Marseille : inquiétant phénomène de disparitions liées à la drogue

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34 personnes ont été arrêtées lors d'une opération anti-drogue, cité de La Castellane, à Marseille, le 15 juin 2015. © BERTRAND LANGLOIS / AFP
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Nathalie Chevance et , modifié à
Au lendemain du vaste coup de filet anti-drogue dans la cité de La Castellane, coup de projecteur sur un phénomène alarmant : les disparitions sur fond de trafic. La mère de l'un de ses jeunes se confie à Europe 1.
TÉMOIGNAGE

Pas de dépouilles, pas de chiffres officiels. Après les 34 interpellations lors d’une vaste opération de démantèlement d’une filière de stupéfiants, lundi, à La Castellane, dans les quartiers Nord de la cité phocéenne, Europe 1 vous dévoile un phénomène alarmant : les disparitions sur fond de trafic de drogue et de règlements de compte. Dans le quartier de La Castellane, connu pour être un "supermarché" de la drogue, plusieurs familles sont touchées. A l’instar de cette mère de famille, Cherifa Bouali, qui s'est livrée à Europe 1.

Dans l'attente depuis un an. Son fils Zakaria, attiré par l’argent, est tombé dans le trafic de drogue. D'après le quotidien La Provence, il travaillait avec le réseau La Jougarelle, l'un des plus importants de la cité. Depuis un an, le jeune homme de 24 ans n’a plus donné signe de vie. Depuis, Cherifa Bouali a préféré déménagé pour protéger ses trois autres enfants. Mais tous les jours, cette mère de famille revient à La Castellane où elle a vécu modestement pendant plus de vingt ans avec son garçon.

Un deuil sans corps. Car cette mère sait que son fils a été tué, mais elle n’a jamais retrouvé sa dépouille. Aujourd’hui, elle lance au micro d'Europe 1 un appel aux trafiquants, à ceux qui savent : "Arrêtez parce qu’il y a beaucoup de mamans qui pleurent. Moi je pleure tous les jours. Ce qui a fait partir mon fils, c’est la drogue, ce n’est pas autre chose", reconnait-elle.

La loi du silence. "Ce que je demande, c’est le corps de mon fils. Qu’il soit vivant, j’ai pas d’espoir. Les gens savent qui c’est, mais ne parlent pas. Les gens ont peur", raconte Cherifa Bouali. "Si vous savez quelque chose… Glissez juste un bout de papier dans ma boîte aux lettres : ‘le corps de votre fils, il est là’. Je ne demande que ça et je fais mon deuil", supplie-t-elle.

Des disparitions croissantes. Et cette mère est allée frapper à la porte du député socialiste de la 7e circonscription des Bouches-du-Rhône, Henri Jibrayel. Cet homme est inquiet face à la multiplication de ces disparitions sur fond de trafic de drogue : "Quand ça gêne, on débarrasse les gens… Croyez-moi, il n’y a pas que cette maman. Plusieurs mamans, aujourd’hui, se posent des questions sur la disparition de leurs enfants, c’est inquiétant", souligne-t-il.

"A la fois, on arrive à élucider des homicides et on oublie souvent de parler de ces enfants, de ces jeunes qui disparaissent. Où sont-ils ? Que sont-ils devenus ? C’est la question que l’on doit se poser" conclut le député.

Aujourd’hui, les langues se délient et les familles n’hésitent plus à parler aux autorités, aux élus. Ce député, par exemple, a été sollicité à trois reprises ces derniers mois.