Les tensions en Corse résumées en six actes

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avec AFP , modifié à
Un supporter bastiais a été grièvement blessé dans des heurts avec la police samedi à Reims. Une information judiciaire visant à éclaircir les circonstances des affrontements a été ouverte.

"Les mauvais souvenirs" sont ravivés en Corse. Et les tensions qui les accompagnent semblaient se tarir mercredi soir. Depuis qu'un supporter du SC Bastia a été grièvement blessé dans des heurts avec des policiers, plusieurs affrontements avaient éclaté sur l’île de Beauté. Une information judiciaire destinée à éclaircir les circonstances dans lesquelles le supporter bastiais a été grièvement blessé, samedi à Reims, a été ouverte mercredi. L'Inspection générale de la police nationale, c'est-à-dire la police des polices, a été saisie de l'enquête.

ACTE 1 - Les affrontements de Reims. Samedi 13 février, le match de ligue 1 Reims-Bastia vient de se terminer, lorsque des échauffourées éclatent. Selon le procureur de Reims, des insultes de supporters corses fusent à l’encontre des policiers. Les provocations vont plus loin : une vingtaine de supporters lancent des engins incendiaires.

Les policiers chargent alors les plus véhéments. Maxime Beux, 22 ans, est blessé à l’œil en tombant sur un poteau, alors qu’il tentait d'échapper à des policiers lancés à sa poursuite dans le centre de Reims. Selon les policiers, le jeune homme s’était montré "menaçant" et avait tenté de dégrader un véhicule de police.

Au moment de reprendre la route de l’île de Beauté à bord d’un bus, une dizaine de supporters seraient restés sur place, avant de lancer des fumigènes sur les forces de l'ordre, qui auraient riposté en utilisant à une reprise un flash-ball envers un manifestant, qui n’a pas été blessé, selon le procureur de Reims.

" Le groupe de supporters a été passé à tabac par des forces de police surexcitées et armées "

ACTE 2 – Des voix discordantes se font entendre. Rapidement, des versions contradictoires émergent, faisant état de violences policières injustifiées. Jean-Guy Talamoni, le président nationaliste de l'Assemblée de Corse et Gilles Simeoni, le président nationaliste de la collectivité territoriale de Corse, se font les porte-voix de cette version. Ce dernier a évoqué mardi de nombreux éléments qui, selon lui, "tendent à accréditer la thèse d'un tir délibéré" de flash-ball de la part d'un policier.

Le principal club de supporteurs bastiais, Bastia 1905, soutient cette même version sur son compte Facebook. Selon eux, le groupe de supporters a été "passé à tabac par des forces de police surexcitées et armées" et un supporter a été la cible d’un "tir de flash-ball en plein visage".

ACTE 3 – De nouveaux affrontements sur l’Ile de Beauté. Dans un contexte marqué par les désaccords entre Paris et les nouvelles autorités nationalistes élues lors d'une victoire historique aux territoriales de décembre, la tension n'était pas retombée les trois jours suivants dans l'Ile de Beauté.

De violents incidents ont opposé jeunes manifestants et forces de l'ordre dimanche à Bastia, puis lundi et mardi à Corte où les syndicats étudiants nationalistes de l'Université de Corse avaient appelé à des rassemblements qui ont dégénéré.

Jets de pierre et de cocktails Molotov : Corte sous tension


Jets de pierre et de cocktails Molotov : Corte...par Europe1fr

L'agitation se poursuivait mercredi dans les lycées de plusieurs villes corses avec des rassemblements d'élèves et des feux de poubelles prés de certains établissements. A Bastia, le lycée Jean Nicoli, l'un des plus grands de la ville, a été fermé avec l'accord du rectorat. Le recteur Michel Barat a dénoncé dans un communiqué "des éléments non identifiés (qui) ont allumé des incendies aux abords de l'établissement". A Corte, mercredi, pour le troisième jour consécutif, le blocage de l'université se poursuivait.

ACTE 4 – La tentative d’apaisement. Pour calmer le jeu, Jean-Guy Talamoni, le président nationaliste de l'Assemblée de Corse, a rencontré mercredi soir "l'ensemble des syndicats" étudiants. La réunion entre syndicalistes étudiants et les dirigeants nationalistes de la région Jean-Guy Talamoni et Gilles Simeoni a abouti à un relâchement de la tension et un très probable déblocage dès jeudi. En début de soirée, la situation était calme dans la ville.

Jean-Guy Talamoni rencontre les leaders étudiants à Corte

ACTE 5 - Le temps de l’enquête. Le parquet de Reims a annoncé mercredi l'ouverture d'une information judiciaire contre X pour "violences volontaires". L'Inspection générale de la police nationale a été saisie dans le cadre de l'enquête sur les heurts qui ont abouti à la blessure de Maxime Beux.

A Reims, après la garde à vue de huit personnes se présentant comme des supporters du Sporting Club de Bastia, sept sont poursuivis pour violences à l'encontre des forces de l'ordre. Ils comparaîtront le 22 mars devant le tribunal correctionnel. Le huitième, âgé de 17 ans, doit être convoqué devant le tribunal pour enfants.

ACTE 6 - Un match reporté. Dans un tel environnement, le match de samedi entre Bastia et Nantes apparaissait à hauts risques. Le match Bastia-Nantes, dont la reprogrammation à 14 heures au lieu de 20 heures samedi était contestée par le club corse, a été reporté au 9 mars "vu le contexte actuel", a annoncé mercredi Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP).

Cette décision a été prise "en accord avec le ministère de l'Intérieur et le préfet de Haute-Corse", a poursuivi Frédéric Thiriez. "En tant que président de la LFP, je ne peux accepter que le football soit l'otage de batailles politiques. Je ne veux pas que le football devienne prétexte à des actes de violence", a-t-il encore ajouté.