Condamné pour viol, un détenu grabataire de 90 ans libéré

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avec Pierre de Cossette et AFP
La justice a estimé que la peine  constituait "un traitement inhumain" pour ce nonagénaire qui ne bénéficiait en prison d'aucune prise en charge spécifique.

Il est incontinent, sourd, souffre d'un glaucome et se déplace en fauteuil roulant. Incarcéré pour viol, un détenu de 90 ans a vu sa peine suspendue vendredi dernier par la justice au motif qu'elle constituait "un traitement inhumain". Selon le jugement, l'homme est incapable de faire sa toilette et de s'habiller seul.

Aucune prise en charge spécifique. Incarcéré à la maison d'arrêt d'Osny, dans le Val-d'Oise, qui affiche un taux de surpopulation de 151%, le condamné ne bénéficiait d'aucune prise en charge spécifique. Il ne peut ainsi compter que sur l'aide bénévole de deux codétenus pour ses tâches quotidiennes et notamment sa toilette. Pour le juge de l'application des peines (JAP) de Pontoise, l'incarcération du nonagénaire est "durablement incompatible" avec son état de santé, et constitue "un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'Homme". Le parquet dispose de dix jours pour faire appel de cette décision.

En prison depuis huit ans. Détenu depuis 2006, le nonagénaire avait été condamné en 2008 par la cour d'assises d'appel des Yvelines à 14 ans de réclusion pour des viols et agressions sexuelles sur sa petite-fille alors mineure, entre 2000 et 2006. Des faits qu'il a toujours contestés. Son avocat Me Tarek Koraitem avait demandé la suspension de cette peine, devant s'achever en novembre 2016, pour que son client puisse finir ses jours chez son fils. Sa remise en liberté sera effective le 12 novembre.

"Cela nous questionne sur notre propre humanité".  "Il est totalement grabataire", assure Me Tarek Koraitem au micro d'Europe 1. "La maison d'arrêt, ce n'est pas une maison de retraite, ce n'est pas un centre de gérontologie. Les maisons d'arrêt françaises, en tout cas celle du Val d'Oise, ne sont pas du tout équipées pour s'occuper d'une personne de cet âge", dénonce-t-il.  

 "Cela nous questionne sur notre propre humanité", poursuit l'avocat. "On se dit que, certes, il faut que cette personne paye pour ce qu'elle a fait. Mais il faut aussi se dire que c'est un être humain et que la peine qui lui est infligée ne doit pas être beaucoup plus difficile à vivre que pour n'importe quelle autre personne", précise Me Koraitem.

 Un risque de réitération "infime". L'expertise médicopsychologique du condamné a conclu qu'il ne présentait "aucune dangerosité au sens psychiatrique", et que le risque de réitération paraissait "infime". "Le seuil de l'acceptable est dépassé" a de son côté assuré le directeur de l'établissement, admettant ne plus avoir "les moyens de prendre en charge le condamné avec un minimum de dignité et de sécurité".