-Sud", sans préciser le lieu exact, ni la date de cette visite. Le ministère a publié une vidéo montrant Sergueï Choïgou voyageant à bord d'un hélicoptère, puis s'entretenant avec un militaire devant des bâtiments endommagés, sous la garde d'un soldat.

Les principales informations à retenir :

  • Le ministre russe de la Défense a effectué une visite risquée au front Est de l'Ukraine
  • Bakhmout, épicentre des combats, est "pratiquement encerclée" selon les affirmations de vendredi du groupe Wagner
  • Roberta Metsola a indiqué "avoir l'espoir" que des négociations d'adhésion pourront s'ouvrir cette année entre Kiev et l'Union européenne
  • La centrale nucléaire de Zaporijjia est devenue une "base militaire russe", selon un responsable ukrainien

Bakhmout "pratiquement encerclée" selon Wagner

La veille, le groupe paramilitaire Wagner, qui accuse régulièrement le commandement de l'armée russe de ne pas lui fournir suffisamment de soutien, a affirmé avoir "pratiquement encerclé" Bakhmout, dans la région de Donetsk, et a appelé le président Volodymyr Zelensky à sonner le retrait de ses troupes. Alors que les combats sont acharnés dans cette zone, le président Joe Biden a annoncé vendredi une nouvelle aide militaire à l'Ukraine de 400 millions de dollars, lors de la visite à Washington du chancelier allemand Olaf Scholz. L'aide militaire occidentale à l'Ukraine a été cruciale pour permettre à Kiev de résister aux troupes russes et même de regagner du terrain, mais le Kremlin a déclaré que cette aide ne ferait que "prolonger le conflit".

Washington a néanmoins annoncé ce nouveau soutien militaire, incluant des munitions, notamment pour le système de roquettes Himars que les forces ukrainiennes ont utilisé avec un effet dévastateur sur les troupes et lignes logistiques russes. Sur Twitter, le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov, a remercié les Etats-Unis et salué un nouvel "investissement solide pour les futurs succès de l'armée ukrainienne sur le champ de bataille". De son côté, Volodymyr Zelenski a rencontré samedi à Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola. "L'Ukraine a comme objectif (...) de commencer les négociations pour rejoindre l'UE dès cette année", a-t-il indiqué, dans un message sur Telegram.

150 attaques russes repoussées lors des dernières 24 heures

La bataille pour Bakhmout, ville industrielle dont l'importance stratégique est contestée, dure depuis l'été. La cité est devenue un symbole, car elle est l'épicentre des combats entre Russes et Ukrainiens depuis des mois. Ces dernières semaines, les forces russes ont progressé, coupant trois des quatre routes d'approvisionnement ukrainiennes et rendant la position des défenseurs de plus en plus précaire. "Les unités de Wagner ont pratiquement encerclé Bakhmout, il ne reste plus qu'une seule route" pour en sortir, a souligné vendredi le patron de Wagner, Evguéni Prigojine, dans une vidéo publiée par son service de presse.

En tenue de combat, Evguéni Prigojine a appelé Volodymyr Zelensky, qui avait juré de défendre Bakhmout "aussi longtemps que possible", à donner l'ordre aux troupes ukrainiennes de se retirer de la ville. Samedi, l'état-major de l'armée ukrainienne a indiqué avoir repoussé plus de 150 attaques russes lors des dernières 24H et précisé que, dans la zone de Bakhmout, "l'ennemi ne cesse pas d'essayer d'encercler la ville". L'armée russe n'a pas mentionné la situation à Bakhmout dans son compte-rendu samedi, indiquant seulement que des "opérations actives" se poursuivaient dans la "direction de Donetsk", où se trouve la cité.

De son côté, le ministère britannique de la Défense a souligné samedi que les défenseurs ukrainiens de Bakhmout "subissaient une pression croissante, avec des combats intenses dans et autour de la ville". Selon cette source, l'armée régulière russe et le groupe Wagner ont progressé dans la banlieue nord de la cité, qui est désormais "un saillant vulnérable à des attaques venant de trois côtés". "L'Ukraine renforce la zone avec des unités d'élite et, lors des 36 dernières heures, deux ponts clé à Bakhmout ont été détruits, notamment un pont vital reliant la cité à la dernière principale route de ravitaillement", a indiqué le ministère britannique.

Rheinmetall en discussion pour construire une usine de chars en Ukraine

Le groupe allemand d'armement Rheinmetall mène des discussions "prometteuses" avec Kiev concernant la construction en Ukraine d'une usine de fabrication de chars dont le pays a besoin pour repousser l'invasion russe, a déclaré son président dans un entretien paru samedi. "Une usine de Rheinmetall peut être construite en Ukraine pour environ 200 millions d'euros" avec l'objectif de produire jusqu'à 400 chars de combat de type Panther par an, a déclaré Armin Papperger au journal "Rheinische Post". Le patron a dit s'attendre à une décision "dans les deux prochains mois".

