Libye : un anniversaire sous tension

Aucun programme officiel n'a été annoncé pour célébrer le premier anniversaire de la révolution
Aucun programme officiel n'a été annoncé pour célébrer le premier anniversaire de la révolution © REUTERS
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Le premier anniversaire de la révolution libyenne est célébré sous le signe de la sécurité.

C'est un premier anniversaire célébré sans fanfare. Un an après la chute du dictateur Mouammar Kadhafi, la Libye est loin d'être un pays apaisé et réconcilié.

Alertes d'ONG face à de graves violations des droits humains, mises en garde de la communauté internationale, déploiement des forces de sécurité dans le pays…  Europe1.fr fait le point sur la situation de la Libye un an après le déclenchement de la révolution.

Des atteintes aux droits humains. A la veille de ce premier anniversaire, l'ONG de défense des droits de l'Homme Amnesty International tire la sonnette d'alerte sur les violations constatées en Libye dans un rapport.

L'ONG dénonce les graves abus et les crimes de guerre commis par des milices d'anciens rebelles.

Sur Europe 1, Donatella Rovera détaille ces exactions. "Il s'agit essentiellement de détentions illégales. J'ai enquêté sur plusieurs cas de détenus qui sont morts après la torture (…) dans tous les centres de détention que j'ai visités, sauf un, j'ai trouvé des détenus qui avaient été torturés gravement. Dans certains cas, ils n'arrivaient même pas à bouger et avaient des difficultés à parler, parfois les détenus avaient été torturés la veille de ma visite", raconte une responsable d'Amnesty.

L'ONG réfute enfin l'argument de bavures individuelles, avancé par les autorités libyennes pour répondre à ces révélations.

Appels de la communauté internationale. Face à ces exactions, Ban Ki-Moon a appelé "tous les Libyens à se rassembler dans un esprit de réconciliation, à faire valoir qu'une révolution menée au nom des droits de l'Homme ne doit pas être ternie par des exactions, mais doit mener à la justice et à un Etat de droit".

L'ONU est prête à "aider au maximum la Libye dans cette période de transition", notamment pour l'élaboration d'une constitution et  l'élection d'une assemblée nationale, a également rappelé son secrétaire général.

D'autres voix se sont élevées pour saluer cet anniversaire. Le porte-parole de la Maison-Blanche a rappelé qu'"en février dernier, peu auraient pu imaginer que les manifestations pacifiques, de Benghazi à Tripoli, auraient pu abattre une dictature qui durait depuis quatre décennies". "Les révolutionnaires qui se sont tant battus pour les libertés ont maintenant la responsabilité de les protéger en coopérant avec le gouvernement pour établir la stabilité, la paix et la réconciliation", a également déclaré Jay Carney.

Une tonalité positive relayée en France par Bernard Henri-Lévy. Le philosophe, qui s'était fait l'an dernier l'émissaire des révolutionnaires libyens auprès de Nicolas Sarkozy, a rappelé sur Europe 1 qu'"on est dans la mise en place difficile, chaotique, d'un processus démocratique dans une société qui a été liquidée pendant 42 ans." Pour lui, "il y a une bataille politique en cours, très âpre, très rude, dont je pense aujourd'hui qu'elle se déroulera de manière heureuse."

Quant à la voix officielle de la France, celle d'Alain Juppé, elle a appelé vendredi la Libye à prendre de nouvelles mesures pour défendre les droits des minorités, alors que des "violences et des exactions continuent d'avoir cours" dans ce pays.

Une liesse encadrée. Depuis mercredi, des célébrations spontanées ont commencé dans plusieurs villes du pays, notamment à Benghazi. Les habitants ont fêté ce premier anniversaire avec force pétards et klaxons. Le gros de la fête devrait se dérouler après la prière de vendredi.

Les nouveaux dirigeants libyens n'ont toutefois prévu aucun programme officiel par "respect pour les familles des martyrs, les blessés et les disparus". Pour l'occasion, le régime a déployé des mesures de sécurité exceptionnelles pour prévenir d'éventuelles attaques de partisans de l'ancien régime.

Plusieurs check-points ont été installés par les ex-rebelles avec fouilles des véhicules et contrôles d'identités, provoquant des embouteillages dans plusieurs quartiers de la capitale.

Dans ce contexte, un groupe inconnu de partisans de l'ancien régime a annoncé dans un communiqué circulant sur Internet la formation d'un "mouvement libyen populaire national" qui dénonce notamment l'absence d'institutions pour la justice et la sécurité ainsi que la prolifération des milices armées.

Ce groupe, qui se dit fier du "courage" du "martyr Mouammar Kadhafi", affirme avoir notamment pour objectifs de dissoudre les milices armées et de bâtir les institutions de l'Etat. La libération de tous les prisonniers "y compris Seif al-Islam", fils de Mouammar Kadhafi détenu depuis son arrestation en novembre dans le sud du pays, fait partie de son programme.