Strasbourg : que sait-on sur l'opération anti-djihadiste ?

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Cécile Bouanchaud, Marc-Antoine Bindler avec Frédéric Michel et Pierre de Cossette , modifié à
L'ESSENTIEL - Sept djihadistes présumés restent en garde à vue. Les policiers de la DGSI vont notamment les interroger sur leur parcours en Syrie.

Un peu plus de deux semaines après la présentation du plan de lutte contre les filières djihadistes, l'heure est à l'action. Sept jeunes Français partis mener le djihad en Syrie en décembre dernier, et revenus en France depuis un mois, ont été interpellés mardi matin, dans leur quartier à Strasbourg, dans le Bas-Rhin. Les individus, âgés de 23 à 25 ans, sont depuis en garde à vue pour une durée maximale de 96 heures. Ils ont quitté Strasbourg peu après 18 heures pour être transférés à Levallois-Perret, au siège de la DGSI, chargée de l'enquête depuis novembre.

Comment s'est déroulé le coup de filet ? L'opération menée par les membres du Raid et du GIPN s'est déroulée vers 6 heures, devant une barre d'immeubles. La demi-douzaine de policiers cagoulés et armés sont intervenus principalement dans un immeuble de quatre étages, du quartier de la Meinau, à Strasbourg. Et plusieurs véhicules d'intervention étaient visibles devant ces logements. "Conduite dans un cadre judiciaire par la nouvelle Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) appuyée par le Raid, l'opération s'est parfaitement déroulée", a précisé Bernard Cazeneuve.

Écoutez le récit du coup de filet par notre correspondant sur place :

Strasbourg : coup de filet anti-djihadistes en...par Europe1fr

Sur quoi porte l'enquête ? Depuis novembre 2013, une juge antiterroriste enquête sur une filière bien organisée de départs vers la Syrie. Pendant leur garde à vue, les sept Strasbourgeois vont être interrogés sur leur parcours en Syrie. Les policiers de la DGSI vont notamment tenter de savoir s'ils ont rejoint des camps d'entrainement, ou s'ils ont combattu. Les djihadistes présumés devraient également être interrogés sur le rôle clef d'un homme, un Français de 29 ans originaire de Haute-Savoie, qui se trouve toujours en Syrie. Celui qui se fait appeler Mourrad al-Faransi (Mourrad "le Français) est considéré comme une sorte de pivot propagandiste chargé de recruter des candidats au djihad via Internet et les réseaux sociaux. Son nom apparaît dans de nombreux autres dossiers dont le cas particulièrement polémique des deux adolescents Toulousains récupérés par leurs proches après un bref séjour en Syrie, en janvier dernier. 

Dans ce même dossier , quatre personnes ont déjà été mises en examen en mars. Il s'agit de trois hommes et d'une femme qui vivaient en région parisienne et qui étaient en contact avec le front Al Nosra, l'une des branches d'Al Qaida en Syrie. Tout comme les individus interpellés mardi matin.

L'immeuble où six apprentis djihadistes ont été interpellés à Strasbourg

© Max PPP

Qu'est-il reproché aux jeunes interpellés ? Leur périple a débuté mi-décembre. Quatorze jeunes hommes font croire à leurs parents qu'ils se rendent de l'autre côté de la frontière française, à Francfort, en Allemagne, avant de prendre des vacances à Dubaï. Mais en réalité, ils prennent l’avion pour Antalya, au sud de la Turquie. De là, via un réseau, ils rejoignent d'autres djihadistes dans un camp d’entraînement, avec pour destination finale la Syrie. Aujourd'hui, outre les sept suspects interpellés Strasbourg, certains membres sont toujours en Syrie alors que d'autres, deux frères, y ont laissé la vie. 

Quel comportement avaient-ils depuis leur retour ? Les sept individus arrêtés mardi à l'aube ont choisi de rentrer en France il y a quelques semaines. Depuis, ils se montraient relativement discrets, selon leurs voisins, mais n'en étaient pas moins surveillés par les policiers du renseignement intérieur. Aucune arme ni explosif n'ont été retrouvés lors des perquisitions mardi. 

Comment ont-ils été embrigadés ? Selon les proches des jeunes djihadistes, ces derniers ne sont pas issus de milieux extrémistes. Beaucoup d'entre eux avaient en effet un emploi et des engagements associatifs. Certains sont même mariés et père de famille. Leur embrigadement semble être allé très vite, notamment grâce aux réseaux sociaux, mais aussi via des recruteurs en France.

13.05 Le coup de filet, mené par le RAID et le GIPN s'est déroulé mardi matin dans le quartier de la Meinau, à Strasbourg. 930620

© Capture d'écran i

Que prévoit le plan anti-djihad pour eux ? Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur a présenté le 23 avril dernier son plan de lutte contre les filières djihadistes. L'objectif est clair : empêcher de jeunes Français d'aller mener le combat en Syrie notamment. "On me demande souvent ce qu'il advient" à leur retour de ces jeunes partis en Syrie pour y mener le djihad : "ils sont en lien avec une entreprise terroriste, ils sont arrêtés et remis à la justice", a détaille le ministre mardi.

Selon le ministre, 285 Français sont actuellement en train de faire le djihad. Il faut ajouter 120 personnes qui tenteraient en ce moment-même de rejoindre la Syrie. Le ministre de l'Intérieur a par ailleurs souligné l'inquiétante augmentation du nombre de Français en Syrie : +75% en quelques mois.