L'usine pourrait "sans difficulté" être protégée des attaques russes via des systèmes de défense anti-aériens. L'Ukraine a besoin selon lui de 600 à 800 chars pour l'emporter contre les forces russes, d'où la nécessité de produire rapidement de nouveaux blindés. "Même si l'Allemagne mettait à disposition (de l'Ukraine) les 300 chars Leopard 2 de la Bundeswehr, cela serait nettement insuffisant". Après avoir longtemps tergiversé, le chancelier Olaf Scholz avait donné fin janvier son feu vert à l'envoi en Ukraine de chars d'assaut Leopard, un fleuron de l'armement allemand.

Berlin, qui veut fournir en tout 18 chars Leopard 2A6 issus des stocks de la Bundeswehr, coordonne une coalition de pays dont l'objectif est d'envoyer deux bataillons de 31 Leopard à Kiev et à laquelle participent entre autres la Suède, la Finlande, le Portugal ou encore la Pologne. De son côté, l'industriel Rheinmetall devrait pourvoir rassembler près de 250 chars dans le cadre de l'aide militaire à Ukraine, dont de nombreux iront à la République tchèque et à la Slovaquie en remplacement de leur envoi antérieur à Kiev de blindés de fabrication russe. D'autres iront à la Bundeswehr, d'autres à l'Ukraine, a précisé Armin Papperger.

Occupée depuis un an, la centrale nucléaire de Zaporijjia est devenue une "base militaire russe"

Après un an d'occupation, la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia ne produit plus d'électricité et ne sert que de base militaire aux troupes russes, selon le maire exilé de la ville d'Energodar, qui abrite ce gigantesque complexe. L'armée russe a occupé dès le 4 mars 2022, neuf jours après le début de son invasion, cette centrale nucléaire du sud de l'Ukraine. "Pendant cette année d'occupation, ils ont transformé la plus grande centrale nucléaire d'Europe en base militaire", indique à l'AFP le maire Dmytro Orlov, 37 ans, selon qui les Russes savent "que l'armée ukrainienne ne tirera pas" sur le site pour éviter un incident.

Les Russes utilisent la centrale comme "bouclier nucléaire pour placer du matériel militaire, des munitions et du personnel", souligne-t-il. Selon ses informations, au moins 1.000 militaires russes se trouvent actuellement sur le site de la centrale et à Energodar, dont la population est selon lui passée de 53.000 à "environ 15.000" en un an.

Roberta Metsola espère l'ouverture de négociations d'adhésion à l'UE cette année

La présidente du Parlement européen Roberta Metsola, en visite samedi en Ukraine, a indiqué "avoir l'espoir" que des négociations d'adhésion pourront s'ouvrir cette année entre Kiev et l'Union européenne. "L'avenir de l'Ukraine est dans l'Union européenne", a déclaré Roberta Metsola, qui a rencontré le président Volodymyr Zelensky à Lviv (ouest). "Je suis impressionnée par le rythme avec lequel la Verkhovna Rada (Parlement ukrainien) et le gouvernement progressent dans la candidature à l'UE", a ajouté la responsable maltaise, dont c'est la deuxième visite dans ce pays depuis le début de la guerre.

L'UE a accordé en juin dernier le statut de candidat à l'Ukraine, quatre mois après le lancement de l'offensive russe. La prochaine étape du long et difficile chemin vers l'intégration dans l'Union est l'ouverture de négociations d'adhésion, une décision qui doit être prise par les Etats membres à l'unanimité après proposition de la Commission. Pour cela, l'Ukraine doit mener des réformes afin de répondre aux critères de l'UE en matière d'Etat de droit et de démocratie. "L'Ukraine a pour objectif d'achever la mise en oeuvre des recommandations de la Commission européenne dès que possible et d'entamer les négociations d'adhésion à l'UE dès cette année", a assuré Volodymyr Zelensky dans un message publié sur Telegram après sa rencontre avec Mme Metsola, qu'il a remerciée pour son soutien.

La responsable européenne, qui a aussi rencontré le président du Parlement ukrainien Rouslan Stefantchouk ainsi que le procureur général d'Ukraine Andriy Kostin, a par ailleurs appelé à "des sanctions accrues sur la Russie et à fermer les échappatoires" possibles. Elle s'est engagée à "continuer d'appeler les Etats membres à apporter tous les équipements militaires nécessaires, les munitions et les systèmes de défense dont l'Ukraine a besoin pour gagner" la guerre, estimant que les pays de l'UE "devraient sérieusement envisager" de fournir des avions de combat.

10 morts à Zaporijjia

Kiev a également indiqué samedi que le chef des forces spéciales ukrainiennes, le général Viktor Khorenko, avait inspecté des unités qui défendent Bakhmout. La ville, désormais en grande partie détruite, comptait quelque 70.000 habitants avant l'offensive russe. Il en reste aujourd'hui 4.500, selon les autorités locales. Parallèlement, plusieurs responsables de régions ukrainiennes dans le sud et l'est du pays ont signalé de nouveaux tirs russes contre des infrastructures civiles lors des dernières 24 heures.

Les services d'urgence ukrainiens ont par ailleurs indiqué samedi que le bilan de la frappe contre un immeuble d'habitation à Zaporijjia, dans la nuit de mercredi à jeudi, était monté à 10 morts, dont un enfant, et que les opérations de recherche se poursuivaient dans les décombres. Les autorités de cette région ont également annoncé la mort de deux civils lors d'une frappe "d'artillerie russe" samedi matin sur la ville de Gouliaï Polé.