La sécheresse a anéanti des civilisations

Des travaux publiés jeudi par des chercheurs français nous apprennent que la sécheresse fut la cause de l'extinction de trois grandes civilisations méditerranéennes, que l'on pensait jusque là dévastées par les guerres.
Des travaux publiés jeudi par des chercheurs français nous apprennent que la sécheresse fut la cause de l'extinction de trois grandes civilisations méditerranéennes, que l'on pensait jusque là dévastées par les guerres. © MAXPPP
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C'est arrivé à trois grandes sociétés méditerranéennes, que l'on pensait victimes de la guerre. Et aujourd'hui ?

Chaleurs. Quels que soient les efforts déployés pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, des vagues de chaleur plus fortes et plus fréquentes seront inévitables ces 30 prochaines années, affirme une étude parue jeudi dans la revue Environmental Research Letters. Un constat inquiétant, mais susceptible de pousser les hommes à se préparer à avoir chaud. Il y a 3.200 ans en tout cas, cela en aurait probablement intéressé plus d'un d'avoir une telle information. Pur hasard de calendrier, des travaux publiés le même jour par des chercheurs français dans la revue américaine Plos One nous apprennent en effet que la sécheresse fut la cause de l'extinction de trois grandes civilisations méditerranéennes, que l'on pensait jusque là dévastées par les guerres.

>> Selon ces chercheurs, le climat joue ainsi un rôle clé dans l'évolution des sociétés humaines. Et nous ne sommes pas à l'abri que ça se reproduise. On vous résume ce qu'il faut retenir de cette découverte.

Une sècheresse de quatre siècles. L'effondrement politique et économique de trois civilisations parmi les plus avancées de l'époque, les mycénienne, minoenne et le vaste empire Hittite, à la fin de l'âge de bronze (1.100/1.200 avant J.C.) avait jusqu'à maintenant surtout été attribué à des destructions humaines consécutives pour partie aux invasions dans le delta du Nil, les côtes turques ou en Syrie et en Palestine. Mais, les auteurs de ces travaux ont analysé les grains de pollen retrouvés dans des sédiments du lac salé de Larnaka, sur l'île de Chypre. Le changement des isotopes de carbone, la "signature chimique" des plantes locales et de la région, montre que le lac a connu une période humide avant de s'assécher progressivement et de déboucher sur une période de sécheresse de quatre siècles qui a frappé ces trois civilisations, dont la domination s'étendait de la Grèce à la Syrie, en passant par la Crète et toute l'Anatolie (à peu près l'équivalent de la Turquie aujourd'hui).

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© Reuters

Famines, invasions étrangères et conflits. Combinant ces données avec des indices archéologiques comme des tablettes cunéiformes et des correspondances entre monarques, les chercheurs concluent que la crise qui a conduit à la fin de l'âge de bronze en Méditerranée orientale a ainsi été "un épisode complexe ayant résulté d'une sécheresse provoquée par un changement climatique, et qui a entraîné des famines, des invasions étrangères et des conflits politiques". "C'est l'un des meilleurs exemples montrant comment une entité économique et commerciale internationale, composée de multiples Etats, peut s'effondrer en raison du changement climatique", a commenté jeudi Lee Drake, professeur d'Archéologie à l'Université du Nouveau-Mexique.

"Pas inconcevable que cela se reproduise". Les causes de cette sècheresse ne sont pas encore totalement établies. Les températures de surface de la Méditerranée se sont rapidement refroidies durant cette époque réduisant l'évaporation et les précipitations dans les terres, selon Lee Drake. Cela a correspondu à un refroidissement général de deux degrés dans l'hémisphère nord, précise-t-il. "La grande question est de savoir pourquoi un important changement de la température globale a pu provoquer une réaction aussi rapide en Méditerranée" relève ce chercheur. "Je pense qu'il est très important de comprendre ce mécanisme car il n'est pas inconcevable qu'un tel phénomène se reproduise", prévient-il. Et de conclure : "le plus grand danger au Proche-Orient n'est pas nécessairement représenté par un Etat ou un dictateur mais plutôt par le changement climatique".